Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 14 mai 1993 et 13 septembre 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Alfred X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 11 mars 1993 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 10 juillet 1987 par laquelle le secrétaire d'Etat aux anciens combattants a confirmé la décision du 16 février 1987 prononçant le retrait de sa carte du combattant ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 10 juillet 1987 ainsi que celle du 16 février 1987 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Labarre, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de M. Alfred X...,
- les conclusions de M. Stahl, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 253 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : "Il est créé une carte du combattant qui est attribuée dans les conditions fixées aux articles R. 223 à R. 235" ; qu'aux termes du 8° du I du C de l'article R. 224 du même code sont considérés comme combattants les militaires "qui, Alsaciens ou Mosellans, sans avoir servi dans l'armée française, satisfont aux conditions qui sont déterminées par arrêté interministériel et dont les dispositions font l'objet des articles A. 123-2 à A. 123-5" ; qu'en vertu des articles A. 123-2 et A. 123-3 du code, "Peuvent prétendre de droit à la carte du combattant les Alsaciens et Mosellans incorporés de force au cours des hostilités, à partir du 25 août 1942, dans l'armée allemande, qui remplissent l'une des conditions suivantes : 1°) Avoir appartenu pendant au moins quatre-vingt dix jours à ladite armée ; 2°) Avoir été évacués du front par blessure reçue ou maladie contractée en service, sans condition de durée de séjour ; 3°) Avoir reçu une blessure de guerre ; 4°) Avoir été faits prisonniers alors qu'ils appartenaient à ladite armée, sans condition de durée de séjour ; 5°) S'être évadés d'une formation de l'armée allemande./ Sont exclus du bénéfice des dispositions qui précèdent les sous-officiers promus officiers et les officiers ayant obtenu un avancement de grade dans l'armée allemande" ;
Considérant que, par une décision du 29 octobre 1982, la carte du combattant a été attribuée à M. X... en application des dispositions précitées des articles R. 224, A. 123-2 et A. 123-3 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, en raison de son incorporation dans l'armée allemande en octobre 1943 ; que cette carte lui a été retirée par une décision du 16 février 1987 confirmée, sur recours gracieux, par une décision du 10 juillet 1987 ;
Considérant, en premier lieu, que les décisions portant attribution de la carte du combattant prévue à l'article L. 253 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre se bornent à constater que les intéressés remplissent les conditions prévues par l'article R. 224 du code ; que, par suite, une décision qui reconnaît à tort le droit à ladite carte peut être à tout moment rapportée, sans qu'y fasse obstacle l'expiration du délai d'un an fixé par l'article A. 123-5 du code pour faire opposition à la délivrance de la carte du combattant aux Alsaciens et Mosellans en raison de leur appartenance à certaines formations ou de leur comportement individuel ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de ce qui précède que les décisions portant attribution de la carte du combattant en application des dispositions des articles L. 253 et R. 224 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ne présentent pas le caractère d'actes créateurs de droit ; que, par suite, le retrait de telles décisions n'entre dans aucune des catégories de décisions devant être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979 ;
Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte des articles A. 123-2 et A. 123-3 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre que peuvent seuls prétendre à la carte du combattant en raison de services accomplis dans l'armée allemande les Alsaciens et Mosellans qui ont été incorporés de force dans cette armée ; que les intéressés ne sauraient être regardés comme incorporés de force que si leur incorporation est intervenue dans des conditions exclusives de tout acte de volonté caractérisé de leur part ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X... a adhéré en 1942 à la formation nationale-socialiste NSKK avant son incorporation dans l'armée allemande en 1943 ; que, dans ces conditions, l'incorporation de M. X... ne peut être regardée comme ayant eu lieu dans des conditions exclusives de tout acte de volonté caractérisé ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Alfred X... et au secrétaire d'Etat aux anciens combattants.