Vu la requête, enregistrée le 18 octobre 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le SERVICE INTERENTREPRISES DE MEDECINE DU TRAVAIL DE LA MAYENNE (SIMTM), dont le siège est ... (53020) ; le SERVICE INTERENTREPRISES DE MEDECINE DU TRAVAIL DE LA MAYENNE demande que le Conseil d'Etat annule pour excès de pouvoir l'instruction administrative 3A-3-93 du 23 février 1993, relative au régime fiscal des associations interentreprises de médecine du travail ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Hourdin, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Goulard, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que le SERVICE INTERENTREPRISES DE MEDECINE DU TRAVAIL DE LA MAYENNE demande l'annulation de l'instruction 3 A-3-93 du 23 février 1993, publiée au Bulletin officiel des impôts du 8 mars 1993, en ce qu'elle énonce, d'une part, au paragraphe B-1° b) du chapitre 1er de son titre premier, que les associations gérant un service de médecine du travail interentreprises restent redevables de la taxe sur la valeur ajoutée lorsqu'elles font appel à un spécialiste extérieur pour effectuer certains examens médicaux, d'autre part, en son titre second, que ces associations sont passibles, dans les conditions du droit commun, de l'impôt sur les sociétés, de l'imposition forfaitaire annuelle, de la taxe d'apprentissage et de la taxe professionnelle ;
En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée :
Considérant qu'aux termes de l'article 256 du code général des impôts : "I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée ... les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ..." et qu'aux termes du premier alinéa de l'article 256 A du même code : "Sont assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée les personnes qui effectuent de manière indépendante, une des activités économiques mentionnées au troisième alinéa, quels que soient le statut juridique de ces personnes, leur situation au regard des autres impôts et la forme ou la nature de leur intervention ..." ;
Considérant que les associations gérant un service interentreprises de médecine du travail sont au nombre des personnes qui, effectuant, au bénéfice des entreprises adhérentes, des opérations ayant la nature de prestations de services fournies à titre onéreux, sont, par application des articles 256 et 256 A du code général des impôts, précités, assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée ; que le SERVICE INTERENTREPRISES DE MEDECINE DU TRAVAIL DE LA MAYENNE soutient cependant que l'instruction 3 A-3-93 du 23 février 1993 méconnaîtrait les dispositions de l'article 261-4-1° du code général des impôts qui exonèrent de la taxe sur la valeur ajoutée les "soins dispensés aux personnes par les membres des professions médicales" en prévoyant que, lorsqu'un médecin spécialiste extérieur à une association gérant un service interentreprises de médecine du travail examine, à la demande de celle-ci, un salarié d'une entreprise adhérente, et obtient directement de cette dernière le règlement de l'honoraire correspondant, l'association, bien qu'elle "ne reçoive, dans ce cas, aucun versement direct au titre de la prestation du spécialiste, doit prendre toutes les dispositions utiles pour soumettre cette prestation à la taxe sur la valeur ajoutée dont elle est redevable" ;
Considérant que l'examen médical pratiqué dans les conditions ci-dessus relatées constitue une prestation effectuée à la demande et pour le compte de l'association, qui est seule destinataire des résultats de cet examen ; que le fait que l'honoraire dû au médecin spécialiste lui est versé directement par l'entreprise n'a pas pour effet de retirer à l'association, qui doit être regardée comme ayant donné délégation à l'entreprise de payer, en son nom, cet honoraire, sa qualité de prestataire du service rendu à l'employeur concerné et de redevable de la taxe sur la valeur ajoutée sur le prix de la consultation effectuée ; qu'ainsi, en rappelant que, dans un tel cas, l'association reste tenue au paiement de cette taxe, l'instruction 3 A-3-93 s'est bornée à expliciter la portée des articles 256 et 256 A, précités, du code général des impôts, sans rien y ajouter ;
En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés, l'imposition forfaitaire annuelle, la taxe d'apprentissage et la taxe professionnelle :
Considérant qu'en vertu de l'article 206 du code général des impôts, sont passibles de l'impôt sur les sociétés toutes les personnes morales qui se livrent à une exploitation ou à des opérations de caractère lucratif ; que les articles 223 septiès et 224 de ce code assujettissent les mêmes personnes morales à une imposition forfaitaire annuelle et à la taxe d'apprentissage ; que l'article 1447 du code général des impôts dispose que "la taxe professionnelle est due chaque année par les personnes physiques ou morales qui exercent à titre habituel une activité professionnelle non salariée" ;
Considérant que les organismes ayant pour objet exclusif d'assurer, en se conformant aux prescriptions des articles R. 241-12 et suivants du code du travail, l'organisation, le fonctionnement et la gestion d'un service médical du travail interentreprises et de faciliter, ainsi, aux entreprises qui, n'étaient pas tenues de disposer, en propre, d'un service médical du travail, l'exécution à l'obligation que la loi leur impose néanmoins de faire bénéficier leur personnel d'un tel service, doivent être regardés comme exerçant, dans le seul intérêt de celles de ces entreprises qui sont leurs adhérents, une activité de caractère lucratif, alors même que leur gestion ne comporterait pas la recherche d'excédents de recettes ; que le fait que les services médicaux du travail interentreprises doivent être agréés par l'administration et qu'ils accomplissent une mission d'intérêt général définie par la loi, ne supprime pas le caractère lucratif des associations qui en sont chargées ; que ces dernières sont, par suite, passibles de l'impôt sur les sociétés, de l'imposition forfaitaire annuelle, de la taxe d'apprentissage et de la taxe professionnelle, conformément aux dispositions précitées du code général des impôts ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les énonciations de l'instruction 3 A-3-93 du 23 février 1993 que conteste le SERVICE INTERENTREPRISES DE MEDECINE DU TRAVAIL DE LA MAYENNE sont dépourvues de tout caractère réglementaire ; que, par suite, la requête de cette association n'est pas recevable ;
Article 1er : La requête du SERVICE INTERENTREPRISES DE MEDECINE DU TRAVAIL DE LA MAYENNE est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au SERVICE INTERENTREPRISES DE MEDECINE DU TRAVAIL DE LA MAYENNE et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.