Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 6 avril 1994 et 10 juin 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Atnan X..., demeurant au Foyer de la Vance, ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 9 mars 1993 par lequel le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a rejeté sa demande dirigée contre la décision du préfet des Ardennes en date du 22 janvier 1991 refusant de lui délivrer une carte de résident ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir ladite décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n°45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Jodeau-Grymberg, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Odent, avocat de M. Atnan X...,
- les conclusions de M. Hubert, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 14 de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945 : "Peuvent obtenir une carte dite "carte de résident" les étrangers qui justifient d'une résidence non interrompue, conforme aux lois et règlements en vigueur, d'au moins trois années en France. La décision d'accorder ou de refuser la carte de résident est prise en tenant compte des moyens d'existence dont l'étranger peut faire état, parmi lesquels les conditions de son activité professionnelle et, le cas échéant, des faits qu'il peut invoquer à l'appui de son intention de s'établir durablement en France" ;
Considérant que la délivrance de documents permettant aux personnes entrées irrégulièrement en France, et qui sollicitent le titre de réfugié, d'y séjourner jusqu'à ce qu'il ait été statué sur leur demande, doit être regardée comme une mesure de régularisation de la situation des intéressés quant aux conditions de leur entrée en France ;
Considérant que M. X..., de nationalité turque, est entré en France en janvier 1988 et a demandé à bénéficier du statut de réfugié ; qui si sa demande a été rejetée par décision notifiée en janvier 1991, les documents qui lui ont été délivrés jusqu'à ce qu'il ait été statué sur sa demande ont eu pour effet de régulariser sa situation quant aux conditions de son entrée en France ; qu'ainsi, en se fondant sur ce que l'intéressé ne pouvait justifier d'une entrée régulière sur le territoire français pour lui refuser la délivrance d'une carte de résident le préfet des Ardennes a commis une erreur de droit ;
Considérant toutefois que le préfet des Ardennes avait également fondé la décision attaquée sur le fait que M. X... ne justifiait pas d'attaches familiales ni d'une insertion professionnelle suffisantes pour bénéficier du titre de séjour sollicité ; qu'il résulte de l'instruction que le préfet aurait pris la même décision s'il n'avait retenu que ce seul motif ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en estimant que le requérant, sans emploi à la date de la décision attaquée et dont l'épouse et les enfants résidaient en Turquie, ne remplissait pas les conditions énoncées par les dispositions précitées du second alinéa de l'article 14 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet des Ardennes se soit livré à une appréciation erronée des circonstances de l'affaire ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-surMarne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet des Ardennes refusant de lui délivrer une carte de résident ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Atnan X... et au ministre de l'intérieur.