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12/12/1997 | FRANCE | N°186917

France | France, Conseil d'État, 3 / 5 ssr, 12 décembre 1997, 186917


Vu la requête enregistrée le 7 avril 1997 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Wilfrid Y..., demeurant au lieudit "La Trinité", à Saint-Philippe de La Réunion (97442) ; M. Y... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 6 février 1997 par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion a annulé, sur la protestation de M. Z..., d'une part, son élection en qualité de conseiller municipal de la commune de Saint-Philippe (La Réunion), d'autre part, les opérations électorales qui se sont déroulées le 1er décembre 1996

dans cette commune en vue de l'élection du conseil municipal ;
2°) d...

Vu la requête enregistrée le 7 avril 1997 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Wilfrid Y..., demeurant au lieudit "La Trinité", à Saint-Philippe de La Réunion (97442) ; M. Y... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 6 février 1997 par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion a annulé, sur la protestation de M. Z..., d'une part, son élection en qualité de conseiller municipal de la commune de Saint-Philippe (La Réunion), d'autre part, les opérations électorales qui se sont déroulées le 1er décembre 1996 dans cette commune en vue de l'élection du conseil municipal ;
2°) de rejeter la protestation présentée par M. Z... devant le tribunal administratif de Saint-Denis de La Réunion et de valider son élection ;
3°) de condamner M. Z... à lui verser la somme de 13 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code électoral ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Burguburu, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, avocat de M. Wilfrid Y... et de la SCP Gatineau, avocat de M. Fridelin Z...,
- les conclusions de M. Stahl, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article R. 201 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, les jugements des tribunaux administratifs portent la mention "le tribunal administratif de ( ...) (nom de la ville où il siège)" ; que le jugement attaqué ne porte pas la mention selon laquelle il a été rendu par le tribunal administratif de Saint-Denis de La Réunion ; qu'ainsi, le jugement du 6 février 1997, qui ne satisfait pas aux prescriptions de l'article R. 201 précité, est entaché d'irrégularité et doit être annulé ;
Considérant que le délai imparti au tribunal administratif par l'article R. 120 du code électoral pour statuer sur la protestation de M. Fridelin Z... est expiré ; que, dès lors, il y a lieu pour le Conseil d'Etat de statuer immédiatement sur cette protestation ;
Sur l'éligibilité de M. Y... :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 231 du code électoral : "Ne peuvent être élus conseillers municipaux dans les communes situées dans le ressort où ils exercent ou ont exercé leurs fonctions depuis moins de six mois : ( ...) 8° les membres du cabinet du président du conseil général ( ...)" ; qu'il est constant que M. Wilfrid Y... exerçait au 1er décembre 1996, date de son élection en qualité de conseiller municipal de la commune de Saint-Philippe à la Réunion, les fonctions de conseiller spécial du président du conseil général de ce département ; qu'ainsi, et alors même qu'il n'aurait pas détenu de pouvoir de décision et que son nom n'aurait pas figuré sur l'organigramme des services du département, il tombait sous le coup de l'inéligibilité édictée par les dispositions précitées du code électoral ; que, dès lors, l'élection de M. Y... en qualité de conseiller municipal de la commune de Saint-Philippe doit être annulée ;
Sur les conclusions à fin d'annulation des opérations électorales :
Considérant que la présentation de la liste conduite par M. Y... irrégulièrement formée du fait de l'inéligibilité de celui-ci, n'a pas constitué, compte tenu de l'écart de voix existant entre la liste de M. Y... et celle de M. Z..., une manoeuvre de nature à modifier les résultats du scrutin ;
Considérant que si M. Z... soutient, par ailleurs, que M. Y... a utilisé pendant la campagne des installations de sonorisation et qu'il a été officiellement soutenu par le président du conseil général, ces faits sont restés sans influence sur la régularité du scrutin ;
Considérant que les allégations de M. Z... selon lesquelles le président du conseil général aurait menacé de suspendre les subventions départementales à la commune de Saint-Philippe en cas d'échec de M. Y..., ne sont pas établies ; que ses affirmations relatives à un affichage massif en faveur de la liste de M. Y..., à des promesses d'emplois faites aux électeurs et à des pressions exercées à l'encontre du personnel communal, ne sont pas assorties des précisions permettant d'en apprécier la portée ;

Considérant que si la circulaire de M. Y... faisait directement allusion à l'impossibilité pour l'ancien maire de voter, ou d'être candidat en raison d'une condamnation pénale, ce document qui rapporte un fait établi ne contient aucun élément injurieux ou diffamatoire de nature à fausser les résultats du scrutin ;
Considérant, enfin, que si M. Y... a présidé un bureau de vote en qualité de suppléant du président absent, il ne ressort pas de l'instruction que les résultats de ce bureau aient été entachés de fraudes ou d'anomalies susceptibles d'avoir faussé les résultats du scrutin ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. Z... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'ensemble des opérations électorales qui se sont déroulées le 1er décembre 1996 dans la commune de Saint-Philippe ;
Considérant qu'en application des dispositions de l'article L. 270 du code électoral, il y a lieu, en raison de l'annulation de l'élection de M. Y..., de proclamer élu M. Eric Bernard I..., venant sur la liste où figurait M. Y..., immédiatement après le dernier élu de cette liste ;
Sur les conclusions de M. Z... et de Mme H... tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 et de condamner M. Y... à payer à M. Z... la somme demandée au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Sur les conclusions de M. Y... tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que M. Z... qui n'est pas, dans la présente espèce, la partie perdante, soit condamné à verser à M. Y... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion en date du 6 février 1997 est annulé.
Article 2 : L'élection de M. Y... en qualité de conseiller municipal de la commune de Saint-Philippe est annulée.
Article 3 : M. Eric-Bernard I... est proclamé élu en qualité de conseiller municipal de la commune de Saint-Philippe.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. Y... et de la protestation de M. Z... est rejeté.
Article 5 : Les conclusions de M. Z... et de Mme H... tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 6 : La présente décision sera notifiée à M. Wilfrid Y..., à M. Fridelin Z..., à M. Eric-Bernard I..., à Mme Marie H..., à M. Joseph C..., à M. Thierry X..., à M. Alix A..., à Mme Marguerite B..., à M. Valentin D..., à M. Max E..., à M. Marcellino F..., à M. Bernard G... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 3 / 5 ssr
Numéro d'arrêt : 186917
Date de la décision : 12/12/1997
Type d'affaire : Administrative

Analyses

ELECTIONS - ELECTIONS MUNICIPALES - ELIGIBILITE - INELIGIBILITES - AGENTS DU CONSEIL GENERAL ET DU CONSEIL REGIONAL - Membre du cabinet du président du conseil général - Notion.

28-04-02-02-065 Une personne exerçant les fonctions de conseiller spécial du président du conseil général doit être regardée, pour l'application de l'article L.231-8° du code électoral, comme un membre du cabinet du président du conseil général alors même qu'il n'aurait pas détenu de pouvoir de décision et que son nom n'aurait pas figuré sur l'organigramme des services du département.

PROCEDURE - JUGEMENTS - REDACTION DES JUGEMENTS - Mention permettant l'identification du tribunal (article R - 201 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel) - Absence - Conséquence - Irrégularité du jugement.

54-06-04 Le jugement qui ne mentionne pas, contrairement aux prescriptions de l'article R.201 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, qu'il a été rendu par le tribunal administratif de la ville où il siège est entaché d'irrégularité.


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R201
Code électoral R120, L231, L270
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation : CE, 12 déc. 1997, n° 186917
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Vught
Rapporteur ?: Mme Burguburu
Rapporteur public ?: M. Stahl

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1997:186917.19971212
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