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30/07/1997 | FRANCE | N°177458

France | France, Conseil d'État, 9 ss, 30 juillet 1997, 177458


Vu la requête, enregistrée le 9 février 1996 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE L'ISERE ; le PREFET DE L'ISERE demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 12 janvier 1996 par lequel le vice-président du tribunal administratif de Grenoble désigné par le président de cette juridiction a annulé ses arrêtés du 10 janvier 1996 prononçant une mesure de reconduite à la frontière à l'encontre de Mlle Sebil X... et fixant la Turquie comme pays de destination ;
2°) rejette la demande présentée par Mlle X... devan

t le tribunal administratif de Grenoble ;
Vu les autres pièces du dossier...

Vu la requête, enregistrée le 9 février 1996 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE L'ISERE ; le PREFET DE L'ISERE demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 12 janvier 1996 par lequel le vice-président du tribunal administratif de Grenoble désigné par le président de cette juridiction a annulé ses arrêtés du 10 janvier 1996 prononçant une mesure de reconduite à la frontière à l'encontre de Mlle Sebil X... et fixant la Turquie comme pays de destination ;
2°) rejette la demande présentée par Mlle X... devant le tribunal administratif de Grenoble ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, notamment par les lois du 2 août 1989, 10 janvier 1990 et 24 août 1993 ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Bardou, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Goulard, Commissaire du gouvernement ;

Sur l'intervention de M. Y... :
Considérant que l'intervention de M. Y... ne présente pas les caractères permettant de la regarder comme recevable au sens de l'article 61 de l'ordonnance du 31 juillet 1945 ;
Sur la recevabilité de la requête :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si la requête du PREFET DE L'ISERE dirigée contre le jugement du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble en date du 12 janvier 1996 qui lui a été notifié ce même jour, a été adressée au Conseil d'Etat par courrier postal et enregistrée au secrétariat du Contentieux le 14 février 1996, cette même requête avait été précédemment transmise par télécopie au Conseil d'Etat et enregistrée le 9 février 1996 au secrétariat du Contentieux ; qu'ainsi Mlle X... n'est pas fondée à soutenir que cette requête serait tardive et, par suite, irrecevable ;
Sur le fond :
Considérant qu'il est constant que Mlle X... ne conteste pas qu'elle est en situation irrégulière ; qu'elle se trouvait dès lors dans l'un des cas où, en application de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945 modifiée, le préfet peut décider de faire reconduire un étranger à la frontière ;
Considérant que la circonstance invoquée par Mlle X..., qu'elle poursuivrait dans des conditions satisfaisantes des études devant déboucher sur l'obtention d'un diplôme professionnel, ne suffit pas à elle seule, et en l'absence de toute demande de titre de séjour sur le fondement de sa qualité d'étudiante, à établir que l'arrêté prononçant sa reconduite à la frontière serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; que le PREFET DE L'ISERE est, par suite, fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble s'est fondé pour annuler l'arrêté du 10 janvier 1996 ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle X... sur l'existence d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences dudit arrêté sur la situation de l'intéressée ;
Considérant qu'il appartient au juge d'appel, saisi par l'effet dévolutif, de statuer sur les autres moyens présentés par Mlle X... devant le premier juge ;
Considérant, en premier lieu, que l'arrêté attaqué qui comporte l'énoncé des conditions de fait et de droit constituant le fondement de la décision de reconduite à la frontière, est suffisamment motivé ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 12 de l'accord du 12 septembre 1963 créant une association entre la communauté économique européenne et la Turquie : "Les Parties contractantes conviennent de s'inspirer des articles 48, 49 et 50 du traité instituant la Communauté pour réaliser graduellement la libre circulation des travailleurs entre elles" et qu'aux termes de l'article 22 du même accord : "Pour la réalisation des objectifs fixés par l'accord et dans les cas prévus par celui-ci, le Conseil d'association dispose d'un pouvoir de décision" ; qu'aux termes de l'article 36 du protocole additionnel à l'accord précité, conclu et approuvé par le règlement n° 2760/72 du Conseil en date du 19 décembre 1972 : "La libre circulation des travailleurs entre les Etats membres et la Turquie sera réalisée graduellement conformément aux principes énoncés à l'article 12 de l'accord d'association, entre la fin de la douzième et de la vingt-deuxième année après l'entrée en vigueur dudit accord. Le Conseil d'association décidera des modalités nécessaires à cet effet" ; qu'il résulte des dispositions précitées que la réalisation de la libre circulation est un objectif dont la réalisation est subordonnée à l'intervention de décisions prises par le Conseil d'association ; qu'il est constant que le Conseil d'association n'a pris aucune décision relative à la libre circulation des travailleurs ; que dans ces conditions, et même si plus de vingt deux ans s'étaient écoulés depuis l'entrée en vigueur de l'accord au moment de la décision attaquée, le règlement du Conseil dont se prévaut Mlle X... n a pu créer par lui-même une règle de droit directement applicable dont la violation pourrait être invoquée à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir ; que, par suite, Mlle X... n'est pas fondée à se prévaloir dudit règlement pour soutenir que l'arrêté de reconduite serait entaché d'illégalité ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE L'ISERE est fondé à demander l'annulation du jugement en date du 12 janvier 1996 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du 10 janvier 1996 ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle X... ;
Article 1er : L'intervention de M. Y... n'est pas admise.
Article 2 : Le jugement en date du 12 janvier 1996 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble est annulé.
Article 3 : La demande présentée par Mlle X... devant le tribunal administratif de Grenoble est rejetée.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE L'ISERE, à Mlle Sebil X... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 9 ss
Numéro d'arrêt : 177458
Date de la décision : 30/07/1997
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Accord du 12 septembre 1963 Association CEE Turquie art. 12, art. 22
CEE Règlement 2760-72 du 19 décembre 1972 Conseil
Ordonnance 45-1708 du 31 juillet 1945 art. 61
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945
Protocole additionnel du 23 novembre 1970 Accord Association CEE Turquie


Publications
Proposition de citation : CE, 30 jui. 1997, n° 177458
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Bardou
Rapporteur public ?: M. Goulard

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1997:177458.19970730
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