Vu la requête, enregistrée le 20 janvier 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la société financière, industrielle commerciale et immobilière (SOFICIM), dont le siège est ... ; la société financière, industrielle, commerciale et immobilière (SOFICIM) demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 19 novembre 1991 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté sa requête dirigée contre le jugement du 26 juin 1989 du tribunal administratif de Marseille qui a rejeté sa demande en décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée auquel elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 1979 au 30 avril 1983 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Struillou, Auditeur,
- les observations de la SCP Urtin-Petit, Rousseau-Van Troeyen, avocat de la société financière, industrielle, commerciale et immobilière (SOFICIM),
- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 261 C du code général des impôts, dans sa rédaction issue de l'article 33 de la loi du 29 décembre 1978 : "Sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée : 1°) Les opérations bancaires et financières suivantes : a) L'octroi et la négociation de crédits ainsi que la gestion de crédits effectuée par celui qui les a octroyés ..." ; que ces dispositions, qui ont été prises pour l'adaptation de la législation nationale à l'article 13 B.d.1. de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil des Communautés européennes du 17 mai 1977, exonèrent de la taxe sur la valeur ajoutée la gestion de crédits effectuées par celui qui les a octroyés, aussi bien lorsque celui-ci assume seul le risque de l'opération que lorsqu'il le partage avec un ou des co-prêteurs, à l'égard desquels il joue le rôle d'établissement "chef de file" ; que, sauf dans le cas où la rémunération perçue par cet établissement correspond au remboursement de frais de gestion spécifiquement exposés par lui pour le compte du ou des co-prêteurs ou trouve sa contrepartie dans l'exécution de tâches de gestion particulières que ce ou ces derniers l'ont contractuellement chargé d'assumer en leur nom, les dispositions précitées de l'article 261 C. 1°.a) du code général des impôts font obstacle à ce qu'une fraction quelconque des intérêts et commissions versés par l'emprunteur à l'établissement "chef de file" et restant acquis à celui-ci soit soumise à la taxe sur la valeur ajoutée ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société financière, industrielle, commerciale et immobilière (SOFICIM), établissement financier spécialisé dans le crédit immobilier, a accordé à certains de ses clients, au cours de la période du 1er janvier 1979 au 30 avril 1983, des prêts auxquels, sur sa demande, ont participé d'autres établissements de crédit, et, notamment, la Société Marseillaise de crédit, dont elle est la filiale ; qu'en tant que "chef de file" des opérations ainsi effectuées avec le concours d'un co-prêteur, la société financière, industrielle, commerciale et immobilière (SOFICIM), qui négociait seule avec ses clients le taux d'intérêt applicable à la totalité des prêts et assurait la gestion de l'ensemble de ces derniers, convenait avec le co-prêteur, pour la partie des prêts financés par lui, d'un taux d'intérêt légèrement inférieur à celui qui était supporté par les emprunteurs ; que la société financière, industrielle, commerciale et immobilière (SOFICIM) bénéficiait ainsi, comme établissement "chef de file", d'une rémunération déterminée par la différence entre ces deux taux ; qu'en jugeant que les sommes correspondant à cette différence avaient été à bon droit soumises à la taxe sur la valeur ajoutée, au motif qu'elles rémunéraient notamment des opérations de gestion de crédits effectuées pour le compte de tiers par la société financière, industrielle, commerciale et immobilière (SOFICIM), de sorte que celle-ci ne pouvait, à ce titre, bénéficier de l'exonération prévue par l'article 261 C. 1°.a) du code général des impôts, sans rechercher si la société avait perçu les sommes en question en remboursement de frais spécifiquement exposés par elle pour le compte de son co-prêteur ou en contrepartie d'une tâche de gestion particulière que celui-ci l'aurait contractuellement chargéed'assumer en son nom, la cour administrative d'appel de Lyon a commis une erreur de droit ; que, dès lors et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa requête, la société financière, industrielle, commerciale et immobilière (SOFICIM) est fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application de l'article 11 de la loi du 31 décembre 1987, de régler l'affaire au fond ;
Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que la rémunération ci-dessus décrite dont la société financière, industrielle, commerciale et immobilière (SOFICIM) a bénéficié en tant que "chef de file" lui ait été versée en remboursement de frais de gestion de crédits spécifiquement exposés par elle pour le compte de son co-prêteur ou en contrepartie de tâches de gestion particulières que celui-ci l'aurait contractuellement chargée d'assumer en son nom ; que, par suite, les sommes constitutives de cette rémunération étaient exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée en vertu des dispositions précitées de l'article 261-C.1.a) du code général des impôts ; que la société financière, industrielle, commerciale et immobilière (SOFICIM) est, dès lors, fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 26 juin 1989, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande en décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée auquel elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 1979 au 30 avril 1983 ;
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 19 novembre 1991 et le jugement du tribunal administratif de Marseille du 26 juin 1989 sont annulés.
Article 2 : La société SOFICIM est déchargée du complément de taxe sur la valeur ajoutée auquel elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 1979 au 30 avril 1983.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société financière, industrielle, commerciale et immobilière (SOFICIM) et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.