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26/05/1997 | FRANCE | N°164353

France | France, Conseil d'État, 8 ss, 26 mai 1997, 164353


Vu l'ordonnance en date du 10 janvier 1995, enregistrée le 11 janvier 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Paris transmet au Conseil d'Etat la requête de M. X... ;
Vu la requête, enregistrée le 27 décembre 1994 au greffe de la cour administrative d'appel de Paris, présentée par M. X..., demeurant ... Magloire à La Possession (97419) ; M. X... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 26 octobre 1994 par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion a rejeté sa de

mande dirigée contre une décision de l'inspecteur du travail du 30 ...

Vu l'ordonnance en date du 10 janvier 1995, enregistrée le 11 janvier 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Paris transmet au Conseil d'Etat la requête de M. X... ;
Vu la requête, enregistrée le 27 décembre 1994 au greffe de la cour administrative d'appel de Paris, présentée par M. X..., demeurant ... Magloire à La Possession (97419) ; M. X... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 26 octobre 1994 par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion a rejeté sa demande dirigée contre une décision de l'inspecteur du travail du 30 juin 1993 autorisant la société Super L. à le licencier pour faute, ensemble la décision confirmative du ministre du travail née du silence opposé durant plus de quatre mois à son recours hiérarchique ;
2°) d'annuler ces décisions ;
3°) de condamner la SARL Super L. à lui verser la somme de 10 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail et notamment son article L. 122-14-3 ;
Vu la loi n° 91-641 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mlle Mignon, Auditeur,
- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, avocat de la M. X...,
- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que lorsque le licenciement de l'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou avec l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail saisi et, le cas échéant, au ministre compétent de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la demande d'autorisation de licenciement de M. X..., délégué du personnel suppléant, formulée par la SARL Super L., qui exploite un supermarché à Le Port, était motivée par le fait que ce salarié avait été surpris sur le bord d'une route en train de manipuler une douzaine de bouteilles de Whisky destinées à la vente, alors qu'il était censé transporter vers une décharge municipale divers déchets et détritus ; que M. X... soutient que ces bouteilles avaient été placées à son insu par son employeur ;
Considérant que, pour rejeter par son jugement du 26 octobre 1994, la demande de M. X... dirigée contre la décision autorisant son licenciement et le rejet implicitede son recours hiérarchique, né du silence opposé durant plus de quatre mois à ce recours, le tribunal administratif s'est fondé sur le jugement du 30 juillet 1993 par lequel le tribunal de grande instance de Saint-Denis de la Réunion a condamné le salarié pour vol, alors que ce jugement était frappé d'appel ;
Considérant que l'autorité de la chose jugée en matière pénale ne s'attache qu'aux décisions des juridictions qui sont définitives et qui statuent sur le fond l'action publique ; que cette autorité ne peut donc être conférée à un jugement qui a été frappé d'appel et qui a d'ailleurs été annulé par un arrêt en date du 10 novembre 1994 de la Chambre correctionnelle de la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, lequel a relaxé au bénéfice du doute M. X... ; que, par suite, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion s'est fondé sur le moyen tiré de l'autorité du jugement du tribunal de grande instance de Saint-Denis de la Réunion pour rejeter la demande de M. X... ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige, par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X... devant le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion ;
Considérant qu'il n'est pas établi que la manipulation reprochée à M. X... ait été commise dans l'intention frauduleuse de soustraire des bouteilles à son employeur ; que si la société a invoqué à l'appui de sa demande les menaces proférées par M. X..., l'autorité administrative n'a pas retenu ce motif pour accorder l'autorisation de licenciement sollicitée par la SARL Super L. ;
Considérant qu'il suit de là que le jugement du 26 octobre 1994 du tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion ainsi que la décision du 30 juin 1993 de l'inspecteur du travail et la décision ministérielle implicite rejetant le recours hiérarchique de M. X... doivent être annulés ;
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que M. X..., qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser à la SARL Super L. la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de condamner la SARL Super L. à verser à M. X... la somme qu'il demande au titre de ces frais ;
Article 1er : Le jugement du 26 octobre 1994, la décision du 30 juin 1993 de l'inspecteur du travail et la décision ministérielle née du silence opposé durant plus de quatre mois au recours hiérarchique de M. X... sont annulés.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... et les conclusions de la SARL Super L. tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetés.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. X..., à la SARL Super L. et au ministre du travail et des affaires sociales.


Synthèse
Formation : 8 ss
Numéro d'arrêt : 164353
Date de la décision : 26/05/1997
Type d'affaire : Administrative

Analyses

66-07-01 TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES PROTEGES.


Références :

Loi 91-641 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation : CE, 26 mai. 1997, n° 164353
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mlle Mignon
Rapporteur public ?: M. Bachelier

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1997:164353.19970526
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