La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/04/1997 | FRANCE | N°176205

France | France, Conseil d'État, 1 / 4 ssr, 30 avril 1997, 176205


Vu la requête, enregistrée le 13 décembre 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par l'ASSOCIATION "L'ENFANT ET SON DROIT", dont le siège est ..., représentée par son secrétaire général ; l'ASSOCIATION "L'ENFANT ET SON DROIT" demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir l'article 2 du décret du 18 octobre 1995 portant création de l'observatoire de la parité entre les femmes et les hommes ;
.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Constitution ;
Vu la Déclaration universelle des droits de l'homme publiée le 9 février 194

9 ;
Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des lib...

Vu la requête, enregistrée le 13 décembre 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par l'ASSOCIATION "L'ENFANT ET SON DROIT", dont le siège est ..., représentée par son secrétaire général ; l'ASSOCIATION "L'ENFANT ET SON DROIT" demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir l'article 2 du décret du 18 octobre 1995 portant création de l'observatoire de la parité entre les femmes et les hommes ;
.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Constitution ;
Vu la Déclaration universelle des droits de l'homme publiée le 9 février 1949 ;
Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes ;
Vu la Convention relative aux droits de l'enfant ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Boissard, Auditeur,
- les observations de Me Boullez, avocat du "Mouvement de la condition masculine soutien de l'enfance",
- les conclusions de M. Bonichot, Commissaire du gouvernement ;

Sur les interventions des associations "Divorce et médiation Angers", "Condition paternelle", "L'alphabet du respect des enfants", "S.O.S. Sexisme Les Lunes Bleues", "S.O.S. Papa Midi-Pyrénées", "S.O.S. Papa Aquitaine", "Séparation, Egalité, Aide à l'enfant", "Divorce et médiation Lyon", "Pères et enfants séparés", "Allô Papa", "S.O.S. Papa", "L'enfant et son père", "S.O.S. Papa Pointe de Bretagne", "Ecologie de l'enfance", "Le Mouvement de la condition masculine soutien de l'enfance" :
Considérant que ces associations ont intérêt à l'annulation de l'article 2 du décret attaqué du 18 octobre 1995, portant création de l'observatoire de la parité entre les femmes et les hommes, qui détermine les missions imparties à cet organisme ; que leurs interventions au soutien de la requête de l'ASSOCIATION "L'ENFANT ET SON DROIT" dirigées contre ce décret sont, par suite, recevables ;
Sur les interventions de M. X..., de Mmes D..., Z..., B..., C..., Y..., A..., des associations "S.O.S. Enlèvements d'enfants ou déplacements illicites d'enfants par l'Allemagne", "Equality Nationwide for Unwed Fathers", "Groupe d'entraide aux pères et de soutien à l'enfant", "Entraide pères-enfants séparés" et "Mouvement de la condition paternelle pour une égalité parentale" :
Considérant que M. X..., en tant que père divorcé, et Mmes D..., Z..., B..., C..., Y..., A..., en tant qu'épouses ou mères de pères antérieurement divorcés, ne justifient pas d'un intérêt suffisant leur donnant qualité pour intervenir à l'appui de la requête de l'ASSOCIATION "L'ENFANT ET SON DROIT" dirigée contre l'article 2 du décret attaqué du 18 octobre 1995 ;
Considérant que l'association "S.O.S. Enlèvements d'enfants ou déplacements illicites d'enfants par l'Allemagne" ne justifie pas non plus, au regard de son objet, d'un intérêt suffisant lui donnant qualité pour intervenir au soutien de la requête de l'ASSOCIATION "L'ENFANT ET SON DROIT" ;
Considérant que les associations "Equality Nationwide for Unwed Fathers", "Groupe d'entraide aux pères et de soutien à l'enfant", Entraide pères-enfants séparés" et "Mouvement de la condition paternelle pour une égalité parentale", qui ont, respectivement, pour but de promouvoir l'égalité des droits entre les parents aux Etats-Unis, au Canada et en Suisse, ne justifient pas davantage d'un intérêt suffisant leur donnant qualité pour intervenir à l'appui de la requête qui est dirigée contre des dispositions relatives à un organisme dont la mission s'exerce en France ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les interventions de M. X..., de Mmes D..., Z..., B..., C..., Y..., A..., des associations "S.O.S. Enlèvements d'enfants ou déplacements illicites d'enfants par l'Allemagne", "Equality Nationwide for Unwed Fathers", "Groupe d'entraide aux pères et de soutien à l'enfant", "Entraide pères-enfants séparés" et "Mouvement de la condition paternelle pour une égalité parentale" ne sont pas recevables ;
Sur les conclusions de la requête de l'ASSOCIATION "L'ENFANT ET SON DROIT" :

Considérant que cette association soutient que les dispositions de l'article 2 du décret attaqué institueraient, au détriment des hommes, une discrimination contraire à des principes de valeur constitutionnelle ainsi qu'aux stipulations d'engagements internationaux souscrits par la France ;
Sur les moyens tirés de la violation du préambule de la Constitution et du principe général d'égalité entre les sexes :
Considérant que, ni les dispositions du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, auxquelles se réfère le préambule de la Constitution du 4 octobre 1958, en vertu desquelles des droits égaux doivent être garantis aux hommes et aux femmes dans tous les domaines, ni le principe général d'égalité des sexes, ne font obstacle à ce que le gouvernement confie à un "observatoire de la parité entre les hommes et les femmes", une mission consistant, dans ce domaine, à réunir des données et à procéder ou faire procéder à des analyses et recherches sur la situation des femmes ; qu'au surplus, la création d'un tel organisme, chargé uniquement d'une mission d'étude, de conseil et de proposition, ne fait naître à l'égard des personnes de l'un ou l'autre sexe aucun droit nouveau ; que, par suite, l'ASSOCIATION "L'ENFANT ET SON DROIT" n'est pas fondée à soutenir que l'article 2 du décret du 18 octobre 1995 contreviendrait aux dispositions du préambule de la Constitution, ainsi qu'au principe général d'égalité entre les sexes ;
Sur les moyens tirés de la méconnaissance d'engagements internationaux souscrits par la France :
Considérant que la seule publication faite au Journal Officiel du 9 février 1949 du texte de la Déclaration universelle des droits de l'homme ne permet pas de ranger cette dernière au nombre des accords ou traités qui, ayant été ratifiés et publiés, ont, aux termes de l'article 55 de la Constitution du 4 octobre 1958 "une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l'autre partie" ; qu'ainsi, l'ASSOCIATION "L'ENFANT ET SON DROIT" ne saurait utilement invoquer cette déclaration pour contester la légalité des dispositions attaquées ;
Considérant qu'aux termes de l'article 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée sans distinction aucune fondée notamment sur le sexe ( ...)" ; qu'au nombre des droits et libertés reconnus par la Convention figure le droit au respect de la vie privée et familiale ; que, toutefois, en bornant la mission de l'Observatoire de la parité entre les hommes et les femmes à la réunion de données et à la production d'analyses, études et recherches sur la situation des femmes, au niveau national et international, à l'exclusion de travaux portant sur la situation des hommes et, notamment, despères de famille divorcés, l'article 2 du décret du 18 octobre 1995 n'a porté aucune atteinte au droit au respect de la vie privée et familiale ;

Considérant que, contrairement à ce qui est soutenu, la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes n'exclut nullement l'adoption, par les Etats parties, de mesures destinées à instaurer une égalité de fait entre les hommes et les femmes ; qu'au surplus, l'article 23 de la convention stipule que celle-ci ne porte atteinte "aux dispositions plus propices à la réalisation de l'égalité entre l'homme et la femme" de la législation d'un Etat partie ; qu'ainsi, et en tout état de cause, le moyen invoqué ne peut qu'être écarté ;
Considérant que le décret attaqué ne méconnaît en rien les stipulations des articles 2, 4 et 18-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ; qu'ainsi, l'ASSOCIATION "L'ENFANT ET SON DROIT" ne peut, en tout état de cause, se prévaloir de cette convention pour contester la légalité de l'article 2 du décret du 18 octobre 1995 ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre du travail et des affaires sociales, que la requête de l'ASSOCIATION "L'ENFANT ET SON DROIT" doit être rejetée ;
Article 1er : Les interventions des associations "Divorce et médiation Angers", "Condition paternelle", "L'alphabet du respect des enfants", "S.O.S. Sexisme Les Lunes Bleues", "S.O.S. Papa Midi-Pyrénées", "S.O.S. Papa Aquitaine", "Séparation, Egalité, Aide à l'enfant", "Divorce et médiation Lyon", "Pères et enfants séparés", "Allô Papa", "S.O.S. Papa", "L'enfant et son père", "S.O.S. Papa Pointe de Bretagne", "Ecologie de l'enfance", le "Mouvement de la condition masculine soutien de l'enfance" sont admises.
Article 2 : Les interventions de M. X..., de Mmes D..., Z..., B..., C..., Y..., A..., des associations "S.O.S. Enlèvements d'enfants ou déplacements illicites d'enfants par l'Allemagne", "Equality Nationwide for Unwed Fathers", "Groupe d'entraide aux pères et de soutien à l'enfant", "Entraide pères-enfants séparés" et "Mouvement de la condition paternelle pour une égalité parentale" ne sont pas admises.
Article 3 : La requête de l'ASSOCIATION "L'ENFANT ET SON DROIT" est rejetée.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION "L'ENFANT ET SON DROIT", aux associations "Divorce et médiation Angers", "Condition paternelle", "L'alphabet du respect des enfants", "S.O.S. Sexisme Les Lunes Bleues", "S.O.S. Papa Midi-Pyrénées", "S.O.S. Papa Aquitaine", "Séparation, Egalité, Aide à l'enfant", "Divorce et médiation Lyon", "Pères et enfants séparés", "Allô Papa", "S.O.S. Papa", "L'enfant et son père", "S.O.S. Papa Pointe de Bretagne", "Ecologie de l'enfance", à M. X..., à Mmes D..., Z..., B..., C..., Y..., A..., aux associations "S.O.S. Enlèvements d'enfants ou déplacements illicites d'enfants par l'Allemagne", "Equality Nationwide for Unwed Fathers", "Groupe d'entraide aux pères et de soutien à l'enfant", "Entraide pères-enfants séparés", "Mouvement de la condition paternelle pour une égalité parentale", "Mouvement de la condition masculine soutien de l'enfance", au Premier ministre et au ministre du travail et des affaires sociales.


Synthèse
Formation : 1 / 4 ssr
Numéro d'arrêt : 176205
Date de la décision : 30/04/1997
Type d'affaire : Administrative

Analyses

35 FAMILLE.


Références :

Constitution du 27 octobre 1946 Préambule
Constitution du 04 octobre 1958 Préambule, art. 55
Convention du 26 janvier 1990 New-York droits de l'enfant art. 2, art. 4, art. 18-1
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales 1er protocole additionnel du 20 mars 1952 art. 14, art. 23
Déclaration universelle des droits de l'homme
Décret 95-1114 du 18 octobre 1995 art. 2 décision attaquée confirmation


Publications
Proposition de citation : CE, 30 avr. 1997, n° 176205
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Boissard
Rapporteur public ?: M. Bonichot

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1997:176205.19970430
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award