Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 9 mars 1992 et 9 juillet 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la CHAMBRE NATIONALE DES PROFESSIONS LIBERALES, dont le siège est ... ; la CHAMBRE NATIONALE DES PROFESSIONS LIBERALES demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision, en date du 2 mars 1992, par laquelle le président du Conseil supérieur de l'audiovisuel a rejeté son recours gracieux dirigé contre la décision du 26 novembre 1991, par laquelle le Conseil a défini les modalités de programmation du temps d'émission accordé aux organisations syndicales et professionnelles représentatives à l'échelle nationale pour l'année 1992 ;
2°) d'annuler ladite décision du 26 novembre 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 sur la motivation des actes administratifs ;
Vu la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 modifiée, relative à la liberté de communication ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Arnoult, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de la CHAMBRE NATIONALE DES PROFESSIONS LIBERALES,
- les conclusions de Mme Pécresse, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 55 alinéa 2 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée : "Un temps d'émission est accordé aux formations politiques représentées par un groupe dans l'une ou l'autre assemblée du Parlement ainsi qu'aux organisations syndicales et professionnelles représentatives à l'échelle nationale, selon les modalités définies par le Conseil supérieur de l'audiovisuel" ;
Sur la légalité externe :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le quorum était respecté lors de la délibération du 26 novembre 1991 par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel a défini les modalités de programmation du temps d'émission accordé aux organisations syndicales et professionnelles représentatives à l'échelle nationale pour l'année 1992 ; que la CHAMBRE NATIONALE DES PROFESSIONS LIBERALES n'apporte par ailleurs aucun élément probant au soutien de ses allégations relatives à l'irrégularité de cette délibération ;
Considérant que l'accès à l'antenne pour les organisations syndicales ou professionnelles relève du titre III de la loi du 30 septembre 1986 modifiée, relatif au "secteur public de la communication audiovisuelle" ; que, dès lors, le moyen tiré du défaut de motivation de la délibération litigieuse en méconnaissance des dispositions de l'article 32, inséré dans le titre II de la même loi et qui concerne exclusivement les refus d'autorisation d'utilisation d'usage de fréquences pour la diffusion de services de communication audiovisuelle, est inopérant ;
Considérant que la décision attaquée n'est pas au nombre de celles qui doivent être motivées en application de la loi du 11 juillet 1979 sur la motivation des actes administratifs ;
Considérant qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose au Conseil supérieur de l'audiovisuel de respecter une procédure de consultation ou de concertation préalablement à la mise en oeuvre de l'article 55 alinéa 2 susmentionné de la loi du 30 septembre 1986 modifiée ;
Sur la légalité interne :
Considérant qu'en vertu des dispositions législatives précitées, il appartenait auConseil supérieur de l'audiovisuel de déterminer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, et compte tenu, d'une part, de la représentativité des diverses organisations syndicales et professionnelles, d'autre part, de l'exigence d'une juste représentation à l'antenne des différents secteurs d'activité professionnelle et de l'expression pluraliste des courants d'opinion, quelles seraient les organisations représentatives à l'échelle nationale auxquelles un temps d'émission serait accordé et de fixer le temps d'antenne attribué à chacune d'elles ; que, dans ces conditions, dès lors que le secteur professionnel des professions libérales s'était vu attribuer un temps d'antenne, le Conseil n'était pas tenu d'attribuer un temps d'antenne à chacune des organisations professionnelles de ce secteur susceptibles de se prévaloir d'une représentativité à l'échelle nationale ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en refusant de répartir entre plusieurs organisations représentatives du secteur professionnel des professions libérales le temps d'émission annuel de 50 minutes réservé à ce secteur et en décidant d'en accorder l'usage à la seule Union nationale des professions libérales, dont la représentativité n'est pas contestée, le Conseil supérieur de l'audiovisuel ait méconnu les dispositions de l'article 1er de la loi du 30 septembre 1986 modifiée lui imposant de garantir le caractère pluraliste de l'expression des courants de pensée et d'opinions et se soit livré à une appréciation entachée d'erreur manifeste ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la CHAMBRE NATIONALE DES PROFESSIONS LIBERALES n'est pas fondée à soutenir que la décision du 26 novembre 1991, par laquelle le Conseil a défini les modalités de programmation du temps d'émission accordé aux organisations professionnelles représentatives du secteur des professions libérales à l'échelle nationale pour l'année 1992, est illégale ;
Article 1er : La requête de la CHAMBRE NATIONALE DES PROFESSIONS LIBERALES est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la CHAMBRE NATIONALE DES PROFESSIONS LIBERALES, au Conseil supérieur de l'audiovisuel et au Premier ministre.