Vu la requête, enregistrée le 1er juin 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Mohamed X..., détenu à la Maison centrale de Poissy, ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) l'annulation du jugement du 28 novembre 1991 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 juin 1988 du ministre de l'intérieur prononçant son expulsion du territoire français ;
2°) l'annulation pour excès de pouvoir de cet arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, modifiée ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Chemla, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Delarue, Commissaire du gouvernement ;
Sur la recevabilité de la requête :
Considérant que M. X... a présenté une demande d'aide judiciaire le 26 mars 1992, dans le délai du recours contentieux ouvert contre le jugement attaqué qui lui a été notifié le 12 mars précédent ; que le rejet de la demande d'aide judiciaire de M. X... lui a été notifié le 3 février 1993 ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que sa requête d'appel, enregistrée le 1er juin 1992, serait tardive, doit être écarté ;
Sur la légalité de l'arrêté attaqué :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article 23 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : " ... l'expulsion peut être prononcée par arrêté du ministre de l'intérieur si la présence sur le territoire français d'un étranger constitue une menace pour l'ordre public ..." ; qu'il ressort des pièces du dossier que, lorsqu'a été pris, le 29 juin 1988, l'arrêté d'expulsion attaqué, M. X... se trouvait en détention, purgeant une peine de dix-huit ans de réclusion criminelle prononcée à son encontre le 28 mai 1985 ; qu'eu égard au long délai devant s'écouler entre la date de l'arrêté litigieux et celle de la libération de M. X..., la présence de ce dernier sur le territoire français ne pouvait être regardée comme constituant, à la date du 29 juin 1988, une menace pour l'ordre public ; que M. X... est, par suite, fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 juin 1988 ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Versailles du 28 novembre 1991 et l'arrêté du 29 juin 1988 du ministre de l'intérieur prononçant l'expulsion de M. X..., sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Monsieur Mohamed X... et au ministre de l'intérieur.