Vu 1°), sous le n° 162 481, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 25 octobre 1994 et 21 novembre 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. Philippe Y..., demeurant ... ; M. Y... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice en date du 22 septembre 1994 en tant qu'il a déclaré qu'il n'y avait pas lieu à statuer sur une partie de ses conclusions et qu'il a rejeté comme tardives l'autre partie desdites conclusions ;
2°) de condamner M. X... au paiement de la somme de 8 000 F au titre des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu 2°), sous le n° 162 679, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés comme ci-dessus le 7 novembre 1994, présentés par M. Georges X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice en date du 22 septembre 1994 ;
2°) de rejeter la protestation de M. Y... ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la loi n° 96-300 du 10 avril 1996 ;
Vu le code électoral ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mlle Lagumina, Auditeur,
- les conclusions de M. Fratacci, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes de M. X... et de M. Y... sont dirigées contre le même jugement du tribunal administratif de Nice en date du 22 septembre 1994 qui a prononcé l'annulation de l'élection de M. X... en qualité de conseiller général du Var et a déclaré l'intéressé inéligible pendant un an ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par une seule décision ;
Sur les conclusions de la requête de M. X... :
Considérant, d'une part, que les prescriptions de l'article 25 de la loi du 15 janvier 1990, publiée au Journal officiel, ont fixé au 1er septembre 1990 la date d'application des dispositions de l'article L. 52-8 introduit dans le code électoral par cette loi ; que M. X... n'est, par suite, pas fondé à soutenir que ces dispositions de l'article L. 52-8 du code électoral, ainsi entrées en vigueur le même jour sur l'ensemble du territoire français en vertu des prescriptions de la loi, ne seraient pas applicables à l'élection cantonale qui a eu lieu à Toulon les 20 et 27 mars 1994 ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes des dispositions de l'article L. 52-8 du code électoral dans sa rédaction alors en vigueur : "les personnes morales de droit public, les personnes morales de droit privé dont la majorité du capital appartient à une ou plusieurs personnes morales de droit public ... ne peuvent effectuer, directement ou indirectement, aucun don en vue du financement de la campagne d'un candidat" ; que, pour rejeter le compte de campagne de M. X..., la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques s'est fondée sur la circonstance que ce compte comprenait, en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 52-8 du code électoral, des dons provenant de deux associations dénommées respectivement "Telo Martius Memento" et "L'état de Toulon" ; qu'il ressort de l'instruction que ces associations sont dirigées effectivement par des agents de la ville de Toulon liés à certains élus de la ville ou du département, même si ce n'est pas en cette qualité que ces responsabilités associatives se trouvent exercées par les intéressés ; qu'il n'est pas contesté que certains de ceux-ci exercent également des fonctions dans l'association organisant la campagne de M. X... ; que si elles ne reçoivent pas directement de subventions de la ville de Toulon, ces associations ont pour unique objet d'assurer la promotion publicitaire de la ville en passant des contrats avec diverses entreprises dont certaines exploitent des services municipaux ; que ces associations sont ainsi étroitement liées à la ville de Toulon tant par la personnalité de leurs dirigeants que par leurs modalités de financement ; que c'est, par suite, à bon droit que la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a regardé les dons effectués par ces associations comme indirectement effectués par une personne morale de droit public au sens des prescriptions précitées de l'article L. 52-8 du code électoral et a, pour ce motif, rejeté le compte de campagne de M. X... ;
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 118-3 du code électoral tel qu'il est issu de la loi n° 96-300 du 10 avril 1996 : "Saisi par la commission instituée par l'article L. 52-14, le juge de l'élection peut déclarer inéligible pendant un an le candidat dont le compte de campagne, le cas échéant après réformation, fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales" ; que le second alinéa dispose que : "Dans les autres cas, le juge de l'élection peut ne pas prononcer l'inéligibilité du candidat dont la bonne foi est établie, ou relever le candidat de cette inéligibilité" ; que ces dispositions sont d'application immédiate ; que, contrairement à ce que soutient M. Y..., elles sont applicables aux élections cantonales ; que, dans les circonstances de l'espèce, la bonne foi de M. X... n'est pas établie ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a prononcé l'annulation de son élection en qualité de conseiller général du Var et l'a déclaré inéligible pour une période d'une année à compter de la date à laquelle ce jugement sera devenu définitif ;
Sur les conclusions de la requête de M. Y... :
Considérant, d'une part, qu'en tant qu'elle poursuit l'annulation du jugement attaqué en tant que ce dernier a déclaré qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions présentées par M. Y... tendant à l'annulation de l'élection de M. X... et à la déclaration de l'inéligibilité de ce dernier pendant un an, la requête d'appel de M. Y... est irrecevable dès lors que, le tribunal ayant prononcé l'annulation et la déclaration demandées, le requérant est sans intérêt à faire appel sur ces points ;
Considérant, d'autre part, qu'en tant qu'elle poursuit l'annulation du même jugement en tant que ce dernier a rejeté comme irrecevables les conclusions présentées par M. Y... aux fins de suspension immédiate du mandat de M. X..., la requête de M. Y... est devenue sans objet ;
Sur l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que M. X..., qui n'est pas la partie perdante dans l'instance n° 162481 soit condamné à payer à M. Y... la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Considérant, d'autre part, qu'il n'y a pas lieu, dans cette même instance, de condamner M. Y... à payer à M. X... la somme demandée par celui-ci au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête susvisée de M. X... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la requête de M. Y... tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Nice en tant qu'il a prononcé un non-lieu sur une partie de sa demande sont rejetées.
Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. Y... tendant à la suspension du mandat de M. X....
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Philippe Y..., à M. Georges X... et au ministre de l'intérieur.