Vu, enregistré le 3 novembre 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, le jugement du 26 octobre 1995, par lequel le tribunal administratif de Nice, avant de statuer sur la demande de M. Pierre X... tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes auxquelles il a été assujetti au titre des années 1985, 1986 et 1987, a décidé, par application des dispositions de l'article 12 de la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 portant réforme du contentieux administratif, de transmettre le dossier de cette demande au Conseil d'Etat, en soumettant à son examen la question suivante :
L'annulation, quel qu'en soit le motif, par la Cour de cassation de la décision de l'autorité judiciaire autorisant des agents de l'administration fiscale à effectuer, au siège d'une personne morale, une visite domiciliaire et à saisir des documents se rapportant à des agissements mentionnés à l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales est-elle susceptible d'avoir des conséquences sur les redressements des revenus du dirigeant de ladite personne morale lorsque des documents faisant partie de la comptabilité de cette personne morale ont été saisis même si lesdits redressements procèdent d'une imposition d'office ?
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts, et notamment l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987, et notamment son article 12 ;
Vu les articles 57-11 à 57-13 ajoutés au décret n° 63-766 du 30 juillet 1963 modifié par le décret n° 88-905 du 2 septembre 1988 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Hourdin , Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Loloum, Commissaire du gouvernement ;
Ainsi qu'il a été dit dans l'avis n° 174245-174246 de ce jour, l'annulation d'une opération de visite et de saisie menée à l'encontre d'une personne morale en application des dispositions de l'article 94 de la loi du 29 décembre 1984, codifiées à l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, interdit à l'administration des impôts d'opposer à cette personne morale les informations qu'elle a recueillies à cette occasion, et affecte la régularité de la décision d'imposition de l'intéressée dans la mesure où celle-ci procède de l'exploitation des informations ainsi recueillies. En revanche, l'opération de visite et de saisie conduite à l'égard d'un contribuable est distincte de la procédure d'imposition suivie à l'encontre d'un autre contribuable, alors même que l'administration se fonderait sur des faits révélés par cette opération pour établir l'imposition de ce dernier. Il s'ensuit que l'annulation d'une opération de visite et de saisie menée à l'encontre d'une personne morale, si elle interdit désormais à l'administration d'opposer à celle-ci les informations recueillies à cette occasion, ne fait pas obstacle à ce que l'administration, dans une procédure d'imposition distincte concernant un autre contribuable, se fonde sur les faits révélés par l'opération annulée pour établir l'imposition de ce dernier.
Il en va toutefois autrement lorsqu'il ressort de la demande d'autorisation de visite et de saisie adressée au juge par l'administration que celle-ci cherche à obtenir, par la visite et la saisie, même si ces opérations ne visent pas des lieux dont le contribuable a personnellement la disposition, des éléments lui permettant d'apporter la preuve des agissements de l'intéressé pour éluder l'impôt.
Dans cette hypothèse, l'annulation de la visite ou de la saisie par l'autorité judiciaire fait obstacle à ce que des informations recueillies à l'occasion de la visite ou de la saisie soient opposées par l'administration à ce contribuable.
Tel est le cas, lorsque l'administration a demandé l'autorisation de visiter les locaux d'une société en vue de vérifier, notamment, les indices qu'elle détient sur les agissements d'un dirigeant de la société.
Le présent avis sera notifié au tribunal administratif de Nice, à M. Pierre X... et au ministre de l'économie et des finances.
Il sera publié au Journal officiel de la République française.