Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 3 janvier 1991 et 24 avril 1991 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Jeanine X..., demeurant Chemin du Marquis, Cédex 27 à Grandfontaine (25320) ; Mme X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 8 novembre 1990 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 14 novembre 1988 par laquelle le maire de Grandfontaine (Doubs) a refusé de continuer à lui verser, à compter du 1er janvier 1988, la majoration de 20 % de l'indemnité représentative de logement auparavant accordée aux directeurs d'école ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le traité de Rome, notammant son article 119 ;
Vu le préambule de la Constitution du 4 octobre 1958 ;
Vu le code du travail ;
Vu les lois du 30 octobre 1886 et du 19 juillet 1889 ;
Vu les décrets du 21 mars 1922 et du 2 mai 1983 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Austry, Auditeur,
- les observations de la SCP Masse-Dessen, Georges, Thouvenin, avocat de Mme Jeanine X... et de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la commune de Grandfontaine,
- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'en vertu de l'article 2 du décret du 21 mars 1922, lequel a été abrogé par le décret du 2 mai 1983, les directrices et directeurs d'école bénéficiaient d'une majoration de 20 % de l'indemnité représentative de logement versées aux instituteurs ; que ce même texte prévoyait en faveur des instituteurs mariés ou veufs avec enfants, des institutrices veuves avec enfants et des instituteurs ou institutrices divorcés avec enfants à charge, une majoration de 25 % de cette même indemnité, du bénéfice de laquelle étaient donc exclues les institutrices mariées avec enfants ; que le décret du 2 mai 1983 précité a supprimé la majoration de 20 % susmentionnée et étendu celle de 25 % à tous les instituteurs mariés avec ou sans enfants à charge et tous les instituteurs célibataires, veufs ou divorcés avec enfants à charge, quel que soit leur sexe ; que l'article 8 de ce même décret a prévu cependant que "les instituteurs en fonctions dans une commune conservent à titre personnel, pendant toute la durée d'affectation dans cette commune, les avantages qu'ils tenaient de la réglementation en vigueur antérieurement à l'application du présent décret lorsque l'application de ce dernier leur est moins favorable" ; que ces dispositions ne peuvent être légalement interprétées comme permettant de maintenir des situations de discrimination entre agents publics en raison de leur sexe ;
Considérant que pour supprimer, par sa décision en date du 8 novembre 1990, la majoration de 20 % de l'indemnité de logement dont bénéficiait Mme X..., directrice d'école à Grandfontaine (Doubs), le maire de cette commune s'est fondé sur le fait que bénéficiant, depuis l'intervention du décret susrappelé du 2 mai 1983, de la majoration de 25 % de ladite indemnité qui ne lui était pas allouée antérieurement en sa qualité d'institutrice mariée avec enfants, elle se trouvait dans une situation plus favorable qu'auparavant ; qu'un tel motif, qui a pour effet de placer les institutrices mariées avec enfant dans une situation moins favorable que celle prévue pour les instituteurs se trouvant dans la même situation, repose sur une interprétation erronée des dispositions précitées de l'article 8 du décret du 2 mai 1983 ; que Mme X... était, au contraire, en droit de continuer à bénéficier, dans les mêmes conditions que les instituteurs se trouvant dans la même situation, sur le fondement desdites dispositions, de la majoration de 20 % de l'indemnité représentative de logement qu'elle tenait de la réglementation antérieurement en vigueur ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X... est fondée, d'une part, à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande et, d'autre part, à demander l'annulation de la décision attaquée ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Besançon en date du 8 novembre 1990 et la décision du maire de Grandfontaine en date du 14 novembre 1988 sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Jeanine X..., à la commune de Grandfontaine et au ministre de l'éducation nationale.