Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 27 mai 1993, présentée par M. Nourddine X..., demeurant ... ; M. X... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 27 avril 1993 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de de Lyon a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 21 avril 1993, par lequel le préfet du Rhône a décidé sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, notamment par la loi du 2 août 1989, la loi du 10 janvier 1990 et la loi du 26 février 1992 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- les conclusions de M. Vigouroux, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui" ;
Considérant qu'il est constant que M. X..., ressortissant algérien, se trouvait dans l'un des cas où, en application de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, le préfet pouvait ordonner qu'il soit reconduit à la frontière ; qu'il ressort, toutefois, des pièces du dossier et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté par l'administration que M. X... est entré en France avec sa famille, à l'âge de cinq ans, en 1967 ; qu'il a résidé sur le territoire de 1967 à 1988 et, après un séjour en Algérie entre le mois de juillet 1988 et le mois de juin 1989, a rejoint en France sa famille ; que, dans les circonstances de l'espèce, eu égard notamment à la circonstance que ses parents et ses frères et soeurs résident régulièrement sur le territoire ou ont la nationalité française, l'arrêté en date du 21 avril 1993 par lequel le préfet du Rhône a ordonné la reconduite de M. X... à la frontière porte au droit de celui-ci au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels a été pris ledit arrêté ; qu'il a ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa requête et à demander l'annulation de l'arrêté du préfet du Rhône en date du 21 avril 1993 ordonnant sa reconduite à la frontière ;
Article 1er : Le jugement susvisé du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Lyon en date du 27 avril 1993 et l'arrêté du préfet du Rhône en date du 21 avril 1993 sontannulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Nourddine X..., au préfet du Rhône et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.