Vu 1°, sous le numéro 115 930, la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 6 avril 1990, présentée pour la société en nom collectif Jean Z... et compagnie, dont le siège est Place des Cévennes à Saint-Ambroix (30500) ; la société en nom collectif Jean Z... demande au Conseil d'Etat d'annuler la décision en date du 26 janvier 1990 par laquelle la commission bancaire a désigné M. A... en qualité d'administrateur provisoire de la banque Guiraud ;
Vu 2°, sous le numéro 115 931, la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 6 avril 1990, présentée pour la société en nom collectif Jean Z... et compagnie ; la société en nom collectif Jean Z... demande au Conseil d'Etat d'annuler la décision en date du 26 janvier 1990 par laquelle la commission bancaire a désigné M. Y... en remplacement de M. A... en qualité d'administrateur provisoire de la banque Guiraud ;
Vu 3°, sous le numéro 116 008, la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 9 avril 1990, présentée pour M. Antoine Z..., demeurant ... et Mlle Claire Z..., demeurant ..., tous deux associés et gérants de la société en nom collectif Jean Z... ; M. Antoine Z... et Mlle Claire Z... demandent au Conseil d'Etat d'annuler la décision en date du 26 janvier 1990 par laquelle la commission bancaire a désigné M. A... comme administrateur provisoire de la société en nom collectif Jean Z... ;
Vu 4°, sous le numéro 116 009, la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 9 avril 1990, présentée pour M. Antoine Z... et Mlle Claire Z... ; M. Antoine Z... et Mlle Claire Z... demandent au Conseil d'Etat d'annuler la décision en date du 26 janvier 1990 par laquelle la commission bancaire a désigné M. Y... en remplacement de M. A..., en qualité d'administrateur provisoire de la société en nom collectif Jean Z... ;
Vu 5°, sous le n° 119840, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 13 septembre 1990 et 14 janvier 1991 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Antoine Z... et Mlle Claire Z... ; ils demandent au Conseil d'Etat d'annuler la décision en date du 15 juin 1990 par laquelle la commission bancaire leur a infligé, à titre de sanction disciplinaire, la sanction de la démission d'office de leurs fonctions de gérants de la société en non collectif Jean Z... ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la loi du 24 janvier 1984 ;
Vu le décret du 24 juillet 1984 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Aberkane, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, avocat de la société en nom collectif Jean Z... et compagnie, de Me Blondel, avocat de M. X... et Mlle Claire Z... et de la SCP Célice, Blancpain, avocat du ministre de l'économie et autres,
- les conclusions de M. Sanson, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes n°s 115930, 115931, 116008, 116009 et 119840 sont relatives à la situation de la société de banque Jean Z... et à celle de ses gérants M. Antoine Z... et Mlle Claire Z... ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur les conclusions de la société en nom collectif Jean Z..., de M. Antoine Z... et de Mlle Claire Z... dirigées contre la décision du 26 janvier 1990 de la commission bancaire dotant la société Jean Z... d'un administrateur provisoire et désignant M. A... pour exercer ces fonctions :
Considérant qu'aux termes de l'article 44 de la loi du 24 janvier 1984 : " ... La commission bancaire peut désigner un administrateur provisoire auquel sont transférés les pouvoirs nécessaires à l'administration et à la direction de l'établissement de crédit et qui peut déclarer la cessation des paiements. Cette désignation est faite soit à la demande des dirigeants lorsqu'ils estiment ne plus être en mesure d'exercer normalement leurs fonctions, soit à l'initiative de la commission lorsque la gestion de l'établissement ne peut plus être assurée dans des conditions normales, ou lorsque a été prise l'une des sanctions visées à l'article 45, 4° et 5°" ; qu'aux termes de l'article 45 : " ... Si un établissement de crédit a enfreint une disposition législative ou réglementaire afférente à son activité, n'a pas déféré à une injonction ou n'a pas tenu compte d'une mise en garde, la commission bancaire peut prononcer l'une des sanctions disciplinaires suivantes : ... 4°) La suspension temporaire de l'une ou de plusieurs des personnes mentionnées à l'article 17 de la présente loi avec ou sans nomination d'administrateur provisoire ; 5°) La démission d'office de l'une ou de plusieurs de ces mêmes personnes avec ou sans nomination d'administrateur provisoire ..." ; qu'aux termes de l'article 48 de la même loi : "Lorsque la commission bancaire statue en application des articles 44, 45 et 46, elle est une juridiction administrative" ;
Considérant qu'il résulte des termes mêmes de la loi du 24 janvier 1984 que la nomination d'un administrateur provisoire en application de son article 44 a le caractère d'une décision juridictionnelle ; qu'en l'absence de toute disposition dans la loi lui permettant d'y déroger, la commission bancaire était tenue de respecter le principe du contradictoire avant de procéder à la désignation d'un administrateur provisoire, décision qui, même si elle présentait un caractère d'urgence, ne constituait pas une simple mesure conservatoire ; qu'il est constant que par la décision attaquée du 26 janvier 1990 la commission a désigné M. A... en qualité d'administrateur provisoire de la banque Z... sans qu'ait été respecté le caractère contradictoire de la procédure ; que les requérants sont donc fondés à demander l'annulation de cette décision ;
Sur les conclusions de la société en nom collectif Jean Z..., de M. Antoine Z... et de Mlle Claire Z... dirigées contre la décision du 26 février 1990 de la commission bancaire désignant M. Y... en remplacement de M. A... comme administrateur provisoire de la société en nom collectif Jean Z... :
Considérant que la décision du 26 février 1990 est entachée de la même irrégularité que la décision susmentionnée du 26 janvier 1990 ; qu'elle doit donc, pour les mêmes motifs, être annulée ;
Sur les conclusions de M. Antoine Z... et de Mlle Claire Z... dirigées contre la décision du 15 juin 1990 de la commission bancaire leur infligeant la sanction de la démission d'office de leurs fonctions de dirigeants responsables de la société en nom collectif Jean Z... :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 45 de la loi du 24 janvier 1984 que les sanctions qu'il édicte sont prononcées à l'encontre de l'établissement ; que, par suite, la sanction de la démission d'office de ses dirigeants, prévue par le 5° de cet article, ne peut concerner que les personnes qui ont la qualité de dirigeants dudit établissement à la date à laquelle est prononcée cette sanction ;
Considérant qu'il résulte des pièces du dossier soumis à la commission bancaire que M. et Mlle Z... avaient, à la suite de la cession de la totalité de leurs parts, démissionné de leurs fonctions de gérants de la société en nom collectif Jean Z... et n'avaient donc plus, à la date à laquelle a été prononcée la sanction attaquée, la qualité de dirigeants de cette société ; que les requérants sont par suite fondés à soutenir que cette sanction est intervenue en méconnaissance des dispositions de l'article 45 de la loi du 24 janvier 1984 et à en demander, pour ce motif, l'annulation ;
Article 1er : Les décisions susvisées de la commission bancaire en date des 26 janvier, 26 février et 15 juin 1990 sont annulées.
Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la commission bancaire.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société en nom collectif Jean Z..., à M. Antoine Z..., à Mlle Claire Z... et au ministre de l'économie.