Vu, 1°) sous le n° 116 722, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 14 mai 1990 et 13 décembre 1990 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Marie-Thérèse Y..., demeurant ... ; Mme Y... demande que le Conseil d'Etat :
- annule le jugement du 1er février 1990 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 2 septembre 1986 par laquelle le ministre des affaires sociales et de la solidarité lui a refusé l'autorisation de souscrire une déclaration de réintégration dans la nationalité française ;
- annule pour excès de pouvoir cette décision ;
Vu, 2°) sous le n° 120 902, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 5 novembre 1990 et 8 février 1991 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Marie-Thérèse Y..., demeurant ... ; Mme Y... demande que le Conseil d'Etat :
- annule le jugement du 26 juillet 1990 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 23 décembre 1988 par laquelle le ministre des affaires sociales et de la solidarité lui a refusé l'autorisation de souscrire une déclaration de réintégration dans la nationalité française ;
- annule pour excès de pouvoir cette décision ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code de la nationalité française ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Chemla, Auditeur,
- les observations de la S.C.P. Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de Mme Marie-Thérèse Y...,
- les conclusions de M. Abraham, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes de Mme Y... présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Considérant qu'aux termes de l'article 153 du code de la nationalité française applicable à la date des décisions attaquées, l'autorisation de souscrire une déclaration de réintégration dans la nationalité française "peut être refusée pour indignité ou défaut d'assimilation" ;
Considérant que pour refuser à la requérante l'autorisation de présenter une déclaration de réintégration dans la nationalité française le ministre des affaires sociales s'est fondé, d'une part, sur ce que l'intéressée n'établissait pas avoir possédé antérieurement la nationalité française, d'autre part, sur ce qu'elle s'était, en 1972, mariée sous le régime polygamique de droit commun dans son pays d'origine, son époux n'ayant pas souscrit d'engagement de monogamie ;
Considérant, d'une part, que le premier de ces deux motifs, s'il aurait pu justifier le cas échéant un refus d'enregistrer une déclaration de réintégration, sous le contrôle du juge judiciaire, n'est pas de nature à justifier légalement un refus d'autorisation de souscrire une telle déclaration qui ne peut être fondé, comme cela résulte des termes mêmes de l'article 153, que sur l'indignité ou le défaut d'assimilation du demandeur ;
Considérant, d'autre part, que l'absence d'option de M. X... pour un régime monogamique, option à laquelle au surplus l'intéressée n'avait pas personnellement accès, n'établit pas par elle-même le défaut d'assimilation de la requérante ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Paris et le tribunal administratif de Nantes ont rejeté ses demandes ;
Article 1er : Le jugement du 1er février 1990 du tribunal administratif de Paris, le jugement du 26 juillet 1990 du tribunal administratif de Nantes et les décisions des 2 septembre 1986 et 23 décembre 1988 du ministre des affaires sociales et de la solidarité sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Y... et au ministre d'Etat, ministre des affaires sociales de la santé et de la ville.