Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 27 novembre 1984 et 27 février 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE ANONYME STEFAL, dont le siège est ..., représentée par Maître Michel Herissay, syndic à son règlement judiciaire ; la SOCIETE ANONYME STEFAL demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 13 septembre 1984 du tribunal administratif de Versailles qui a rejeté sa demande tendant, premièrement, à ce que lui soit déclaré inopposable le protocole d'accord conclu, le 19 mai 1980, entre l'Office public interdépartemental d'HLM de Bagneux-Poligny-Nemours et les Etablissements Briant, mandataire commun du groupement d'entreprises auquel elle appartenait ; deuxièmement, à ce qu'il soit jugé que l'office public d'habitations à loyer modéré ne pouvait lui enjoindre, comme il l'a fait, de payer la pénalité de retard mise à sa charge par le protocole susmentionné ; troisièmement de condamner l'office public d'habitations à loyer modéré à lui payer la somme de 10 000 F à titre de dommages-intérêts ;
2°) de lui allouer l'entier bénéfice de ses conclusions de première instance ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Lévis, Maître des requêtes,
- les observations de Me Choucroy, avocat de la SOCIETE ANONYME STEFAL et de la S.C.P. Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de l'Office public interdépartemental d'HLM de Bagneux-Poligny-Nemours,
- les conclusions de M. Daël, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les Etablissements X... ont, agissant en tant que mandataire commun d'un groupement d'entreprises, au nombre desquelles figurait la SOCIETE ANONYME STEFAL, passé avec l'Office public interdépartemental d'HLM de Bagneux-Poligny-Nemours un marché pour la réalisation de l'opération dite "Solfège" à Nemours, opération consistant en la construction de 227 logements ; qu'à la suite de difficultés soulevées par l'exécution dudit marché, notamment des retards intervenus dans la réalisation des travaux, un protocole d'accord a été passé le 19 mai 1980 entre l'office public d'habitations à loyer modéré maître d'ouvrage et les Etablissements Briant agissant en tant que mandataire commun du groupement d'entreprises ; que ce protocole a porté sur le règlement des différents points en litige, notamment sur le montant global de la pénalité de retard et la répartition de celle-ci entre les entreprises concernées ; qu'à ce dernier titre, le protocole a prévu l'attribution à la SOCIETE ANONYME STEFAL d'une pénalité de retard d'un montant de 80 000 F ; que l'office public d'habitations à loyer modéré, par lettre en date du 29 juillet 1980, a invité la SOCIETE ANONYME STEFAL à régler sous huitaine la pénalité susmentionnée ; que, saisi par la SOCIETE ANONYME STEFAL, en application de l'article 51-1 du cahier des clauses administratives générales applicable au marché, d'une demande tendant au retrait de l'invitation à payer en date du 29 juillet 1980, l'office public d'habitations à loyer modéré a, le 26 novembre 1980, rejeté cette demande ; que la SOCIETE ANONYME STEFAL a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler les deux décisions susmentionnées de l'office public d'habitations à loyer modéré en invoquant la nullité, et à titre subsidiaire, l'irrégularité du protocole du 19 mai 1980 en tant que celui-ci mettait à sa charge la pénalité litigieuse, et de condamner l'office public d'habitations à loyer modéré à l'indemniser du préjudice qui aurait résulté pour elle de ces deux décisions ;
Considérant qu'aux termes de la lettre, en date du 20 octobre 1975, par laquelle les entreprises, membres du groupement, ont institué l'entreprise "Etablissements X..." comme leur mandataire commun, lesdites entreprises ont donné mandat à cette entreprise "de soumissionner en leur nom, de les représenter auprès du maître de l'ouvrage et de prendre toutes décisions relatives à l'application des clauses du marché suivant les conditions précitées, dans le dossier d'appel à la concurrence et aux prix remis par M. X... dans la soumission d'ensemble ; que, dans sa soumission en date du 20 octobre 1975, l'entreprise "Etablissements X..." s'est déclarée, dans les termes mêmes prévus par la lettre susmentionnée, "solidaire pendant la durée des travaux et jusqu'à réception définitive incluse de chacune des entreprises du groupement dans la responsabilité directe et personnelle de chacune d'elle vis-à-vis de l'office public d'habitations à loyer modéré pour la part des travaux qui lui incombe" ;
Considérant qu'il résulte des termes précités de la lettre du 20 octobre 1975 et de la soumission du même jour, que les Etablissements X... n'ont pas excédé le mandat qui leur avait été donné en acceptant, au nom des entreprises du groupement, de répartir entre elles le montant global des pénalités de retard, répartition qui était relative à l'application des clauses contractuelles définissant le régime des pénalités de retard et qui avait été établie, conformément aux stipulations du cahier des prescriptions spéciales, par les maîtres d' oeuvre, puis approuvée par le maître de l'ouvrage ; qu'il suit de là, qu'en approuvant cette répartition, le mandataire a engagé, sur ce point, les entreprises concernées par la répartition, vis-à-vis de l'office public d'habitat modéré maître d'ouvrage ; que ce dernier pouvait ainsi, à bon droit, se fonder sur le protocole du 19 mai 1980 pour prendre les deux décisions attaquées ;
Considérant que, si la société requérante soutient, en outre, que la répartition du montant global des pénalités de retard, telle qu'incluse dans le protocole du 19 mai 1980, serait contraire aux stipulations contractuelles relatives au régime des pénalités, l'argumentation développée au soutien de cette assertion n'est pas opposable à l'office public d'habitations à loyer modéré maître d'ouvrage et ne saurait être utilement invoquée à l'encontre des décisions attaquées ; qu'il appartenait à la société requérante, si elle s'y croyait fondée, d'attraire devant le juge judiciaire le mandataire commun pour faute commise dans l'exercice de son mandat ;
Considérant, qu'en l'absence de toute faute pouvant être relevée à l'encontre de l'office public d'habitations à loyer modéré, les conclusions de la société requérante tendant à la condamnation de ce dernier à lui verser une indemnité en réparation du préjudice qu'elle aurait subi, ne sauraient être accueillies ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions indemnitaires demandées au titre de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :
Considérant que la SOCIETE ANONYME STEFAL demande, en invoquant les dispositions de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la condamnation de l'Etat à l'indemniser du préjudice qui aurait résulté pour elle de la durée de la procédure devant le juge administratif ; qu'il appartient à la société de provoquer une décision administrative préalable en ce sens, et, en cas de refus ou d'une indemnisation jugée par elle insuffisante, de saisir le tribunal administratif compétent ; qu'il s'ensuit que les conclusions susanalysées présentées directement devant le Conseil d'Etat ne peuvent qu'être rejetées ;
Article 1er : La requête de la SOCIETE ANONYME STEFAL est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE ANONYME STEFAL, à l'Office public interdépartemental d'HLM de Bagneux-Poligny-Nemours et au ministre de l'équipement, des transports et du tourisme.