Vu, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 9 octobre 1989, l'ordonnance du 2 octobre 1989 par laquelle le président du tribunal administratif de Paris transmet, en application des dispositions de l'article 11 du décret du 2 septembre 1988, le dossier de la requête dont ce tribunal a été saisi par M. Christian X... ;
Vu la requête, enregistrée le 11 septembre 1989 au greffe du tribunal administratif de Paris, présentée par M. Christian X..., agissant tant en son nom personnel qu'au nom de la société "X..." en liquidation, demeurant La Pré-Madame à Montgermont (35760) et tendant à l'annulation d'une délibération de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, notifiée par une lettre du président de cette commission en date du 10 juillet 1989, refusant de lui communiquer certains documents concernant la société "X..." ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 ;
Vu la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. de Lesquen, Auditeur,
- les conclusions de M. Fratacci, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par la délibération attaquée, la Commission nationale de l'informatique et des libertés a refusé de communiquer à M. X..., agissant au nom de la société "X... S.A." en liquidation, d'une part, l'intégralité du compte-rendu d'une mission de contrôle effectuée par la commission auprès de la Société française d'assurance crédit en application des dispositions de l'article 21 de la loi du 6 janvier 1978 et, d'autre part, les copies, détenues par la commission à la suite de cette mission, de fiches de renseignement constituées par la Société française d'assurance crédit sur la société "X... S.A." ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 2 de la loi du 17 juillet 1978 : "Sous réserve des dispositions de l'article 6 les documents administratifs sont de plein droit communicables aux personnes qui en font la demande, qu'ils émanent des administrations de l'Etat, des collectivités territoriales, des établissements publics ou des organismes, fussent-ils de droit privé, chargés de la gestion d'un service public" ; que les fiches de renseignement susmentionnées ont été établies par la Société française d'assurance crédit pour l'exercice de ses activités ; qu'ainsi, bien que des copies de ces fiches soient détenues par la Commission nationale de l'informatique et des libertés, elles ne constituent pas des documents administratifs au sens des prescriptions législatives précitées ;
Considérant, en second lieu, que le compte-rendu de la mission de contrôle accomplie par la Commission nationale de l'informatique et des libertés auprès de la Société française d'asurance crédit présente le caractère d'un document administratif ; qu'aux termes de l'article 6 de la loi du 17 juillet 1978 : "Les administrations mentionnées à l'article 2 peuvent refuser de laisser consulter ou de communiquer un document administratif dont la consultation ou la communication porterait atteinte ... au secret en matière commerciale et industrielle ... Pour l'application des dispositions ci-dessus, les listes des documents administratifs qui ne peuvent être communiqués au public en raison de leur nature ou de leur objet sont fixées par arrêtés ministériels pris après avis de la commission d'accès aux documents administratifs" ; que l'entrée en vigueur de ces prescriptions législatives n'était pas subordonnée à la publication des arrêtés ministériels qu'elles prévoient ;
Considérant que, pour refuser de communiquer à M. X... le compte-rendu susmentionné, la Commission nationale de l'informatique et des libertés s'est fondée sur ce que la communication demandée porterait atteinte au secret en matière commerciale et industrielle dont pourrait se prévaloir la Société française d'assurance crédit ;
Considérant qu'il appartient au juge administratif de requérir des administrations compétentes la production de tous les documents nécessaires à la solution des litiges qui lui sont soumis, à la seule exception des documents couverts par un secret garanti par la loi ; que, si le caractère contradictoire de la procédure impose que chaque partie reçoive communication de toutes les pièces produites au cours de l'instance, cette exigence est nécessairement exclue s'agissant des documents dont le refus de communication constitue l'objet même du litige ;
Considérant que l'état de l'instruction ne permet pas de déterminer si le compte-rendu de la mission de contrôle effectuée par la Commission nationale de l'informatique et des libertés relève, entièrement ou pour partie, de l'exception relative au secret en matière commerciale et industrielle, prévue par les dispositions de l'article 6 de la loi du 17 juillet 1978 ; qu'ainsi, il y a lieu d'ordonner avant dire droit, tous droits et moyens des parties étant réservés, la production de ce document à la sous-section de la section du contentieux chargée de l'instruction de l'affaire, sans que cette pièce soit communiquée à M. X..., pour être ensuite statué ce qu'il appartiendra sur les conclusions de la requête ;
Article 1er : Est ordonnée avant dire droit, tous droits et moyens des parties étant réservés, la production par la Commission nationale de l'informatique et des libertés, à la septième sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat et selon les conditions précisées dans les motifs de la présente décision, de l'intégralité du compte-rendu de la mission de contrôle effectuée par la commission auprès de la Société française d'assurance crédit. Cette production devra intervenir dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision.
Article 2 : Les conclusions de la requête de M. Christian X... dirigées contre la délibération de la Commission nationale de l'informatique et des libertés en tant que cette délibération refuse la communication des copies de fiches de renseignement établies par la Société française d'assurance crédit sur la société "X... S.A." sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Christian X..., à la Commission nationale de l'informatique et des libertés et au Premier ministre.