Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 17 et 24 juillet 1992, présentés pour la S.A. ETABLISSEMENTS JACQUEMARD, dont le siège social est ..., agissant par ses représentants légaux en exercice, représentée par Me Hemery avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation ; la S.A. ETABLISSEMENTS JACQUEMARD demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 14 avril 1992 par lequel le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a annulé, à la demande de Mmes X... et Nadine Z..., les décisions du ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle en date du 20 octobre 1989 rejetant leurs recours hiérarchiques contre les décisions de l'inspecteur du travail de l'Aube autorisant leur licenciement ;
2°) de rejeter les demandes présentées par Mmes X... et Nadine Z... devant le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne ;
3°) de décider qu'il sera sursis à l'exécution de ce jugement ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail, notamment ses articles L.236-11 et L.436-1 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Roger-Lacan, Auditeur,
- les observations de Me Hemery, avocat de la S.A. ETABLISSEMENTS JACQUEMARD,
- les conclusions de M. Schwartz, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que, suivant les dispositions de l'article L.436-1 du code du travail, applicables aux membres des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail en vertu de l'article L.236-11 de ce code, il appartient à l'autorité administrative compétente, de vérifier que le motif invoqué par l'employeur à l'appui d'une demande d'autorisation de licenciement, constitue un motif économique d'ordre conjoncturel ou structurel pouvant servir de base au licenciement du salarié, et d'examiner les possibilités de reclassement qui lui sont offertes ; que, pour examiner ces possibilités de reclassement, le directeur départemental du travail et de l'emploi et, sur recours hiérarchique, le ministre chargé de l'emploi, doivent se fonder sur la situation de l'ensemble des sociétés appartenant à un même groupe ;
Considérant qu'il n'est pas contesté que la S.A. ETABLISSEMENTS JACQUEMARD fait partie du groupe dont dépendent également les sociétés Dheurle et Aube Chaussettes ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que, pour autoriser le licenciement de Mmes X... et Nadine Z..., le directeur départemental du travail et de l'emploi de l'Aube et le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle aient examiné les possibilités de reclassement offertes aux intéressées en tenant compte de la situation de autres sociétés du groupe ; que le motif invoqué pour justifier la demande de licenciement et tiré de ce que la réorganisation des services de fabrication et de finition des chaussettes avait le caractère d'un motif d'ordre structurel, n'était pas de nature à dispenser l'autorité administrative de cette obligation ; que, dès lors, la S.A. ETABLISSEMENTS JACQUEMARD n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a annulé les décisions du ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle en date du 20 octobre 1989 autorisant le licenciement de Mmes X... et Nadine Z... ;
Article 1er : La requête de la S.A. ETABLISSEMENTS JACQUEMARD est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la S.A. ETABLISSEMENTS JACQUEMARD, à Mme Ginette Z..., à Mme Y... Triche et au ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle.