La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/05/1992 | FRANCE | N°78832;83396

France | France, Conseil d'État, 10/ 6 ssr, 22 mai 1992, 78832 et 83396


Vu, 1°) sous le n° 78 832, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 26 mai 1986 et 29 septembre 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE ANONYME INDUSTRIE DE PEINTURES ASSOCIEES (I.P.A.), dont le siège social est ..., représentée par son président-directeur général en exercice ; la SOCIETE ANONYME I.P.A. demande au Conseil d'Etat :
- d'annuler le jugement du 26 mars 1986 par lequel le tribunal administratif de Besançon a annulé, à la demande de MM. Bernard A... et Francis B..., de Mmes Andrée C..., Dominique

E... et Martine Y..., du syndicat C.F.D.T. de la chimie, du syndicat ...

Vu, 1°) sous le n° 78 832, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 26 mai 1986 et 29 septembre 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE ANONYME INDUSTRIE DE PEINTURES ASSOCIEES (I.P.A.), dont le siège social est ..., représentée par son président-directeur général en exercice ; la SOCIETE ANONYME I.P.A. demande au Conseil d'Etat :
- d'annuler le jugement du 26 mars 1986 par lequel le tribunal administratif de Besançon a annulé, à la demande de MM. Bernard A... et Francis B..., de Mmes Andrée C..., Dominique E... et Martine Y..., du syndicat C.F.D.T. de la chimie, du syndicat C.G.T. de la société I.P.A., du comité central d'entreprise de la société I.P.A. et du comité d'établissement de la société I.P.A. de Valdoie, la décision du 28 août 1985, par laquelle le directeur départemental du travail et de l'emploi l'a autorisée à procéder au licenciement de 53 salariés pour motif économique ;
- de rejeter les demandes présentées par MM. Bernard A... et Francis B..., Mmes Andrée C..., Dominique E... et Martine Y..., le syndicat C.F.D.T. de la chimie, le syndicat C.G.T. de la société I.P.A., le comité central d'entreprise de la société I.P.A. et le comité d'établissement de la société I.P.A. de Valdoie devant le tribunal administratif de Besançon ;
Vu, 2°) sous le n° 83 396, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 28 novembre 1986 et 30 mars 1987 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE ANONYME INDUSTRIE DE PEINTURES ASSOCIEES (I.P.A.), dont le siège social est ..., représentée par son président-directeur général en exercice ; la SOCIETE ANONYME I.P.A. demande au Conseil d'Etat :
- d'annuler le jugement du 1er octobre 1986 par lequel le tribunal administratif de Besançon a annulé, à la demande de MM. Georges F..., Pierre X..., Mme Nicole Z..., le comité central d'entreprise de la société I.P.A. et le syndicat C.F.D.T de la chimie, la décision, en date du 23 décembre 1985, par laquelle le ministre du travail a autorisé le licenciement de 5 salariés ;
- de rejeter les demandes présentées par MM. Georges F..., Pierre X..., Mme Nicole Z..., le comité central d'entreprise de la société I.P.A. et le syndicat C.F.D.T de la chimie devant le tribunal administratif de Besançon ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Touvet, Auditeur,
- les observations de la S.C.P. Guiguet, Bachellier, Potier de la Varde, avocat de la SOCIETE ANONYE INDUSTRIE DE PEINTURES ASSOCIEES (I.P.A.) et de la S.C.P. Masse-Dessen, Georges, Thouvenin, avocat de M. Bernard A... et autres,
- les conclusions de Mme Denis-Linton, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes de la SOCIETE ANONYME INDUSTRIE DE PEINTURES ASSOCIEES (I.P.A.), enregistrées sous les n os 78 832 et 83 396, sont relatives à la même demande d'autorisation de licenciement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
En ce qui concerne la requête n° 78 832 :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 321-9 du code du travail : "Pour toutes les demandes de licenciement collectif portant sur les cas visés à l'article L. 321-3 du présent code, l'autorité administrative compétente dispose d'un délai de trente jours, à compter de la date d'envoi de la demande de licenciement, pour vérifier les conditions d'application de la procédure de concertation, la réalité des motifs invoqués pour justifier les licenciements ainsi que la portée des mesures de reclassement et d'indemnisation envisagées et pour faire connaître à l'employeur soit son accord, soit son refus d'autorisation" ; qu'en vertu des stipulations de l'accord sur la sécurité de l'emploi dans le secteur de la chimie en date du 3 mars 1970, étendues et rendues obligatoires par l'arrêté ministériel du 18 novembre 1971, le chef d'entreprise qui envisage de procéder à une réduction d'effectifs doit, lors de deux séances distinctes, informer puis consulter le comité d'établissement ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, si le comité d'établissement de la société I.P.A. a été informé le 7 mai 1985 des licenciements envisagés, il a été consulté sur ces licenciements lors d'une seconde séance qui s'est tenue le 13 juin 1985 ; qu'ainsi c'est à tort que le tribunal administratif de Besançon s'est fondé sur l'inexistence de la consultation du comité d'établissement pour annuler la décision du 28 août 1985 du directeur départemental du travail et de l'emploi du territoire de Belfort ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par les demandeurs devant le tribunal administratif de Besançon ;
Considérant qu'en vertu des stipulations de l'article 2 de l'accord du 3 mars 1970 susmentionné, il doit exister, dans tous les établissements des entreprises de plus de 500 salariés, un délai minimum de 6 mois "entre la date d'information du comité et celle de la décision définitive de licenciement collectif" ;
Considérant qu'il est constant que la société I.P.A. comptait plus de 500 salariés au moment où la procédure de licenciement a été initiée ; que la réunion du comité d'établissement du 30 janvier 1985 ne peut, eu égard au caractère vague des propos échangés, à l'absence de toute précision sur le licenciement envisagé et de diffusion du document écrit mentionné à l'article 3 de l'accord précité, être regardée comme constituant la date à laquelle l'information prévue par les stipulations susanalysées a été communiquée au comité d'établissement de Valdoie de la société I.P.A. ; qu'il ressort des pièces du dossier que c'est seulement lors de la réunion du 7 mai 1985 que cette information a été transmise dans les formes prescrites ; que, par suite, le directeur départemental du travail et de l'emploi du territoire de Belfort ne pouvait, à la date du 28 août 1985 à laquelle il a statué sur la demande d'autorisation de licenciement qui lui était présentée par la SOCIETE ANONYME I.P.A., que constater que le délai de 6 mois courant du 7 mai 1985 n'était pas expiré et qu'ainsi la procédure de concertation préalable organisée par l'accord du 3 mars 1970 n'était pas achevée ; qu'il ne pouvait, en conséquence, accorder légalement l'autorisation de licenciement sollicitée à l'égard de 53 salariés ;

Considérant, dès lors, que la SOCIETE ANONYME I.P.A. n'est pas fondée à se plaindre que, par le jugement attaqué, en date du 26 mars 1986, le tribunal administratif de Besançon a annulé la décision du 28 août 1985 par laquelle le directeur départemental du travail et de l'emploi du territoire de Belfort l'a autorisée à procéder au lienciement de 53 salariés pour motif économique ;
En ce qui concerne la requête n° 83 396 :
Sur la fin de non-recevoir opposée par la société I.P.A. à certains des demandeurs de première instance :
Considérant que les syndicats professionnels, les comités d'établissement et les comités centraux d'entreprise ont intérêt à contester les décisions par lesquelles l'autorité administrative autorise les employeurs à procéder au licenciement collectif de salariés pour motif économique ; que, dès lors, le comité central d'entreprise de la société I.P.A. et le syndicat CFDT de la chimie étaient recevables à contester la décision du 23 décembre 1985 par laquelle le ministre du travail, sur recours hiérarchique de l'employeur contre la décision partielle de refus du directeur départemental, a autorisé le licenciement pour motif économique de cinq salariés supplémentaires de la société I.P.A. ;
Sur la légalité de la décision attaquée :
Considérant que la décision susanalysée du ministre du travail du 23 décembre 1985 autorisant le licenciement supplémentaire de cinq salariés de la société I.P.A. est distincte de celle du directeur départemental du 28 août 1985 autorisant le licenciement de 53 autres salariés ; que le moyen tiré de ce que la procédure de concertation exigée par l'accord du 3 mars 1970 n'était pas expirée, n'était pas soulevé par les demandeurs et n'était pas d'ordre public ; que c'est par suite à tort que le tribunal administratif de Besançon a, par son second jugement, en date du 28 novembre 1986, annulé la décision du ministre du travail du 23 décembre 1985 par voie de conséquence de son précédent jugement du 26 mars 1986 et en raison de l'autorité de la chose jugée qui serait attachée aux motifs dudit jugement ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par les demandeurs devant le tribunal administratif de Besançon ;
Considérant que la décision du directeur départemental et de l'emploi du territoire de Belfort du 28 août 1985 en tant qu'elle refusait d'autoriser le licenciement de 11 salariés, avait créé des droits au profit de ces derniers ; que le contrôle du ministre, sur recours hiérarchique de l'employeur, ne pouvait dès lors porter que sur la légalité de cette décision de refus ; qu'il résulte des pièces du dossier et des propres dires du ministre que celui-ci a autorisé le licenciement de cinq salariés supplémentaires en se fondant sur un motif d'opportunité relatif aux possibilités offertes à ces salariés de retrouver un autre emploi ; qu'ainsi sa décision, réformant celle du directeur départemental du travail et de l'emploi, est intervenue irrégulièrement ;
Considérant, dès lors, que la SOCIETE ANONYME I.P.A. n'est pas non plus fondée à se plaindre que, par le jugement attaqué en date du 1er octobre 1986, le tribunal administratif de Besançon a annulé la décision en date du 23 décembre 1985 par laquelle le ministre du travail a autorisé le licenciement de cinq salariés supplémentaires ;
Article 1er : Les requêtes de la SOCIETE ANONYME INDUSTRIEDE PEINTURES ASSOCIEES (I.P.A.) sont rejetées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE ANONYME INDUSTRIE DE PEINTURES ASSOCIEES (I.P.A.), à MM. Bernard A..., Francis B..., Georges F..., Pierre X..., à Mmes Andrée D..., Dominique E..., Martine Y... et Nicole Z..., au syndicat CFDT de la chimie, au syndicat CGT de la société I.P.A., au comité central d'entreprise de la société I.P.A., au comité d'établissement de la société I.P.A. de Valdoie et au ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle.


Synthèse
Formation : 10/ 6 ssr
Numéro d'arrêt : 78832;83396
Date de la décision : 22/05/1992
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

66-07-02-03-03 TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES NON PROTEGES - LICENCIEMENT POUR MOTIF ECONOMIQUE - MODALITES DE DELIVRANCE DE L'AUTORISATION ADMINISTRATIVE - OBLIGATIONS INCOMBANT A L'ADMINISTRATION -Vérification du caractère régulier de la procédure de concertation - Accord étendu et rendu obligatoire prévoyant une procédure de concertation préalable à la décision de licenciement - Procédure non respectée - Autorisation illégale.

66-07-02-03-03 Par la décision contestée en date du 28 août 1985, le directeur départemental du travail a autorisé la société I.P.A. à procéder au licenciement pour motif économique de 53 salariés. En vertu des stipulations de l'article 2 de l'accord sur la sécurité de l'emploi dans le secteur de la chimie en date du 3 mars 1970, étendues et rendues obligatoires par l'arrêté ministériel du 18 novembre 1971 et applicables à la Société I.P.A., il doit exister, dans tous les établissements des entreprises de plus de 500 salariés, un délai minimum de six mois "entre la date d'information du comité et celle de la décision définitive de licenciement collectif". Il est constant que la société I.P.A. comptait plus de 500 salariés au moment où la procédure de licenciement a été initiée. La date du 30 janvier 1985, à laquelle a eu lieu la réunion du comité d'établissement ne peut, eu égard au caractère vague des propos échangés, à l'absence de toute précision sur le licenciement envisagé et de diffusion du document écrit mentionné à l'article 3 de l'accord précité, être regardée comme constituant la date à laquelle l'information prévue par les stipulations susanalysées a été communiquée au comité d'établissement de Valdoie de la société I.P.A.. Il ressort des pièces du dossier que c'est seulement lors de la réunion du 7 mai 1985 que cette information a été transmise dans les formes prescrites. Par suite, le directeur départemental du travail et de l'emploi du territoire de Belfort ne pouvait, à la date du 28 août 1985 à laquelle il a statué sur la demande d'autorisation de licenciement qui lui était présentée par la Société anonyme I.P.A., que constater que le délai de six mois courant du 7 mai 1985 n'était pas expiré et qu'ainsi la procédure de concertation préalable organisée par l'accord du 3 mars 1970 n'était pas achevée. Il ne pouvait, en conséquence, accorder légalement l'autorisation de licenciement sollicitée à l'égard de 53 salariés.


Références :

Code du travail L321-9


Publications
Proposition de citation : CE, 22 mai. 1992, n° 78832;83396
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Bauchet
Rapporteur ?: M. Touvet
Rapporteur public ?: Mme Denis-Linton

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1992:78832.19920522
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award