La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/02/1991 | FRANCE | N°78404

France | France, Conseil d'État, 5 / 3 ssr, 13 février 1991, 78404


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 12 mai 1986 et 16 juin 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. René X..., demeurant ... ; M. X... demande que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 18 mars 1986 par lequel le tribunal administratif de Paris a ordonné son expulsion des locaux dépendant du Muséum national d'histoire naturelle dans lesquels il exploitait une librairie, sous astreinte de 500 F par jour à compter de la date de notification du jugement et l'a condamné à payer à cet établissement une indemn

ité de 216 000 F ;
2° limite l'indemnité due, y compris les astrei...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 12 mai 1986 et 16 juin 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. René X..., demeurant ... ; M. X... demande que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 18 mars 1986 par lequel le tribunal administratif de Paris a ordonné son expulsion des locaux dépendant du Muséum national d'histoire naturelle dans lesquels il exploitait une librairie, sous astreinte de 500 F par jour à compter de la date de notification du jugement et l'a condamné à payer à cet établissement une indemnité de 216 000 F ;
2° limite l'indemnité due, y compris les astreintes, à 161 700 F à l'exclusion de tout intérêt ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le décret du 4 octobre 1985 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Maugüé, Auditeur,
- les observations de Me Boullez, avocat de M. René X... et de la S.C.P. de Chaisemartin, avocat du Muséum national d'histoire naturelle,
- les conclusions de M. Stirn, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'en vertu des articles 9 et 10 du décret du 12 décembre 1891, dont les dispositions sont demeurées applicables jusqu'à leur abrogation par le décret du 4 février 1985, les délibérations de l'assemblée des professeurs du Muséum national d'histoire naturelle ne sont exécutoires qu'après avoir reçu l'approbation du ministre ; qu'il n'est pas contesté que la décision prise par cette assemblée de passer avec M. X... la convention du 4 juillet 1978 permettant à ce dernier d'occuper des locaux situés à l'intérieur du Jardin des Plantes, lequel fait partie du domaine public de l'établissement, en vue d'exploiter un commerce de vente au public, de livres, illustrations, documents et objets concernant les sciences naturelles, n'a pas été soumise à l'approbation du ministre ; qu'il suit de là que cette délibération n'étant pas devenue exécutoire, la convention du 4 juillet 1978 n'a produit aucun effet et n'a pu conférer à M. X... de titre permettant de le regarder comme un occupant régulier du domaine public ; que, par suite, et alors même que la décision de l'assemblée des professeurs du 20 janvier 1983 prononçant la résiliation de la convention du 4 juillet 1978 ne serait pas elle-même devenue exécutoire faute d'avoir été elle aussi approuvée, le Muséum était fondé à demander au juge administratif l'expulsion de M. X..., occupant sans titre ; que, saisi de cette demande, le tribunal administratif était tenu d'y faire droit sans pouvoir accorder à l'occupant un délai supplémentaire pour quitter les lieux ; que, dès lors, M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal adminitratif a ordonné son expulsion sous astreinte de 500 F par jour à compter de la notification du jugement ;

Considérant que s'agissant de réparer le dommage causé par l'occupation sans titre du domaine public, les conclusions à fin d'indemnité présentées par le Muséum devant le tribunal administratif et tendant à réparer ce préjudice sont recevables alors même que l'établissement public aurait eu le pouvoir d'émettre un état exécutoire à l'effet de fixer le montant des sommes dues ;
Considérant que le Muséum a droit à une indemnité compensant les loyers dont il a été privé pendant la période comprise entre le 1er janvier 1984 et le 30 juin 1986, date à laquelle a pris fin l'occupation irrégulière, et alors même que cette date est postérieure à celle du jugement attaqué ; que le Muséum apporte la preuve que l'emplacement irrégulièrement occupé aurait pu être loué moyennant un loyer mensuel de 5 500 F pour la période du 1er janvier 1984 au 30 janvier 1985 et de 12 500 F pour la période du 1er février 1985 au 30 juin 1986 ; que l'indemnité totale due s'élève ainsi à 284 000 F ainsi que le soutient le Muséum par la voie du recours incident ; que, par suite, M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris l'a condamné à verser une indemnité au Muséum ; que ce dernier est, en revanche, fondé à demander que l'indemnité qui lui a été allouée par ce jugement soit portée de 216 000 F à 284 000 F ;
Sur les intérêts et les intérêts capitalisés :
Considérant que le Muséum national d'histoire naturelle a droit aux intérêts de cette indemnité, sans que le montant desdits intérêts puisse être affecté par les offres de paiement partiel formulées par M. X... et rejetées par le Muséum, dès lors que le débiteur n'avait pas consigné les sommes correspondant à son offre ;

Considérant que le Muséum a demandé, le 27 juin 1988, la capitalisation des intérêts afférents à l'indemnité que le tribunal administratif lui a accordée ; qu'à cette date, au cas où le jugement n'aurait pas été exécuté, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil il y a lieu de faire droit à cette demande ;
Article 1er : L'indemnité que l'article 2 du jugement du tribunal administratif de Paris du 18 mars 1986 a condamné M. X... à payer au Muséum national d'histoire naturelle est portée de 216 000F à 284 000 F.
Article 2 : Le jugement attaqué est réformé en tant qu'il est contraire à l'article 1er susmentionné.
Article 3 : Les intérêts afférents à l'indemnité de 284 000 F, calculés dans les conditions mentionnées à l'article 2 du jugement du tribunal administratif de Paris du 18 mars 1986 et échus le 27 juin 1988, seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 4 : La requête susvisée de M. X... est rejetée.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. X..., au Muséum national d'histoire naturelle et au ministre d'Etat, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.


Synthèse
Formation : 5 / 3 ssr
Numéro d'arrêt : 78404
Date de la décision : 13/02/1991
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir plein contentieux

Analyses

- RJ1 DOMAINE - DOMAINE PUBLIC - PROTECTION DU DOMAINE - PROTECTION CONTRE LES OCCUPATIONS IRREGULIERES - Contentieux - Conclusions tendant à l'indemnisation du dommage causé par l'occupation sans titre du domaine public - Recevabilité (1).

24-01-03-02, 54-07-01-03 S'agissant de réparer le dommage causé par l'occupation sans titre du domaine public, les conclusions à fin d'indemnité présentées par une personne morale de droit public devant le tribunal administratif et tendant à la réparation de ce préjudice sont recevables alors même que cette personne aurait eu le pouvoir d'émettre un état exécutoire à l'effet de fixer le montant des sommes dues (1).

- RJ1 PROCEDURE - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE - QUESTIONS GENERALES - CONCLUSIONS - Conclusions recevables - Conclusions tendant à l'indemnisation du dommage causé par l'occupation sans titre du domaine public (1).


Références :

Code civil 1154
Décret du 12 décembre 1891 art. 9, art. 10
Décret 85-176 du 04 février 1985

1.

Cf. 1984-03-30, SCI Marjenco, p. 142 ;

Comp. 1913-05-30, Préfet de l'Eure, p. 583


Publications
Proposition de citation : CE, 13 fév. 1991, n° 78404
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Bauchet
Rapporteur ?: Mme Maugüé
Rapporteur public ?: M. Stirn
Avocat(s) : Me Boullez, SCP de Chaisemartin, Avocat

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1991:78404.19910213
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award