Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 10 décembre 1985 et 10 avril 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. X..., demeurant à Muscourt (02160), et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 1er octobre 1985 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 19 septembre 1983 par lequel le commissaire de la République de l'Aisne lui a refusé l'autorisation d'exploiter 35 ha 69 a de terres situées à Cierges ;
2°) annule pour excès de pouvoir cette décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code rural notamment son article 188-5 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu la loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Plagnol, Auditeur,
- les observations de Me Roger, avocat de M. X... et de Me Capron, avocat de Mme Y...,
- les conclusions de M. Stirn, Commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que le moyen tiré de ce que les premiers juges auraient omis de répondre à certains des arguments soulevés par M. X... en première instance manque en fait ;
Sur la légalité de la décision de refus d'autorisation de cumul attaquée :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article 188-5 du code rural, la commission départementale sur l'avis de laquelle le préfet prend sa décision examine les demandes d'autorisation de cumul "en tenant compte tant en ce qui concerne le requérant que l'agriculteur dont l'exploitation est menacée de réduction ou de suppression, de la nature de leur activité professionnelle, de leur âge et de leur situation familiale, ainsi que de la superficie et de la situation des biens qui font l'objet de la demande" ;
Considérant que pour refuser à M. X... l'autorisation d'exploiter en plus des 105 hectares qu'il met déjà en valeur 35 hectares 69 ares de terres jusque là exploités par Mme Y..., le préfet commissaire de la République du département de l'Aisne a relevé que "les biens en cause sont situés à 30 kilomètres du siège de son exploitation" et a estimé que cette circonstance empêchait leur mise en valeur de "s'effectuer de façon rationnelle" ;
Considérant que si ces motifs sont au nombre de ceux que le commissaire de la République pouvait légalement retenir en application des dispositions précitées de l'article 188-5, il ressort des pièces du dossier que les parcelles faisant l'objet de la demande, compte tenu de la nature des cultures qui y sont faites, ont une superficie suffisante pour être utilement travaillées, alors même qu'il y a une distance de 30 km entre lesdites terres et le centre de l'exploitation du preneur ; qu'il suit de là que l'arrêté préfectoral repose sur une inexacte appréciation de la situation des biens qui font l'objet de la demande ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet, commissaire de la République du département de l'Aisne du 19 septembre 1983 ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 1er octobre 1985, ensemble l'arrêté du préfet, commissaire de la République du département de l'Aisne du 19 septembre 1983 sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Y... et au ministre de l'agriculture et de la forêt.