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20/01/1989 | FRANCE | N°67978;67979

France | France, Conseil d'État, 5 / 3 ssr, 20 janvier 1989, 67978 et 67979


Vu 1°) sous le n° 67 978, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 19 avril 1985 et 14 août 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour les HOPITAUX CIVILS DE THIERS, dont le siège est ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 8 janvier 1985 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand les a déclarés entièrement responsables des conséquences dommageables de l'incendie allumé le 17 juin 1979 par M. Yves X... dans l'atelier de coutellerie appartenant à Mme Y..., a rejeté l'appel en

cause qu'ils avaient formé à l'encontre de l'Etat et les a condamnés à...

Vu 1°) sous le n° 67 978, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 19 avril 1985 et 14 août 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour les HOPITAUX CIVILS DE THIERS, dont le siège est ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 8 janvier 1985 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand les a déclarés entièrement responsables des conséquences dommageables de l'incendie allumé le 17 juin 1979 par M. Yves X... dans l'atelier de coutellerie appartenant à Mme Y..., a rejeté l'appel en cause qu'ils avaient formé à l'encontre de l'Etat et les a condamnés à payer à Mme Y... la somme de 50 000 F avec intérêts au taux légal à compter du 5 mars 1981,
2°) rejette la demande présentée par Mme Y... devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand,
3°) et à titre subsidiaire, d'une part condamne l'Etat à supporter entièrement ou en tout état de cause la moitié au moins de la charge de la réparation accordée à Mme Y... et d'autre part, réduise de façon substantielle le montant de l'indemnité qu'il a été condamné à verser à celle-ci ;

Vu 2°) sous le n° 67 979, la requête et le mémoire complémentaire enregistrés le 19 avril 1985 et 14 août 1985 présentés pour les HOPITAUX CIVILS DE THIERS et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 8 janvier 1985 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand les a déclarés entièrement responsables des conséquences dommageables de l'incendie allumé le 17 juin 1979 par M. Yves X... dans l'atelier de coutellerie appartenant à Mme Y..., a rejeté l'appel en cause qu'ils avaient formé à l'encontre de l'Etat et les a condamnés à payer à la société d'assurance "Le groupe Drouot" la somme de 236 673 F avec intérêts au taux légal à compter du 5 mars 1981, les intérêts échus au 21 novembre 1984 devant être capitalisés eux-mêmes à cette date pour produire eux-mêmes intérêts,
2°) rejette la demande présentée par la société d'assurance "Le groupe Drouot" devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand,
3°) et à titre subsidiaire, d'une part condamne l'Etat à supporter entièrement ou pour la moitié au moins la charge de l'indemnité que les HOPITAUX CIVILS DE THIERS ont été condamnés à verser à la société d'assurance "Le groupe Drouot" et d'autre part réduise de façon substancielle le montant de cette indemnité ;

Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code de la santé publique et de la famille ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Bouchet, Conseiller d'Etat,
- les observations de la S.C.P. Boré, Xavier, avocat des HOPITAUX CIVILS DE THIERS et de la S.C.P. Rouvière, Lepitre, Boutet, avocat de Mme Y...,
- les conclusins de M. Stirn, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes des HOPITAUX CIVILS DE THIERS sont relatives à la réparation d'un même dommage ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, le 17 juin 1979, M. Yves X... qui se trouvait hospitalisé au centre psychothérapeutique du Fau sous le régime du placement d'office en vertu d'un arrêté du préfet du Puy-de-Dôme en date du 14 septembre 1978, a pu sortir librement de cet établissement hospitalier et a incendié un atelier de coutellerie appartenant à Mme Y... situé à proximité du village du Fau ;
Considérant que les tendances pyromaniaques de M. X... étaient connues de l'établissement hospitalier ; qu'il avait déjà volontairement allumé un incendie le 18 août 1978 alors qu'il se trouvait hospitalisé dans le même centre sous le régime du placement libre et que c'est à la suite de ces faits qu'une mesure de placement d'office avait été prise par le préfet ; que l'interdiction avait été faite à ce malade de sortir seul de l'enceinte de l'établissement hospitalier ; que le fait qu'il ait pu quitter seul l'établissement révèle une faute dans l'organisation et le fonctionnement du service public hospitalier de nature à engager la responsabilité des HOPITAUX CIVILS DE THIERS ; qu'il ne résulte pas des pièces du dossier que les HOPITAUX CIVILS DE THIERS aient fait valoir que l'état de l'intéressé était tel qu'il ne pouvait être placé que dans un établissement de sûreté, ni aient demandé son transfert dans un tel établissement ; qu'ainsi ils n'établissent pas que le préfet du Puy-de-Dôme aurait commis une faute lourde de nature à les exonérer de leur responsabilité, en plaçant ce malade dans un établissement inapproprié ; que, dès lors, les HOPITAUX CIVILS DE THIERS ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand les a reconnus entièrement responsables des conséquences dommageables de l'incendie provoqué par M.Issard ;

Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que les premiers juges aient fait une évaluation exagérée du préjudice subi ; qu'ainsi les conclusions des HOPITAUX CIVILS DE THIERS, qui ne sont d'ailleurs assorties d'aucune justification, tendant à ce que l'évaluation du préjudice subi par Mme Y... et par la société d'assurances "le Groupe Drouot" soit substantiellement diminuée, doivent être écartées ;
Sur les intérêts des intérêts :
Considérant que Mme Y... et la société d'assurances "le Groupe Drouot" ont demandé la capitalisation des intérêts le 25 octobre 1985 ; que le jugement attaqué ayant ordonné la capitalisation des intérêts échus le 21 novembre 1984, il ne s'était pas écoulé une année depuis cette date ; que, par suite, il n'y a pas lieu de faire droit à cette demande ;
Article 1er : Les requêtes des HOPITAUX CIVILS DE THIERS, ensemble les demandes de capitalisation des intérêts présentées par Mme Y... et la société d'assurances "le Groupe Drouot", sont rejetés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée aux HOPITAUX CIVILS DE THIERS, à Mme Y..., à la société d'assurances "le Groupe Drouot" et au ministre de la solidarité, de la santé et de la protection sociale.


Synthèse
Formation : 5 / 3 ssr
Numéro d'arrêt : 67978;67979
Date de la décision : 20/01/1989
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

- RJ1 POLICE ADMINISTRATIVE - POLICES SPECIALES - POLICE DES ALIENES - PLACEMENT D'OFFICE - Placement d'office d'un malade aux tendances pyromaniaques connues dans un établissement qui n'était pas de sûreté - Absence de faute lourde susceptible d'atténuer la responsabilité de l'établissement à raison d'un incendie allumé par ce malade (1).

60-02-01-01-01-01-06 Le 17 juin 1979, M. I. qui se trouvait hospitalisé au centre psychothérapeutique du Fau sous le régime du placement d'office en vertu d'un arrêté du préfet du Puy-de-Dôme en date du 14 septembre 1978, a pu sortir librement de cet établissement hospitalier et a incendié un atelier de coutellerie appartenant à Mme P., situé à proximité du village du Fau. Les tendances pyromaniaques de M. I. étaient connues de l'établissement hospitalier. Il avait déjà volontairement allumé un incendie le 18 août 1978 alors qu'il se trouvait hospitalisé dans le même centre sous le régime du placement libre et c'est à la suite de ces faits qu'une mesure de placement d'office avait été prise par le préfet. L'interdiction avait été faite à ce malade de sortir seul de l'enceinte de l'établissement hospitalier. Le fait qu'il ait pu quitter seul l'établissement révèle une faute dans l'organisation et le fonctionnement du service public hospitalier de nature à engager la responsabilité des hôpitaux civils de Thiers.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITE EN RAISON DES DIFFERENTES ACTIVITES DES SERVICES PUBLICS - SERVICE PUBLIC DE SANTE - ETABLISSEMENTS PUBLICS D'HOSPITALISATION - RESPONSABILITE POUR FAUTE : ORGANISATION ET FONCTIONNEMENT DU SERVICE HOSPITALIER - EXISTENCE D'UNE FAUTE - DEFAUTS DE SURVEILLANCE - Incendie allumé par un malade hospitalisé sous le régime du placement libre - Malade connu de l'établissement.

49-05-01-01, 60-02-03-05, 60-04-02-02 Le 17 juin 1979, M. I. qui se trouvait hospitalisé au centre psychothérapeutique du Fau sous le régime du placement d'office en vertu d'un arrêté du préfet du Puy-de-Dôme en date du 14 septembre 1978, a pu sortir librement de cet établissement hospitalier et a incendié un atelier de coutellerie appartenant à Mme P., situé à proximité du village du Fau. Il ne résulte pas des pièces du dossier que les hôpitaux civils de Thiers aient fait valoir que l'état de l'intéressé était tel qu'il ne pouvait être placé que dans un établissement de sûreté, ni aient demandé son transfert dans un tel établissement. Ainsi ils n'établissent pas que le préfet du Puy-de-Dôme aurait commis une faute lourde de nature à les exonérer de leur responsabilité, en plaçant ce malade dans un établissement inapproprié.

- RJ1 RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITE EN RAISON DES DIFFERENTES ACTIVITES DES SERVICES PUBLICS - SERVICES DE POLICE - POLICE DES ALIENES - Placement d'office - Malade aux tendances pyromaniaques connues dans un établissement qui n'était pas de sûreté - Absence de faute lourde susceptible d'atténuer la responsabilité de l'établissement à raison d'un incendie allumé par ce malade (1).

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - CAUSES EXONERATOIRES DE RESPONSABILITE - FAIT DU TIERS - Absence - Incendie allumé par un malade hospitalisé sous le régime du placement libre - Décision du préfet de le placer dans un établissement qui n'était pas de sûreté non constitutive d'une faute lourde - Responsabilité totale de l'établissement.


Références :

1. Comp. 1976-12-31, Hôpital psychiatrique de Saint-Egrève, p. 584


Publications
Proposition de citation : CE, 20 jan. 1989, n° 67978;67979
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Coudurier
Rapporteur ?: M. Bouchet
Rapporteur public ?: M. Stirn

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1989:67978.19890120
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