Vu le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE LA PRIVATISATION enregistré le 27 mars 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du tribunal administratif d' Orléans en date du 7 janvier 1986 en tant qu'il a condamné l'Etat à verser à M. X... la somme de 5 000 F à titre de dommages-intérêts ;
2°) rejette la demande à fin d'indemnité présentée par M. X... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Bas, Maître des requêtes,
- les observations de Me Boullez, avocat de M. René X...,
- les conclusions de M. Martin-Laprade, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 101 bis du code général des impôts : "Les contribuables placés sous le régime de l'évaluation administrative doivent tenir ... un document donnant le détail journalier de leurs recettes professionnelles" ;
Considérant que l'instruction 5 P 5-72 de la direction générale des impôts publiée au bulletin officiel de cette direction générale du 7 février 1972 précise, en ce qui concerne les obligations comptables des médecins conventionnés relevant du régime de l'évaluation administrative, qu'il "a paru possible d'admettre que le document journalier des recettes professionnelles serait constitué, pour la partie de l'activité des médecins couverte par la convention, par les relevés individuels de praticiens établis par les organismes de sécurité sociale en application de l'article 1994 du code général des impôts", sous réserve que ces médecins "respectent scrupuleusement l'obligation d'inscrire sur les feuilles de maladie les honoraires qu'ils ont effectivement reçus de leurs clients" ; que cette instruction précise que les médecins "doivent tenir eux-mêmes le document d'enregistrement des recettes journalières" pour la partie de leurs activités qui n'est pas couverte par la convention ; que la même instruction a prévu que ces modalités seraient applicables aux médecins conventionnés placés sous le régime de la déclaration contrôlée, en ce qui concerne la partie des recettes correspondant aux honoraires soumis à la convention, pour la tenue du livre-journal prévue à l'article 99 ;
Considérant que M. X..., médecin conventionné, a fait l'objet de redressements, du chef de ses bénéfices non commerciaux, en matière d'impôt sur le revenu au titre des années 1971, 1972 et 1973 du fait de discordances entre le montant des honoraires qu'il avait déclarés en se fiant aux relevés des organismes de sécurité sociale et les sommes figurant sur ses relevés bancaires ; que ces impositions supplémentaies ont été contestées devant le tribunal administratif d'Orléans qui, par un jugement du 6 novembre 1981, a rejeté les prétentions du requérant en tant qu'elles tendaient à faire prévaloir les dispositions précitées de l'instruction administrative du 7 février 1972 sur celles de l'article 93 en ce qui concerne le mode de détermination des recettes imposables ; que l'appel formé contre ledit jugement a été rejeté par une décision du Conseil d'Etat du 22 octobre 1984 ;
Considérant, d'une part, qu'aucune faute lourde, seule de nature à engager la responsabilité de l'Etat du fait de l'intervention des services d'assiette, ne peut être retenue en l'espèce en raison de l'action de l'administration pour l'établissement des contributions qu'avait contestées M. X... ;
Considérant, d'autre part, que, si l'instruction administrative précitée, en présentant l'allègement des obligations comptables des praticiens conventionnés comme permettant à ceux-ci de ne plus tenir eux-mêmes pour une partie de leur activité les documents prévus par la loi, contient des renseignements erronés, dans la mesure où elle ne mentionne pas que les règles posées par l'article 93 du code général des impôts en ce qui concerne le rattachement des recettes imposables à l'année d'imposition, restent applicables, le préjudice dont le M. X... demande réparation trouve sa cause, non dans la faute ainsi commise, qui l'a conduit à ne pas tenir complètement son livre-journal, mais dans le fait qu'il s'est abstenu de produire en temps utile les déclarations de revenus auxquelles il était tenu, se plaçant ainsi en situation de taxation d'office, ce qui l'obligeait, dans la procédure contentieuse, à supporter la preuve du caractère exagéré des bases retenues par l'administration ; que, dès lors, en l'absence de lien direct entre le préjudice qu'il allègue et la faute de l'administration, il n'est pas en droit d'obtenir réparation ; que, dès lors, le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DU BUDGET est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a condamné l'Etat à lui verser une indemnité ; que, par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter le recours incident de M. X... tendant à l'augmentation du montant de l'indemnité ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Orléans du 7 janvier 1986 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X... au tribunal administratif d'Orléans est rejetée.
Article 3 : Le recours incident présenté par M. X... est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. X... et au ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget.