Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 15 juillet 1986 et 17 novembre 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Laurence X..., née Y..., demeurant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1) annule le jugement du 12 décembre 1985 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à ce que l'assistance publique à Paris soit condamnée à réparer les préjudices qu'elle a subis du fait de l'erreur médicale commise au cours de l'intervention chirurgicale pratiquée sur elle le 8 janvier 1982,
°2) condamne l'assistance publique à Paris de lui payer pour ces préjudices les sommes suivantes : 25 000 F au titre de préjudice pour l'incapacité temporaire partielle, 100 000 F au titre de l'incapacité permanente partielle, 50 000 F au titre du pretium doloris, 100 000 F au titre du préjudice sexuel, 30 000 F au titre du préjudice esthétique,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Jean-Pierre Aubert, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Luc-Thaler, avocat de Mme X... et de Me Foussard, avocat de l'administration générale de l'assistance publique à Paris,
- les conclusions de M. Fornacciari, Commissaire du gouvernement ;
Sur le principe de la responsabilité :
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que la perforation de l'utérus dont Mme X... a été victime le 8 janvier 1982, à l'occasion d'une interruption volontaire de grossesse, par aspiration, pratiquée à l'hôpital de l'Hôtel-Dieu à Paris, a eu pour cause une erreur technique commise par le gynécologue de l'établissement qui, lors de la manoeuvre instrumentale a insuffisamment redressé le col de l'utérus ; qu'eu égard à la nature de cette intervention, pratiquée sans l'emploi d'instruments traumatisants et, en l'absence de circonstances particulières ayant créé un risque opératoire inhabituel, la maladresse commise par le praticien hospitalier est constitutive d'une faute lourde qui engage la responsabilité de l'administration hospitalière ; que Mme X... est, dès lors fondée, à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Sur le montant du préjudice :
Considérant que si la requérante soutient que les indemnités qu'elle a perçues pendant la période d'incapacité temporaire totale consécutive à l'accident dont elle a été victime ne couvraient que partiellement les pertes de salaires qu'elle subissait, elle n'apporte aucune preuve à l'appui de ses allégations ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'incapacité permanente de 10 % dont elle reste atteinte ait eu pour effet d'entraîner une perte de revenus ;
Considérant quil sera fait une juste appréciation du préjudice résultant des troubles de toute nature que Mme X... a subis dans ses conditions d'existence, de souffrances qu'elle a endurées et du préjudice esthétique qu'elle subit, en lui allouant une indemnité de 60 000 F ;
Sur les conclusions de l'appel incident de l'administration de l'assistance publique :
Considérant que l'article 2 du jugement attaqué a mis les frais d'expertise à la charge de l'administration générale de l'assistance publique a Paris ; que la présente décision déclarant cet établissement responsable de l'accident dont Mme X... a été victime, l'administration générale de l'assistance publique n'est pas fondée à demander l'annulation de cet article du jugement ;
Article ler : L'article 1er du jugement du tribunal administratif de Paris du 12 décembre 1985 est annulé.
Article 2 : L'administration générale de l'assistance publique à Paris est condamnée à payer à Mme X... une indemnité de 60 000 F.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X... ensemble les conclusions de l'appel incident de l'administration générale de l'assistance publique à Paris sont rejetés.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme X..., à l'administration générale de l'assistance publique à Paris, à la caisse primaire d'assurance-maladie du Val-de-Marne et au ministre délégué auprès du ministre des affaires sociales et de l'emploi, chargé de la santé et de la famille.