Vu la requête enregistrée le 7 août 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Roger X..., maître-assistant à l'Université Pierre et Marie Curie, demeurant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule les articles 2, 3, 7, 13, 15, 24, 30, 36, 37, 39, 40 et 61 du décret °n 84-431 du 6 juin 1984 relatif au statut des enseignants-chercheurs de l'enseignement supérieur ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi °n 68-978 du 12 novembre 1968 ;
Vu la loi °n 83-634 du 13 juillet 1983 ;
Vu la loi °n 84-16 du 11 janvier 1984 ;
Vu la loi °n 84-52 du 26 janvier 1984 ;
Vu le décret °n 52-1379 du 22 décembre 1952 ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Jean-François Théry, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Laroque, Commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions dirigées contre l'article 2 du décret attaqué :
Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret attaqué : "les enseignants-chercheurs titulaires sont répartis entre le corps des maîtres de conférences et le corps des professeurs d'université, sous réserve des dispositions prévues aux articles 59 et 61 ci-après" ; que l'article 59 dispose notamment que : "les maîtres-assistants qui n'ont pas sollicité leur intégration dans le corps des maîtres de conférences sont maintenus dans le corps des maîtres-assistants, qui est mis en extinction. Ils demeurent régis par les dispositions statutaires en vigueur à la date de publication du présent décret" ; qu'ainsi sont notamment maintenus en vigueur les dispositions des décrets susvisés du 26 septembre 1960 et du 2 juin 1969 qui, lors de la constitution initiale des corps de maîtres-assistants, ont placé dans un corps d'extinction les chefs de travaux titulaires non reclassés en qualité de maîtres-assistants ; que d'autre part les maîtres de conférences-adjoints régis par le décret °n 52-1379 du 22 décembre 1952 ne constituent pas un corps de fonctionnaires distinct de celui des chefs de travaux ; qu'enfin l'article 61 du décret attaqué dispose que : "par dérogation aux dispositions de l'article 2 ci-dessus, les assistants qui ont la qualité de titulaires restent régis par les dispositions statutaires en vigueur" ; que, dès lors, M. X... n'est pas fondé à soutenir que l'article 2 précité aurait pour effet de supprimer implicitement les corps de chefs de travaux, maîtres de conférences adjoints, maîtres-assistants et assistants ; que les articles 67 et 68 ont pour seul objet de modifier le statut des assistants sur certains points relatifs à leur recrutement et ne sont, dès lors, pas en contradiction avec les dispositions susrappelées ;
Sur les conclusions dirigées contre l'article 3 :
Considérant qu'aux termes de l'article 33 de la loi °n 68-978 du 12 novembre 1968, les professeurs, maîtres de conférenceset maîtres-assistants "ont compétence exclusive pour désigner les jurys et décerner les titres de diplômes" ; que, cependant, le même article 33 dispose par ailleurs que : "seuls peuvent participer aux jurys et être présents aux délibérations, des enseignants ou, dans les conditions réglementaires, des personnalités qualifiées extérieures à l'établissement" ; que l'avant-dernier alinéa de l'article 17 de la loi °n 84-52 du 26 janvier 1984 dispose que : "seuls peuvent participer aux jurys et être présents aux délibérations des enseignants-chercheurs, des enseignants et des chercheurs ou, dans les conditions et selon les modalités prévues par voie réglementaire, des personnalités qualifiées ..." ; qu'en disposant dans son article 3 que les enseignants-chercheurs : "participent aux jurys d'examen et de concours" et en rendant cet article 3 applicable aux assistants, dont la qualité d'enseignant n'est pas contestée, le décret attaqué n'a pas méconnu les dispositions législatives susrappelées ;
Sur la légalité des dérogations apportées par le décret attaqué au statut général des fonctionnaires :
Considérant qu'aux termes de l'article 10 de la loi °n 84-16 du 11 janvier 1984 : "en ce qui concerne les membres des corps recrutés par la voie de l'Ecole Nationale d'Administration, des corps enseignants et des personnels de la recherche, des corps reconnus comme ayant un caractère technique, les statuts particuliers ... peuvent déroger ... à certaines des dispositions du statut général qui ne correspondraient pas aux besoins propres de ces corps ou aux missions que leurs membres sont destinés à assurer" ;
Considérant que si l'article 9 de la loi °n 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires dispose que : "les fonctionnaires participent par l'intermédiaire de leurs délégués siégeant dans des organismes consultatifs ... à l'examen des questions individuelles relatives à leur carrière", aucune disposition législative ni aucun principe général n'impose que ces organismes consultatifs prennent la forme de commissions paritaires ; que l'article 56 de la loi du 26 janvier 1984 sur l'enseignement supérieur dispose que : "l'examen des questions individuelles relatives au recrutement, à l'affectation et à la carrière (des enseignants-chercheurs) relève, dans chacun des organes compétents, des seuls représentants des enseignants-chercheurs et personnels assimilés ..." ; que ces dispositions font obstacle, dans les "organes compétents" auxquels elles se réfèrent, à la présence de représentants de l'administration ; qu'ainsi les dispositions de l'article 10 du décret attaqué aux termes desquelles : "les décisions individuelles prises (à l'égard des enseignants-chercheurs) en matière de position, interviennent sans consultation d'une commission administrative paritaire", ne sont pas contraires aux dispositions invoquées de la loi du 13 juillet 1983 et se fondent sur les dispositions de la loi du 26 janvier 1984 ; qu'elles dérogent donc légalement aux dispositions de la loi du 11 janvier 1984 ;
Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article 17 de la loi précitée du 13 juillet 1983 : "les statuts particuliers peuvent ne pas prévoir de système de notation" ; que le requérant n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que le décret attaqué aurait illégalement dérogé au statut général des fonctionnaires en ne soumettant pas à notation les enseignants-chercheurs ; que l'absence de tableau d'avancement pour l'avancement de grade, et les dispositions de l'article 39 qui instituent un avancement d'échelon exclusivement dépendant de l'ancienneté, sont la conséquence normale de l'absence de notation ; que ces dispositions dérogatoires répondent, par conséquent, aux besoins propres des corps d'enseignants-chercheurs ; qu'elles ne sont pas en contradiction avec les dispositions de l'article 56 du même décret qui prévoient que la qualification des enseignants-chercheurs et la qualité de leurs travaux dans l'exercice de leurs différentes missions feront l'objet d'une évaluation par des organes composés exclusivement de représentants des enseignants-chercheurs ;
Considérant qu'aux termes de l'article 56 alinéa 4 de la loi du 26 janvier 1984 : "par dérogation au statut général de la fonction publique, des personnalités ne possédant pas la qualité de fonctionnaires peuvent être recrutées et titularisées à tout niveau de la hiérarchie des corps d'enseignants-chercheurs dans des conditions précisées par décret en Conseil d'Etat" ; que les dispositions de l'article 24 du décret attaqué, qui organisent un concours spécial pour le recrutement de maîtres de conférences, réservé aux candidats pouvant justifier d'au moins huit années d'activités professionnelles autres que des activités d'enseignement ou des activités de recherche dans un établissement public à caractère scientifique et technologique, ont pour objet de mettre en application les dispositions législatives précitées ; qu'elles ne sont donc pas illégales et ne font pas obstacle à l'organisation, selon des modalités spécifiques, de la promotion interne prévue à l'article 26 de la loi du 11 janvier 1984 ;
Considérant qu'aux termes de l'article 12 de la loi précitée du 13 juillet 1983 : "toute nomination ou toute promotion dans un grade qui n'intervient pas exclusivement en vue de pourvoir un emploi vacant ... est nulle" ; que le requérant n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que l'article 40 du décret attaqué serait illégal en tant qu'il dispose que les avancements de la °2 à la °1 classe du corps des maîtres de conférences ne peuvent être réalisés que : "dans la limite des emplois vacants" ;
Considérant que les dispositions de l'article 61 alinéa 2 du décret attaqué ont pour seul objet d'offrir pendant cinq ans aux assistants titulaires, qui peuvent justifier de certains diplômes et d'une durée de service d'au moins six ans dans l'enseignement supérieur, un concours spécial d'accès au corps des maîtres de conférences à la faveur de transformations d'emplois d'assistants en emplois de maîtres de conférences ouvertes chaque année par la loi de finances ; que ces dispositions ne sont pas relatives aux avancements de grade et ne sauraient par suite être contraires aux dispositions de l'article 58 de la loi du 11 janvier 1984 ; que les dispositions de l'article 26 de la même loi relatives à la promotion interne des fonctionnaires, ne sauraient en tout état de cause faire obstacle à ce que le statut particulier des maîtres de conférences comporte des dispositions transitoires destinées à faciliter l'accès des assistants titulaires dans ce corps ;
Sur le moyen tiré de la méconnaissance du deuxième alinéa de l'article 56 de la loi du 26 janvier 1984 :
Considérant que les dispositions précitées du second alinéa de l'article 56 de la loi du 26 janvier 1984 prévoient que les questions individuelles relatives aux enseignants-chercheurs relèvent : "dans chacun des organes compétents, des seuls représentants des enseignants-chercheurs et personnels assimilés d'un rang au moins égal à celui postulé par l'intéressé s'il s'agit de son recrutement, et d'un rang au moins égal à celui détenu par l'intéressé s'il s'agit de son affectation ou du déroulement de sa carrière" ; que si les articles 7, 13, 15, 30 et 40 du décret attaqué ne mentionnent pas cette obligation, cette circonstance n'a ni pour objet ni pour effet de dispenser les conseils d'administration des établissements, dans la mesure où ils sont appelés à statuer sur des questions individuelles relatives au recrutement, à l'affectation ou à la carrière des enseignants chercheurs, de se conformer aux dispositions précitées ; que par suite le moyen tiré de ce que les dispositions des articles 7, 13, 15, 30 et 40 méconnaîtraient les prescriptions de l'article 56 de la loi du 26 janvier 1984 sur l'enseignement supérieur, n'est pas fondé ;
Considérant que, de tout ce qui précède, il résulte que M. X... n'est pas fondé à demander l'annulation des dispositions précitées du décret du 6 juin 1984 ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. X..., au ministre de l'éducation nationale et au Premier ministre.