Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 24 juillet 1984 et 23 novembre 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ASSOCIATION POUR LA SAUVEGARDE DU LITTORAL DES COMMUNES DE CRACH, SAINT-PHILIBERT ET LOCMARIAQUER, représentée par son président en exercice, à ce dûment autorisé par délibération de son conseil d'administration du 12 juillet 1984 et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1 annule un jugement du tribunal administratif de Rennes du 24 mai 1984 en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation d'une part, d'un arrêté du préfet, commissaire de la république du Morbihan, en date du 10 novembre 1982 accordant au syndicat intercommunal à vocation multiple de la région d'Auray-Belz-Quiberon un permis de construire un bassin de rétention d'une station d'épuration dans la commune de Locmariaquer et, d'autre part, d'un arrêté du même préfet, également en date du 10 novembre 1982, accordant audit syndicat un permis de construire un bassin de rétention d'une station d'épuration et un bâtiment d'exploitation de cette station d'épuration dans la commune de Saint-Philibert ;
°2 annule pour excès de pouvoir les deux arrêtés accordant les permis de contruire susvisés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu la loi °n 76-629 du 10 juillet 1976 ;
Vu la loi °n 76-663 du 19 juillet 1976 ;
Vu le décret °n 61-987 du 24 août 1961 ;
Vu le décret °n 77-1133 du 21 septembre 1977 ;
Vu le décret °n 77-1141 du 12 octobre 1977 ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Pinet, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Odent, avocat de l'ASSOCIATION POUR LA SAUVEGARDE DU LITTORAL DES COMMUNES DE CRACH, SAINT-PHILIBERT ET LOCMARIAQUER,
- les conclusions de M. E. Guillaume, Commissaire du gouvernement ;
Sur le moyen tiré de ce que l'annulation, par le jugement attaqué, de l'arrêté préfectoral déclarant d'utilité publique le projet de traitement d'eaux usées aurait dû entraîner l'annulation des permis de construire délivrés pour sa réalisation :
Considérant que les législations et réglementations applicables respectivement, d'une part, à la déclaration d'utilité publique du projet du traitement des eaux usées des communes de Crach, Locmariaquer et Saint-Philibert Morbihan , d'autre part, aux permis de construire destinés à l'implantation d'une station d'épuration des eaux usées sur le territoire des communes de Locmariaquer et de Saint-Philibert, sont distinctes et que les décisions administratives correspondantes sont intervenues à l'issue de procédures indépendantes l'une de l'autre ; que c'est dès lors à bon droit que le tribunal administratif de Rennes a jugé que l'annulation qu'il prononçait par aillurs de l'arrêté préfectoral de déclaration d'utilité publique n'entraînait pas par elle-même celle des permis de construire litigieux ;
Sur les moyens tirés de ce que les permis de construire auraient été délivrés en violation de certaines dispositions du code de l'urbanisme :
Considérant que si l'association requérante soutient que les permis de construire critiqués auraient été délivrés en violation des dispositions de l'article L.421-5 du code de l'urbanisme, aux termes duquel "lorsque, compte tenu de la destination de la construction projetée, des travaux portant sur les réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou de distribution d'électricité sont nécessaires pour assurer la desserte de ladite construction, le permis de construire ne peut être accordé si l'autorité qui le délivre n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public lesdits travaux doivent être exécutés", il résulte des pièces figurant au dossier que ce moyen manque en fait ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'autorité qui a délivré les permis de construire litigieux n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en estimant qu'il n'y avait pas lieu, en l'espèce, de faire application des dispositions de l'article R.111-2 du code de l'urbanisme, aux termes duquel "le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation ou leurs dimensions, sont de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique", non plus que des dispositions de l'article R.111-14-2 du même code, aux termes duquel le permis de construire "peut n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales, si les constructions, par leur situation, leur destination ou leurs dimensions, sont de nature à avoir des conséquences dommageables pour l'environnement" ;
Sur le moyen tiré de l'absence d'étude d'impact préalable à la délivrance des permis de construire :
Considérant qu'aux termes de l'article 3-B du décret °n 77-1141 du 12 octobre 1977 pris pour l'application de l'article 2 de la loi °n 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature, "ne sont pas soumis à la procédure de l'étude d'impact ... les aménagements, ouvrages et travaux définis aux annexes I et II jointes au présent décret, dans les limites et sous les conditions précisées par lesdites annexes. Les dispenses d'études d'impact résultant des dispositions de l'annexe II ne sont pas applicables aux catégories d'aménagements, ouvrages et travaux visés à l'annexe I" ; que si l'annexe II du décret précité dispense totalement d'étude d'impact les constructions soumises au permis de construire dans les communes ou parties de communes dotées d'un plan d'occupation des sols rendu public ou approuvé, l'annexe I dudit décret cite parmi les opérations qu'elle énumère les ouvrages destinés à l'épuration des eaux des collectivités locales sous réserve que ceux-ci permettent de traiter un flux de matières polluantes inférieur à celui produit par 10 000 habitants au sens du décret du 24 août 1961 modifié ; qu'il découle des dispositions qui précédent que la délivrance d'un permis de construire afférent à des ouvrages destinés à l'épuration des eaux n'est dispensé de la réalisation préalable d'une étude d'impact, même dans des communes dotées de plans d'occupations des sols publiés ou approuvés, que dans la mesure où la capacité de traitement de ces ouvrages correspond à un seuil de population inférieur à 10 000 habitants ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les permis de construire litigieux ont été demandés et délivrés pour la réalisation d'ouvrages destinés à l'épuration des eaux des communes de Crach, Locmariaquer et Saint-Philibert pour une capacité de traitement correspondant à une population de 9 400 habitants ; qu'il résulte des dispositions ci-dessus analysées que la délivrance de ces permis, qui ne relevait pas, par ailleurs, des procédures fixées par le décret °n 77-1133 du 21 septembre 1977 pris pour l'application de la loi °n 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement, était dispensée de la réalisation préalable d'une étude d'impact ;
Sur le moyen tiré de ce que les permis de construire seraient en contradiction avec les plans d'occupation des sols des communes intéressées :
Considérant, d'une part, que le permis de construire délivré pour la réalisation de la partie des ouvrages de traitement des eaux implantée sur le territoire de la commune de Saint-Philibert concernait un bassin de rétention et un bâtiment d'exploitation situés dans le secteur U I b du plan d'occupation des sols de cette commune ; que le règlement de ce plan d'occupation des sols précise que ce secteur est destiné aux activités professionnelles industrielles, commerciales et artisanales ; qu'il ne contient aucune interdiction d'édifier dans le secteur intéressé un équipement du type de celui visé par le permis de construire ; que si y sont prohibées la création et l'extension de bâtiments agricoles incompatibles avec l'habitat, en particulier ceux soumis à une réglementation sanitaire spécifique en raison de leurs nuisances, les ouvrages en cause n'entraient pas dans cette catégorie de travaux ; qu'il ne résulte pas des pièces du dossier que ces ouvrages étaient de nature à entraîner des nuisances incompatibles avec la vocation donnée à ce secteur ; que si le plan d'occupation des sols fixe un coefficient d'emprise au sol maximun de 75 % pour les bâtiments situés dans la section U I b, ce coefficient s'appliquait à l'emprise au sol du seul bâtiment d'exploitation de la station d'épuration et non, dans les circonstances de l'espèce, à celle de la totalité des bassins de rétention ; qu'ainsi, la construction autorisée n'excédait pas le maximum ainsi fixé ; que, par suite, le permis de construire critiqué n'était pas en contradiction avec le plan d'occupation des sols de la commune de Saint-Philibert ;
Considérant, d'autre part, que le permis de construire délivré pour la réalisation de la partie des ouvrages de traitement des eaux implantée sur le territoire de la commune de Locmariaquer concernait un bassin de rétention situé dans le secteur NCa du plan d'occupation des sols de cette commune ; que le règlement de ce plan d'occupation des sols précise que, dans ce secteur, sont autorisés les équipements d'intérêt public lorsqu'ils sont strictement indispensables au fonctionnement des équipements et réseaux en place ; qu'il résulte des pièces du dossier que l'ouvrage objet du permis de construire présentait un tel caractère ; que, par suite, le permis de construire litigieux n'était pas en contradiction avec le plan d'occupation des sols de la commune de Locmariaquer ;
Sur le moyen tiré de ce que les demandes de délivrance des permis de construire auraient contenu des mentions inexactes :
Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces figurant au dossier que l'une et l'autre des demandes déposées en vue de la délivrance des permis de construire litigieux indiquaient explicitement que la capacité de traitement des ouvrages projetés correspondait à une population de 9 400 habitants ; que les permis de construire ont été délivrés sur ces bases, et n'autorisent, par suite, que la construction d'ouvrages de cette capacité, quelles qu'aient pu être les intentions des auteurs du projet ; que la circonstance que les ouvrages effectivement construits auraient une capacité de traitement supérieure à celle indiquée dans les demandes de permis de construire est sans incidence sur la légalité de ces derniers ;
Considérant, d'autre part, que si la demande de délivrance du permis de construire intéressant la commune de Saint-Philibert précisait que la superficie des parcelles concernées était de 51 720 m2 alors qu'il était indiqué que la surface de l'ouvrage projeté était de 65 000 m2, ce dernier chiffre correspondait à la surface totale de l'ouvrage, dans les deux communes de Saint-Philibert et de Locmariaquer ; que d'ailleurs la même indication figurait dans la demande de permis de construire intéressant cette dernière commune ; que le sens de ces mentions était clair et que celles-ci ne présentaient aucune inexactitude ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'ASSOCIATION POUR LA SAUVEGARDE DU LITTORAL DES COMMUNES DE CRACH, SAINT-PHILIBERT ET LOCMARIAQUER n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation des deux permis de construire litigieux ;
Article 1er : La requête susvisée de l'ASSOCIATION POUR LA SAUVEGARDE DU LITTORAL DES COMMUNES DE CRACH, SAINT-PHILIBERTET LOCMARIAQUER est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION POUR LA SAUVEGARDE DU LITTORAL DES COMMUNES DE CRACH, SAINT-PHILIBERTET LOCMARIAQUER, au ministre délégué auprès du ministre de l'équipement, du logement, de l'aménagement du territoire et des transports, chargé de l'environnement, et au ministre de l'agriculture.