Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 24 avril 1984 et 24 août 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Gérard X..., demeurant ... , et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule pour excès de pouvoir la décision du 21 février 1984 par laquelle le ministre de l'intérieur lui a refusé de rapporter l'interdiction, prononcée le 1er mars 1979, de vente aux mineurs, d'exposition et de publicité du recueil de photographies intitulé "Les P'tits Mecs" ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 16 juillet 1949, n° 49-956 relative aux publications destinées à la jeunesse ;
Vu la loi du 11 juillet 1979 ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Bouchet, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Liard, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Fornacciari, Commissaire du gouvernement ;
Sur la fin de non-recevoir soulevée par le ministre de l'intérieur :
Considérant que si l'arrêté du 1er mars 1979 par lequel le ministre de l'intérieur, sur le fondement de la loi du 16 juillet 1949, a interdit la vente aux mineurs d'un ouvrage intitulé "Les p'tits mecs" ainsi que l'affichage et la publicité dudit ouvrage est devenu définitif, il résulte des pièces du dossier que M. X... éditeur de la publication, a sollicité, par lettre du 15 septembre 1983, non son annulation mais son abrogation, en se fondant sur le caractère injustifié de son maintien à la date de la demande ; qu'en rejetant cette demande par lettre en date du 21 février 1984, le ministre n'a pas pris une décision purement confirmative de l'arrêté susmentionné du 1er mars 1979 ; que par suite le ministre de l'intérieur n'est pas fondé à soutenir que les conclusions présentées par M. X... tendant à l'annulation de la décision du 21 février 1984 sont irrecevables ;
Sur la légalité de la décision du 21 février 1984 :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant que, selon l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979, doivent être motivées "les décisions qui restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police" ;
Considérant qu'une décision par laquelle le ministre de l'intérieur refuse de lever les interdictions prononcées sur le fondement de la loi du 16 juillet 1949 constitue une mesure de police et doit, dès lors, être motivée ;
Considérant que la décision attaquée se borne à se référer à l'avis émis par la commission de surveillance et de contrôle des publications susceptibles de présenter un danger pour la jeunesse, sans s'approprier ou reproduire cet avis ; que cette seule référence ne peut tenir lieu de la motivation exigée par la loi ; que, par suite, M. X... est fondé à soutenir que la décision attaquée est entachée d'excès de pouvir et, dès lors, à en demander l'annulation ;
Article 1er : La décision du ministre de l'intérieur en date du 21 février 1984 est annulée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. X... et au ministre de l'intérieur.