Vu 1° sous le n° 82 436 la requête enregistrée le 2 et le 21 octobre 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Y..., domicilié à l'Assemblée Nationale, ...Université à Paris 75007 , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule l'arrêté du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de la privatisation et du ministre de l'industrie, des P. et T. et du tourisme en date du 25 septembre 1986 autorisant l'entreprise de recherches et d'activités pétrolières à céder sa participation dans la société nationale Elf-Aquitaine à hauteur de 11 p 100 du capital et la décision du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de la privatisation en date du 25 septembre 1986 fixant à 305 F le prix de cession des actions ;
2° ordonne le sursis à l'exécution de l'arrêté dont s'agit ;
Vu 2° sous le n° 82 476 la requête enregistrée le 3 et le 22 octobre 1986 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, et le mémoire complémentaire enregistré le 24 novembre et le 24 décembre 1986, présentés par M. X..., demeurant à Noisy-le-Grand 93160 , ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule l'arrêté du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de la privatisation et du ministre de l'industrie, des P. et T. et du tourisme en date du 25 septembre 1986 autorisant l'entreprise de recherches et d'activités pétrolières à céder sa participation dans la société nationale Elf-Aquitaine à hauteur de 11 p 100 du capital et la décision du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de la privatisation en date du 25 septembre 1986 fixant à 305 F le prix de cession des actions ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la loi n° 86-793 du 2 juillet 1986 ;
Vu la loi n° 86-912 du 6 août 1986 ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu le décret n° 53-709 du 9 août 1953 ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Tabuteau, Auditeur,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Liard, avocat de M. Pierre Y...,
- les conclusions de M. Massot, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes de M. Y... et de M. X... présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur la compétence du Conseil d'Etat en premier ressort :
Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret du 30 septembre 1953 susvisé : "Le Conseil d'Etat reste compétent pour connaître en premier et dernier ressort... 3° des recours dirigés contre les actes administratifs dont le champ d'application s'étend au-delà du ressort d'un seul tribunal administratif" ; que la décision par laquelle le ministre de l'économie des finances et de la privatisation a fixé, pour la cession, à concurrence de 11 % du capital de la société nationale Elf-Aquitaine S.N.E.A. , des actions de cette société détenues par l'Entreprise de Recherces et d'Activités Pétrolières, le prix de cession de ces actions, doit être regardée, pour l'application des dispositions précitées de l'article 2-3° du décret du 30 septembre 1953, comme produisant des effets à l'égard de toute personne susceptible d'acquérir l'un des titres mis en vente ; qu'ainsi le Conseil d'Etat est compétent en premier ressort pour connaître des conclusions dirigées contre ladite décision ;
Considérant qu'eu égard à la connexité existant entre les conclusions tendant à l'annulation de la décision par laquelle le ministre chargé de l'économie a fixé le prix de cession des actions de la société nationale Elf-Aquitaine et celles tendant à l'annulation de l'arrêté du ministre de l'économie, des finances et de la privatisation et du ministre de l'industrie, des P. et T. et du tourisme en date du 25 septembre 1986 autorisant l'Entreprise de Recherches et d'Activités Pétrolières à céder sa participation dans la société nationale Elf-Aquitaine à hauteur de 11 % du capital, le Conseil d'Etat est compétent, en application de l'article 2 bis ajouté au décret du 30 septembre 1953 par le décret du 23 décembre 1960, pour connaitre en premier ressort de l'ensemble de ces conclusions ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de la privatisation :
Considérant qu'aucun texte n'imposait au ministre de l'économie, des finances et de la privatisation et au ministre de l'industrie, des P. et T. et du tourisme de fixer, dans l'arrêté pris au titre des dispositions du décret susvisé du 9 août 1953 pour autoriser l'Entreprise de Recherches et d'Activités Pétrolières à céder sa participation dans la société nationale Elf-Aquitaine à concurrence de 11 % du capital de ladite société, le prix de cession des titres dont s'agit ;
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 4 de la loi susvisée du 2 juillet 1986 : "Sera transférée du secteur public au secteur privé, au plus tard le 1er mars 1991, la propriété des participations majoritaires détenues directement ou indirectement par l'Etat dans les entreprises figurant sur la liste annexée à la présente loi" ; qu'en vertu des dispositions du second alinéa du même article, ces transferts doivent être effectués conformément aux règles définies par les textes mentionnés à l'article 5 ; que sur la liste des entreprises annexée à la loi du 2 juillet 1986 figure la société nationale Elf-Aquitaine ;
Considérant qu'aux termes de l'article 2 du titre II de la loi susvisée du 6 août 1986 "les dispositions du présent titre sont applicables aux opérations mentionnées au 1° de l'article 5 de la loi n° 86-793 du 2 juillet 1986 précitée" que, parmi ces opérations, figure notamment le "transfert des entreprises figurant sur la liste mentionnée à l'article 4" ; qu'il résulte des dispositions précitées que les règles fixées par le titre II de la loi susvisée du 6 août 1986 étaient applicables à l'opération de cession de la participation de l'Entreprise de Recherches et d'Activités Pétrolières dans la société nationale Elf-Aquitaine à hauteur de 11 % du capital, autorisée par l'arrêté attaqué en date du 25 septembre 1986, alors même qu'au terme de cette opération l'Etat devait conserver la propriété directe ou indirecte de plus de la moitié du capital de la société dont s'agit ;
Considérant qu'aux termes de l'article 3 du titre II de la loi du 6 août 1986 : "... La commission de la privatisation est saisie par le ministre chargé de l'économie à l'occasion de chacune des opérations mentionnées à l'article 2. Elle fixe la valeur de l'entreprise ou, s'il y a lieu, des éléments faisant l'objet de la cession. Cette évaluation est rendue publique. La commission est également consultée, s'il y a lieu, sur la valeur des actifs remis en échange par les acquéreurs éventuels -Ces évaluations sont conduites selon les méthodes objectives couramment pratiquées en matière de cession totale ou partielle d'actifs de sociétés en tenant compte, selon une pondération appropriée à chaque cas, de la valeur boursière des titres, de la valeur des actifs, des bénéfices réalisés, de l'existence des filiales et des perspectives d'avenir -Les prix d'offre, les prix de cession ainsi que les parités d'échange sont arrêtés par le ministre chargé de l'économie sur avis de la commission de la privatisation -Ces prix et parités ne peuvent être inférieurs à l'évaluation faite par la commission de la privatisation et tiennent compte de la valeur estimée des avantages consentis par l'Etat en vertu des articles 11 à 13 de la présente loi...." ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la commission de la privatisation, saisie par le ministre chargé de l'économie à l'occasion de l'opération litigieuse conformément aux dispositions précitées de l'article 3 de la loi du 6 août 1986, a par un avis rendu le 25 septembre 1986, fixé la valeur des titres dont la vente était prévue ;
Considérant qu'en l'absence de disposition législative ou réglementaire imposant à la commission de la privatisation de motiver ses avis et eu égard à la nature de l'évaluation à laquelle elle procède, le moyen tiré du défaut de motivation de l'avis susmentionné en date du 25 septembre 1986 ne saurait être accueilli ;
Considérant que l'avis dont s'agit a été publié au journal officiel du 27 septembre 1986 ; que dès lors, l'évaluation de la commission de la privatisation a été rendue publique dans des conditions satisfaisant aux prescriptions de l'article 3 de la loi du 6 août 1986 ;
Considérant que la circonstance que l'avis de la commission de la privatisation, dont les membres ont été nommés par décret du 9 septembre 1986, a été rendu trois jours seulement après l'installation de ladite commission n'est pas de nature à entacher la régularité de la procédure ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le prix de cession des titres mis en vente a été arrêté, conformément aux dispositions du septième alinéa de l'article 3 de la loi susvisée du 6 août 1986, après avis de la commission de la privatisation ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la commission de la privatisation ait, eu égard tant au caractère de l'opération de cession envisagée qu'aux critères d'évaluation définis à l'article 3 de la loi du 6 août 1986, fait une inexacte application des dispositions législatives précitées en fixant à 300 F la valeur des titres faisant l'objet de la cession ; qu'en se fondant sur la valeur ainsi fixée par la commission de privatisation pour arrêter le prix de cession des actions de la société nationale Elf-Aquitaine, le ministre chargé de l'économie n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article 3 de la loi susvisée du 6 août 1986 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. Y... et M. X... ne sont pas fondés à demander l'annulation des décisions attaquées ;
Article 1er : Les requêtes de M. Y... et de M. X... sontrejetées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Y..., à M. X..., à l'Entreprise de Recherches et d'Activités Pétrolières, à lasociété nationale Elf-Aquitaine, au ministre de l'industrie, des P. et T. et du tourisme et au ministre d'Etat, chargé de l'économie, des finances et de la privatisation.