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19/11/1986 | FRANCE | N°51753

France | France, Conseil d'État, 6 / 2 ssr, 19 novembre 1986, 51753


Vu 1° le recours sommaire, enregistré le 22 juin 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et le mémoire complémentaire, enregistré le 18 octobre 1983 sous le n° 51 575, présentés par le secrétaire d'Etat auprès du ministre des transports chargé de la mer, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1- annule le jugement du 29 mars 1983 par lequel le tribunal administratif de Pau l'a condamné à verser à la SOCIETE FONCIERE "LES PINS SETIM" une indemnité de 494 248 F en réparation du préjudice que ladite société a subi à la suite de l'aménagement du port de Ba

yonne ;
2- limite l'indemnité à la somme de 70 567 F ;

Vu 2° la requête...

Vu 1° le recours sommaire, enregistré le 22 juin 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et le mémoire complémentaire, enregistré le 18 octobre 1983 sous le n° 51 575, présentés par le secrétaire d'Etat auprès du ministre des transports chargé de la mer, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1- annule le jugement du 29 mars 1983 par lequel le tribunal administratif de Pau l'a condamné à verser à la SOCIETE FONCIERE "LES PINS SETIM" une indemnité de 494 248 F en réparation du préjudice que ladite société a subi à la suite de l'aménagement du port de Bayonne ;
2- limite l'indemnité à la somme de 70 567 F ;

Vu 2° la requête enregistrée le 29 juin 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat sous le n° 51 753, présentée pour la SOCIETE FONCIERE "LES PINS SETIM", dont le siège social est au ..., représentée par son président en exercice, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1- réforme le jugement du 29 mai 1983 par lequel le tribunal administratif de Pau a condamné l'Etat à lui verser la somme de 484 298 F qu'il estime insuffisante, en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait de l'aménagement du port de Bayonne ;
2- condamne l'Etat à lui verser la somme de 1 032 780 F ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Girault, Auditeur,
- les observations de la SCP Martin-Martinière, Ricard, avocat de la Société Foncière "LES PINS SETIM",
- les conclusions de M. E. Guillaume, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que le recours du secrétaire d'Etat auprès du ministre des transports chargé de la mer et la requête de la société foncière LES PINS SETIM sont dirigés contre un même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Considérant qu'après avoir déclaré dans les motifs du jugement attaqué, que l'Etat devait être condamné à verser à la société foncière LES PINS SETIM une somme de 242 149 F, le tribunal administratif a fixé ladite indemnité à 484 298 F ; qu'ainsi le jugement attaqué est entaché d'une contradiction entre ses motifs et son dispositif et que, dès lors, il encourt l'annulation ;
Considérant que, dans les circonstances de l'affaire, il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la société LES PINS SETIM devant le tribunal administratif de Pau ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise qu'au 13 mai 1976, la superficie des parcelles incorporée depuis 1961 au domaine public maritime par l'action de la mer s'élève à 17 915 m2 ; qu'après le 13 mai 1976, une surface supplémentaire de 2 740 m2 a été recouverte par les plus hautes eaux et que des parcelles représentant 2 284 m2 ont été érodées ;
Sur le préjudice subi du fait de la pert des terrains incorporés au domaine public entre 1961 et le 13 mai 1976 :
Considérant que le préjudice est égal à la valeur vénale desdits terrains qui, s'ils ne faisaient l'objet, à la date de réalisation des dommages, d'aucune règle d'urbanisme les rendant inconstructibles, ne comportaient, eu égard notamment à la viabilité existante et aux règles résultant du cahier des charges du lotissement, que des possibilités limitées d'urbanisation ; qu'il sera fait une juste appréciation de cette valeur en la fixant au prix moyen de 20 F le m2 ; qu'ainsi le préjudice subi du fait de la perte de ces terrains se monte à 358 300 F ;
Sur le préjudice subi du fait de la perte et de l'érosion des terrains postérieurement à 1976 :

Considérant qu'il est constant que le plan d'occupation de sols de la commune d'Anglet rendu public le 13 mai 1976, entré en vigueur à compter de cette date et demeuré en vigueur depuis lors du fait de son approbation le 18 juillet 1978, a classé toute la partie du littoral dans laquelle sont situés les terrains de la société en zone ND, inconstructible ; que ce classement a été motivé, non par le fait que certaines parcelles pouvaient être envahies par la mer, mais par la volonté des pouvoirs publics de protéger le site et de maintenir le rivage dans son état naturel ; qu'il suit de là que le préjudice subi par la société foncière "LES PINS SETIM" doit s'apprécier pour les terrains recouverts par les plus hautes eaux ainsi que pour les parcelles erodées, après le 13 mai 1976, compte-tenu des dispositions du plan d'occupation des sols ; que ce préjudice est, en ce qui concerne les parcelles totalement recouvertes par les plus hautes eaux, égal à la valeur vénale de terrains inconstructibles, qui doit être fixée à 5 F le m 2 ; qu'en ce qui concerne les parcelles simplement érodées, le préjudice est égal à 90 % de la valeur vénale des terrains ; que le préjudice subi s'élève ainsi à 13 700 F pour les parcelles perdues et à 10 278 F pour les parcelles erodées ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, compte tenu de la part de responsabilité incombant à l'Etat celui-ci doit être condamné à verser à la société la somme de 191 139 F ;
Sur les intérêts :
Considérant que la société foncière LES PINS SETIM a droit aux intérêts de la somme de 191 139 F à compter de l'enregistrement de sa demande devant le tribunal administratif de Pau, soit le 2 août 1976 ;
Sur les intérêts des intérêts :

Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée le 21 avril 1977 ; qu'à cette date il n'était pas dû une année d'intérêt ; que, par suite, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de rejeter cette demande ; qu'au contraire les 11 juin 1981, 22 mars 1983 et 23 novembre 1984, dates auxquelles la demande de capitalisation d'intérêts a été renouvelée, une année au moins d'intérêts était due ; que, dès lors, conformément à l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à ces demandes ;
Sur les frais d'expertise :
Considérant que, dans les circonstances de l'affaire, ces frais doivent être mis à la charge de l'Etat ;
Article ler : Le jugement en date du 29 mars 1983 du tribunal administratif de Pau est annulé.

Article 2 : L'Etat est condamné à verser à la société foncière "LES PINS SETIM" une somme de 191 139 F avec intérêts au taux légal àcompter du 2 août 1976. Les intérêts échus les 11 juin 1981, 22 mars 1983 et 23 novembre 1984 seront capitalisés à ces dates pour produireeux-mêmes intérêts.

Article 3 : Les frais d'expertise sont mis à la charge de l'Etat.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la demande présentée par la société foncière "LES PINS SETIM" devant le tribunal administratif de Pau, ainsi que le surplus du recours du ministre de la mer et de la requête de ladite société sont rejetés.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société foncière "LES PINS SETIM" et au secrétaire d'Etat à la mer.


Synthèse
Formation : 6 / 2 ssr
Numéro d'arrêt : 51753
Date de la décision : 19/11/1986
Type d'affaire : Administrative

Analyses

67-03-03 TRAVAUX PUBLICS - DIFFERENTES CATEGORIES DE DOMMAGES - DOMMAGES CAUSES PAR L'EXISTENCE OU LE FONCTIONNEMENT D'OUVRAGES PUBLICS


Publications
Proposition de citation : CE, 19 nov. 1986, n° 51753
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Girault
Rapporteur public ?: E. Guillaume

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1986:51753.19861119
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