Vu la requête enregistrée le 5 septembre 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par l'ASSOCIATION DES ANCIENS ELEVES DE L'INSTITUT REGIONAL D'ADMINISTRATION DE LILLE, et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule pour excès de pouvoir le décret n° 84-588 du 10 juillet 1984 relatif aux instituts régionaux d'administration ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 71-575 du 16 juillet 1971 et notamment son article 44 ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Faugère, Auditeur,
- les conclusions de M. Daël, Commissaire du gouvernement ;
Sur la recevabilité de la requête :
Considérant que l'ASSOCIATION DES ANCIENS ELEVES DE L'INSTITUT REGIONAL D'ADMINISTRATION DE LILLE s'est donnée pour objet, notamment d'agir au bénéfice des élèves et des anciens élèves dudit institut ; qu'elle a par suite qualité pour déférer au juge de l'excès de pouvoir le décret attaqué relatif aux instituts régionaux d'administration ;
Sur le défaut de contreseing du ministre délégué à la culture :
Considérant qu'aux termes de l'article 22 de la Constitution "les actes du Premier ministre sont contresignés, le cas échéant, par les ministres chargés de leur exécution" ; que, s'agissant d'un acte réglementaire, les ministres chargés de son exécution sont ceux qui ont compétence pour signer ou contresigner les mesures réglementaires ou individuelles que comporte nécessairement son exécution ;
Considérant que, si les instituts régionaux d'administration contribuent à assurer le recrutement d'attachés d'administration centrale susceptibles d'être affectés au ministère chargé de la culture et celui des attachés des services extérieurs du ministère chargé de la culture, la nomination des anciens élèves desdits instituts en ces qualités intervient sur le fondement, non pas du décret attaqué mais des dispositions statutaires propres aux corps intéressés ; que, de même, le détachement, pendant leur scolarité, des fonctionnaires relevant de l'autorité du ministre chargé de la culture, admis dans l'un des instituts régionaux d'administration à l'issue des épreuves du concours interne, est prononcé en vertu des statuts des corps auxquels ils appartiennent ; qu'ainsi les dispositions contestées du décret attaqué n'appellent aucune mesure que le ministre chargé de la culture soit compétent pour signer ou contresigner ; que par suite le moyen tiré du défaut de contreseing de ce ministre ne peut être retenu ;
Sur la légalité de l'article 10 du décret attaqué :
Considérant qu'aux termes de l'article 44 de la loi du 16 juillet 1971 susvisée... "l'admission dans les instituts régionaux d'administration résulte de deux concours. Le premier est réservé aux candidats titulaires de diplômes d'enseinement supérieur ou reconnus équivalents fixés par décret..." ; qu'aux termes de l'article 10 du décret attaqué : "les diplômes donnant accès au concours externe sont les suivants : 1° titres ou diplômes exigés pour se présenter au premier concours d'entrée à l'école nationale d'administration ; 2° titres ou diplômes dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé de la fonction publique..." ; que le gouvernement ne pouvait légalement déléguer au ministre chargé de la fonction publique, sans autre précision, le pouvoir, qui lui était confié par la loi, de déterminer des titres ou diplômes donnant accès au premier concours d'entrée dans les instituts régionaux d'administration ; que par suite les dispositions du 2° de l'article 10 du décret attaqué sont entachées d'excès de pouvoir ;
Sur la légalité de l'article 20 du décret attaqué :
Considérant qu'aux termes de cet article "La scolarité dans les instituts régionaux d'administration dure douze mois..." ; qu'aucune disposition législative ne s'opposait à ce que soit fixée à un an la durée de la scolarité ; que si cette durée était auparavant fixée à deux ans, l'association requérante ne saurait se prévaloir d'un droit au maintien en vigueur de la disposition réglementaire antérieure ;
Sur la légalité des articles 25 et 26 du décret attaqué :
Considérant qu'aux termes de l'article 13 de la loi n° 83.634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires "Les corps de fonctionnaires, qu'ils relèvent de la fonction publique de l'Etat ou de la fonction publique territoriale, sont régis par des statuts particuliers à caractère national. Le recrutement et la gestion de ces corps peuvent être, selon le cas, déconcentrés ou décentralisés" ;
Considérant qu'aux termes de l'article 15 du décret attaqué : " un arrêté du ministre chargé de la fonction publique, pris sur proposition des ministres intéressés, détermine le nombre des postes offerts aux élèves de chaque institut dans les différents corps auxquels préparent ces instituts. Au vu de cet arrêté, les élèves émettent des voeux touchant leur affectation dans un institut déterminé. Compte tenu de ces voeux et de leur rang de classement, les élèves sont nommés et affectés dans les différents instituts par arrêté du ministre chargé de la fonction publique" ; qu'aux termes de l'article 25 "Dans chacun des instituts, il est constitué, chaque année, par arrêté du ministre chargé de la fonction publique, un jury chargé d'établir le classement de sortie"... ; qu'enfin l'article 26 dispose "Au vu des décisions prises par le jury, ... le ministre chargé de la fonction publique arrête la liste des élèves aptes à être titulariés... Les élèves sur la liste exercent leur choix entre les corps selon leur ordre de classement..." ;
Considérant qu'il ressort de ces dispositions que les élèves des instituts régionaux d'administration, recrutés à l'issue de concours nationaux, choisissent dans l'ordre de leur classement à ces concours, l'institut où ils effectuent leur scolarité ; qu'ils font leur choix au vu de la liste, établie par institut, des corps et du nombre d'emplois offerts dans chacun de ces corps au terme de la scolarité dans chaque institut ; que les modalités des épreuves de classement par les jurys constitués dans chaque institut pour apprécier les mérites des élèves au terme de leur scolarité, le nombre, la nature, le programme et le coefficient retenu pour chacune de ces épreuves sont fixés, pour l'ensemble des instituts, par arrêté du ministre chargé de la fonction publique, conformément au dernier alinéa de l'article 25 du décret attaqué ;
Considérant que la procédure de recrutement ainsi définie, qui trouve sa base légale dans les dispositions précitées de l'article 13 de la loi du 13 juillet 1983, ne porte pas atteinte au principe de l'égal accès des candidats à un corps de fonctionnaires ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'association requérante est fondée à demander l'annulation du 2° de l'article 10 du décret attaqué et que le surplus des conclusions de sa requête doit être rejeté ;
Article 1er : Le 2° de l'article 10 du décret n° 84-588 du 10 juillet 1984 relatif aux instituts régionaux d'administration est annulé.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION DES ANCIENS ELEVES DE L'INSTITUT REGIONAL D'ADMINISTRATION DE LILLE, au Premier ministre et au ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé de la fonction publique et du plan.