Vu la requête, enregistrée le 31 juillet 1982 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la Société Civile Immobilière "LES CHASSES", dont le siège est ..., représentée par son président-directeur général et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° réforme le jugement en date du 10 juin 1982 en tant que par ce jugement le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations auxquelles elle a été assujettie pour l'année 1979 au titre du prélèvement sur les profits de construction, dans les rôles de la commune de Clichy ;
2° lui accorde la décharge de l'imposition contestée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu l'article 23, IV de la loi n° 81-1160 du 30 décembre 1981 ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Vu la loi du 29 décembre 1983, portant loi de finances pour 1984, notamment son article 93-II ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Dulong, Maître des requêtes,
- les conclusions de M. Racine, Commissaire du gouvernement ;
Sur la requête de la société civile immobilière "LES CHASSES" :
Considérant que, selon le I de l'article 235 quater du code général des impôts, issu de la loi du 19 mars 1963, les plus-values nettes réalisées par les personnes physiques, à l'occasion de la cession d'immeubles ou de fractions d'immeubles qu'elles ont construits ou fait construire ou des droits immobiliers y afférents, donnent lieu à la perception d'un prélèvement, et qu'aux termes du 3 du même article 235 quater I ter : "Le prélèvement prévu aux 1, 1 bis et 2 est étendu aux profits de construction réalisés par les entreprises industrielles et commerciales relevant de l'impôt sur le revenu" ; qu'aux termes de l'article 23 de la loi 81-1160 du 30 décembre 1981 portant loi de finances pour 1982 : "IV. Pour l'application des dispositions de l'article 235 quater I ter 3 du code général des impôts et du I du présent article, les entreprises redevables du prélèvement s'entendent des entreprises individuelles et des sociétés visées aux articles 8 et 239 ter du même code. Cette disposition a un caractère interprétatif" ; qu'enfin, aux termes du 4ème alinéa de l'article 28 - IV de la loi du 15 mars 1963 codifié au 4ème alinéa de l'article 235 quater I du code précité le prélèvement sur les profits de construction "s'impute sur le montant de l'impôt sur le revenu dû par le cédant au titre de la réalisation des plus-values" ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que, d'une part, les société civiles immobilières relevant de l'article 239 ter du code sont redevables du prélèvement institué par le I de l'article 235 quater, quelle que soit la situation de leurs associés au regard respectivement soit de l'impôt sur le revenu, sot de l'impôt sur les sociétés et que, d'autre part, ce prélèvement a le caractère d'un acompte versé aux lieu et place desdits associés et imputable sur les impositions dues par ces associés, au titre soit de l'impôt sur le revenu, soit de l'impôt sur les sociétés ; que, par suite, la Société Civile Immobilière "LES CHASSES" a été assujettie à bon droit au prélèvement sur les profits de construction qu'elle a réalisés au cours de l'exercice clos en 1979, alors même que, comme elle l'allègue, certaines des personnes morales soumises à l'impôt sur les sociétés qui sont au nombre de ses associés présenteraient des résultats globalement déficitaires dans le bilan de clôture de l'exercice en cause ; qu'elle n'est, dès lors, pas fondée à demander l'annulation du jugement en date du 10 juin 1982 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge de l'imposition contestée ;
Sur le recours incident du ministre :
Considérant que si la portée attribuée à l'article 235 quater, I ter, 3 du code général des impôts par les dispositions interprétatives du IV de l'article 23 précité de la loi du 30 décembre 1981 est d'assujettir au prélèvement prévu par l'article 235 quater, I ter, 3 les profits de construction réalisés avant l'entrée en vigueur de cette loi, il résulte de l'ensemble des dispositions du IV dudit article 23 et notamment de celles de son dernier alinéa, qui interdisent expressément d'appliquer aucune sanction fiscale en cas de mauvaise foi à raison de faits résultant d'une interprétation de l'article 235 quater, I ter, 3 différente de celle prévue par le IV de l'article 23 ; que l'intention du législateur n'a pas été de rendre passibles, sans même que leur mauvaise foi ait été établie, les majorations de 25 % ou 100 % prévues au 1 de l'article 1733 du code, lesquelles n'ont pas le caractère d'intérêt de retard ou de réparations pécuniaires, les sociétés visées aux articles 8 et 239 ter du même code qui n'ont pas fait parvenir leurs déclarations au titre du prélèvement prévu à l'article 235 quater, I ter, 3 parce que, antérieurement à la publication de la loi du 30 décembre 1981, elles avaient fait de cet article une interprétation différente de celle qui en a été donnée par l'article 23, N de la loi ; qu'il suit de là que le ministre de l'économie, des finances et du budget n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a déchargé la Société Civile Immobilière "LES CHASSES" de la majoration qui avait été mise à sa charge en application de l'article 1733-1 ;
Article 1er : La requête de la Société Civile Immobilière "LES CHASSES" et le recours incident du ministre de l'économie, des finances et du budget sont rejetés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la Société Civile Immobilière "LES CHASSES" et au ministre de l'économie, des finances et du budget.