La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/02/1986 | FRANCE | N°56987

France | France, Conseil d'État, 1 / 4 ssr, 26 février 1986, 56987


Vu le recours enregistré le 14 février 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 25 novembre 1983, par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision de l'inspecteur du travail en date du 10 juin 1982, autorisant la société S.N.B.C.C. à licencier pour cause économique M. X... Pierre , délégué syndical et membre du comité d'entreprise ;
2° rejette la demande présentée par M. X... devant le tribuna

l administratif de Nantes,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code...

Vu le recours enregistré le 14 février 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 25 novembre 1983, par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision de l'inspecteur du travail en date du 10 juin 1982, autorisant la société S.N.B.C.C. à licencier pour cause économique M. X... Pierre , délégué syndical et membre du comité d'entreprise ;
2° rejette la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Nantes,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Garrec, Maître des requêtes,
- les conclusions de M. Boyon, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces produites devant le Conseil d'Etat par le ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale que le directeur départemental du travail et de l'emploi de Vendée, par décision du 12 novembre 1981, avait accordé à M. Y..., inspecteur du travail, une délégation l'habilitant à signer toutes décisions" en matière de licenciement économique" et que cette décision a fait l'objet, en décembre 1981, d'une publication au "Recueil des actes administratifs" du département ; que, dès lors, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes s'est fondé sur l'incompétence de l'inspecteur du travail pour annuler la décision en date du 10 juin 1982 qui a autorisé le licenciement pour motif économique de M. X... ;
Considérant qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X... devant le tribunal administratif de Nantes ;
Considérant qu'en vertu des dispositions des articles L.412-15 et L.436-1 du code du travail applicables au licenciement d'un délégué syndical et d'un membre titulaire ou suppléant du comité d'entreprise, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'il représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre de rechercher sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilté d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou à l'autre des intérêts en présence ;

Considérant que la Société nouvelle des bois contreplaqués et comprimés S.N.B.C.C. , qui est une filiale du groupe britannique Mallison-Deny et a son siège social en France, a demandé le 28 mai 1982, dans le cadre d'une réorganisation de ses structures entraînant notamment la suppression d'un laboratoire, l'autorisation de procéder au licenciement pour motif économique de huit salariés parmi lesquels se trouvaient deux membres du comité d'entreprise, dont M. X... qui était employé dans ledit laboratoire ; que l'autorisation demandée a été accordée par l'inspecteur du travail le 10 juin 1982 ;
Considérant, en premier lieu, que si, pour apprécier la réalité du motif économique invoquée à l'appui d'une demande d'autorisation de licenciement d'un ou plusieurs salariés, présentée par une société qui fait partie d'un groupe, l'autorité administrative ne peut se borner à prendre en considération la seule situation de la société demanderesse, elle n'est tenue, dans le cas où la société intéressée relève d'un groupe dont la société mère a son siège à l'étranger, de faire porter son examen que sur la situation économique des sociétés du groupe ayant leur siège social en France et des établissements de ce groupe situés en France ; que, dans ces conditions, et dès lors qu'il n'est pas allégué que le groupe précité possède une autre société ou un autre établissement en France, l'inspecteur du travail n'a commis aucune erreur de droit en examinant seulement la situation de la société S.N.B.C.C. ;
Considérant, en second lieu, qu'il ressort des pièces versées au dossier que la situation économique de la S.N.B.C.C. justifiait le licenciement de M. X... ; qu'eu égard au poste très spécialisé que l'intéressé occupait dans le laboratoire supprimé, il n'est pas établi que le reclassement de M. X... était possible ;

Considérant, en troisième lieu, que la demande de licenciement portait sur moins de dix personnes en 30 jours ; que, dans ces conditions, l'établissement d'un "plan social" n'était pas requis ;
Considérant, enfin, qu'il ne résulte pas du dossier que la demande de licenciement ait été en rapport avec les mandats de délégué syndical et de membre du comité d'entreprise détenus par M. X... ;
Considérant que, de ce qui précède, il résulte que le ministre requérant est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision en date du 10 juin 1982 qui a autorisé le licenciement de M. X... ;
Article ler : Le jugement du tribunal administratif de Nantes en date du 25 novembre 1983 est annulé.

Article 2 : Les conclusions de la demande de M. X... devant letribunal administratif de Nantes tendant à l'annulation de la décision du 10 juin 1982 sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. X..., à laSociété nouvelle de bois contreplaqués et comprimés et au ministre dutravail, de l'emploi et de la formation professionnelle.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

66-07-02 TRAVAIL - LICENCIEMENT - LICENCIEMENT POUR MOTIF ECONOMIQUE


Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 26 fév. 1986, n° 56987
Inédit au recueil Lebon
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Garrec
Rapporteur public ?: Boyon

Origine de la décision
Formation : 1 / 4 ssr
Date de la décision : 26/02/1986
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 56987
Numéro NOR : CETATEXT000007689456 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1986-02-26;56987 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award