Requête de la S.A. Grands garages catésiens tendant :
1° à l'annulation du jugement du 25 novembre 1980 du tribunal administratif de Lille rejetant sa demande en décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée auquel elle a été assujettie pour la période du 1er janvier 1968 au 31 décembre 1971 ;
2° à la décharge de cette imposition ;
3° au remboursement des frais de constitution des garanties nécessaires au sursis de paiement, ainsi que les intérêts au taux légal des sommes correspondant aux impôts dont la décharge sera prononcée ;
Vu le code général des impôts ; l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ; la loi du 30 décembre 1977 ;
Sur les conclusions de la requête tendant au remboursement de frais de constitution de garanties et au paiement d'intérêts moratoires : Considérant qu'en vertu des dispositions des articles R. 208-1, 2e alinéa, et R. 208-3 du livre des procédures fiscales, les intérêts moratoires prévus à l'article L. 208 du même livre sont payés d'office en même temps que les sommes remboursées par le comptable chargé du recouvrement de ces impôts, et que les frais de constitution de garanties sont remboursés sur la demande adressée au directeur des services fiscaux ; qu'il n'existe aucun litige, né et actuel, ni entre le comptable public et la société Grands garages catésiens concernant lesdits intérêts, ni entre le même contribuable et le directeur des services fiscaux, concernant le remboursement des garanties constituées par cette société ; que, dès lors, les conclusions de ladite société ne sont, sur ce point, pas recevables ;
Sur les conclusions de la requête tendant à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée assignés à la société requérante au titre de la période du 1er janvier 1968 au 31 décembre 1971 :
En ce qui concerne la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux prestations de services facturées à la société anonyme Grands garages catésiens par la société des Etablissements Juster : Cons. que la déductibilité, prévue à l'article 271 du code général des impôts, de la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'opérations imposables est subordonnée, dans le cas de services facturés à l'entreprise, à la condition, qui découle notamment des dispositions combinées du 2 de l'article 272 et du 4 de l'article 283 du même code, que les sommes facturées constituent la contrepartie de services effectivement rendus à l'entreprise, et dont celle-ci peut justifier ;
Cons. que la société Grands garages cartésiens soutient que les rémunérations, s'élevant au total à 849 325 F, qu'elle a payées, entre le 1er juin 1969 et le 31 décembre 1971, à la société Etablissements Juster, qui détenait 61 % des actions composant son capital social, ont été regardées à tort par l'administration comme n'ouvrant droit qu'à concurrence de 255 000 F, à la déduction des taxes facturées, dès lors que, même à supposer leur montant excessif, ces rémunérations ont constitué la contrepartie de prestations de services qui lui ont été effectivement rendus par la société Etablissements Juster ;
Cons., d'une part, que le différend portait sur une matière qui n'est pas au nombre de celles qui, en vertu des dispositions combinées, alors en vigueur, du 3 de l'article 287 et du 3 de l'article 1649 quinquies A du code général des impôts, pouvaient être soumises à la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que, dès lors, si la commission a néanmoins émis un avis partiellement favorable à la société requérante, celle-ci ne saurait utilement s'en prévaloir ;
Cons., d'autre part, que les factures établies par la société Etablissements Juster n'étaient pas assorties de précisions suffisantes pour permettre d'apprécier la réalité des services rendus ; que si, pour justifier de la réalité de ces services qui lui auraient été rendus par la société Etablissements Juster, la société Grands garages catésiens indique que, par délibération du 21 janvier 1970, son conseil d'administration a décidé d'allouer à la société Etablissements Juster une rémunération mensuelle forfaitaire de 30 000 F hors taxes à partir du 1er juillet 1969, elle n'a produit, ni lors de la vérification, ni devant le juge de l'impôt, aucun contrat, aucun document ou correspondance, ou aucun autre élément probant relatifs à la nature et à l'étendue des tâches qu'elle aurait confiées à ladite société en contrepartie de la rémunération ci-dessus mentionnée ; qu'ainsi, la réalité des prestations alléguées ne peut être regardée comme justifiée ; que l'administration ayant été, dès lors, en droit de refuser la déduction de la totalité des taxes facturées, la société requérante ne saurait se plaindre de ce que cette déduction n'a été admise que partiellement ;
En ce qui concerne l'imposition d'acomptes sur commandes résiliées : Cons. qu'aux termes de l'article 256 du code général des impôts, dans sa rédaction en vigueur à partir du 1er janvier 1968, et pendant toute la période soumise à vérification : " 1. Les affaires faites en France ... sont passibles de la taxe sur la valeur ajoutée lorsqu'elles relèvent d'une activité de nature industrielle ou commerciale, quels qu'en soient les buts ou les résultats ... ", et qu'aux termes de l'article 269 du même code, dans sa rédaction en vigueur à partir de la même date, et pendant la même période : " 1. Le fait générateur de la taxe sur la valeur ajoutée est constituée : a En ce qui concerne les achats, les ventes et les livraisons, par la livraison de la marchandise ;
g Pour toutes les autres opérations, par l'encaissement du prix ou de la rémunération ... " ;
Cons. qu'il résulte de l'instruction que le client qui passait commande d'un véhicule à la société Grands garages catésiens versait, à la signature du contrat, un acompte à valoir sur le prix stipulé et n'était pas en droit, en vertu du contrat, de se dédire moyennant l'abandon de cet acompte ; que, toutefois, la pratique constamment suivie par la société, dans tous les cas où un client s'abstenait de prendre livraison du véhicule et d'acquitter le complément de prix dans le délai convenu, consistait à conserver définitivement le montant de l'acompte qui lui avait été versé par le client défaillant ;
Cons., d'une part, qu'en se procurant ainsi des profits qui pouvaient être regardés comme réparant forfaitairement le préjudice causé par la défaillance de certains clients à la bonne marche de son activité de négoce, la société a réalisé des affaires au sens des dispositions précitées de l'article 256 du code ;
Cons., d'autre part, que, ces affaires ne comportant ni livraisons, ni ventes, le fait générateur de la taxe sur la valeur ajoutée à laquelle elles doivent être soumises est, en vertu des dispositions précitées du g de l'article 269 du code " l'encaissement " ; qu'en l'espèce, " l'encaissement " résulte non du versement initial opéré à titre d'acompte par le client, et dont celui-ci a donc été crédité dans les écritures de la société, mais d'un paiement par compensation réalisé d'office par la société à son propre profit le jour où, estimant pouvoir ne rien rembourser au client défaillant, elle doit, dans ses écritures, débiter le client de la somme dont elle l'avait initialement crédité ; qu'il est constant que pareilles compensations ont eu lieu après le 1er janvier 1968 ; que, dès lors, les sommes dont s'agit ont été à bon droit soumises à la taxe sur la valeur ajoutée ;
Cons., il est vrai, que, selon la société, l'imposition en litige ferait double emploi avec la taxe locale sur le chiffre d'affaires à laquelle elle soutient que les acomptes versés par ses clients avant le 1er janvier 1968 auraient été soumis en vertu de la législation alors applicable ; qu'à tout le moins, la société demande que la taxe locale ainsi payée soit imputée sur le montant de la taxe sur la valeur ajoutée qui lui est réclamée ; que ces prétentions, qui ne peuvent trouver appui dans aucune des dispositions, alors en vigueur, du code général des impôts, ni dans celles, de caractère transitoire, du décret n° 67-464 du 17 juin 1967, pris pour l'application de l'article 53 de la loi susvisée du 10 janvier 1966, non plus que dans aucune disposition législative ou réglementaire, doivent, en tout état de cause, être écartées ;
Cons. qu'il résulte de tout ce qui précède que la société anonyme Grands garages catésiens n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande en décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 1968 au 31 décembre 1971 ;
rejet .