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26/07/1985 | FRANCE | N°45149

France | France, Conseil d'État, 7/8/9 ssr, 26 juillet 1985, 45149


Requête de la société lefebure Isolants Réunis, tendant à :
1° l'annulation du jugement du 21 juin 1982, par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 1976, en tant qu'elles résultent de la réintégration d'une somme de 562 780 F correspondant aux indemnités de congé payé versées en raison des rémunérations perçues par les salariés de l'entreprise Les Isolants Réunis et de la sociét

é Mécanique et Plastique de Touraine avant le 31 décembre 1975 ;
2° la décharge ...

Requête de la société lefebure Isolants Réunis, tendant à :
1° l'annulation du jugement du 21 juin 1982, par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 1976, en tant qu'elles résultent de la réintégration d'une somme de 562 780 F correspondant aux indemnités de congé payé versées en raison des rémunérations perçues par les salariés de l'entreprise Les Isolants Réunis et de la société Mécanique et Plastique de Touraine avant le 31 décembre 1975 ;
2° la décharge de l'imposition contestée de ce chef ;
Vu le code du travail ; le code général des impôts ; le code des tribunaux administratifs ; l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ; la loi du 30 décembre 1977 ; l'article 93-II de la loi n° 83-1179 du 29 décembre 1983, portant loi de finances pour 1984 ;
Considérant qu'après avoir bénéficié, à compter du 1er janvier 1976, de l'apport des éléments du fonds de commerce exploité par l'entreprise individuelle Les Isolants Réunis, la société anonyme Lefebure, devenue à la suite de cette opération la société anonyme Lefebure Isolants Réunis, a, par acte du 27 janvier 1977, absorbé par fusion, avec effet également au 1er janvier 1976, la société anonyme Mécanique et Plastique de Touraine M.P.T. ; qu'à la suite d'une vérification de comptabilité, l'administration a, notamment, réintégré dans les bénéfices imposables de la société Lefebure Isolants Réunis, au titre de l'exercice clos en 1976, une somme de 562 780 F, correspondant au montant des indemnités de congés payés versées par cette société, au cours dudit exercice, à raison de l'accomplissement de périodes de travail effectuées par les salariés tant de l'entreprise Les Isolants Réunis que de la société Mécanique et Plastique de Touraine entre le 1er juin 1975 et le 31 décembre 1975, soit avant que l'apport ou la fusion susmentionnés prennent effet ; que la société Lefebure Isolants Réunis demande la décharge, de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie de ce chef, au titre de l'année 1976, ainsi que des pénalités correspondantes ;
Cons. qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 122-12 du code du travail : " s'il survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise ", et qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts, dans sa rédaction issue de l'article 25 de la loi du 9 juillet 1970, et rendu applicable à l'impôt sur les sociétés par l'article 209 du même code : " 1. le bénéfice net est établi, sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant ... 1°. Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'oeuvre ... L'indemnité pour congés payés, calculée dans les conditions définies aux articles L. 223-11 à L. 223-13 du code du travail, revêt du point de vue fiscal le caractère d'un salaire de substitution qui constitue une charge normale de l'exercice au cours duquel le salarié prend le congé correspondant " ;
Cons. qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 39 du code que les obligations découlant pour l'employeur de la législation relative aux congés peuvent être portées en charge par celui-ci, non au fur et à mesure de l'accomplissement des périodes de travail entrant en compte pour la détermination du droit au congé annuel, mais à compter seulement, dans le cas normal, du jour où le salarié est admis à jouir dudit congé annuel, et que, dans le cas où un accord intervient entre l'employeur et son personnel pour substituer à la jouissance du congé payé le versement de l'indemnité compensatrice, celle-ci ne peut légalement être portée en charge que de l'exercice au cours duquel elle devient liquide et exigible ; que, la circonstance qu'à la suite d'une fusion ou d'un apport cette charge légale se trouve supportée par la société absorbante ou bénéficiaire de l'apport en vertu des dispositions précitées de l'article L. 122-12 du code du travail n'est pas de nature, eu égard au caractère général des dispositions également précitées de l'article 39 du code, à modifier la règle susénoncée d'imputation à l'exercice au cours duquel elles sont exposées des charges correspondant au montant des droits et indemnités dont s'agit ;
Cons. qu'il résulte de ce qui précède que la société requérante était fondée, en application des dispositions précitées de l'article 39 du code général des impôts, à porter en charge déductible des résultats de l'exercice clos en 1976 les indemnités de congé payé qu'elle a versées au cours dudit exercice à raison de l'accomplissement, antérieurement au 31 décembre 1975, de périodes de travail par les salariés de l'entreprise Les Isolants Réunis et de la société Mécanique et Plastique de Touraine ; que, l'administration ne peut, dès lors, utilement se prévaloir d'une interprétation contraire exprimée dans une instruction ministérielle, en date du 23 octobre 1976 ; que, si elle excipe également de ce qu'elle a pris l'initiative de déduire pour l'établissement de l'imposition à l'impôt sur le revenu dû par les propriétaires indivis de l'entreprise Les Isolants Réunis, au titre de l'exercice clos en 1975, une fraction des indemnités de congés payés en litige, cette remise accordée à des contribuables distincts de la société requérante est sans influence sur l'imposition de cette dernière société ;
Cons. que, de tout ce qui précède, il résulte que la société Lefebure les Isolants Réunis est fondée à soutenir que c'est à tort, que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de l'imposition contestée en tant qu'elle procède de la réintégration dans les résultats de son exercice clos en 1976 de la somme susmentionnée de 562 780 F, et des pénalités y afférentes ; ... annulation du jugement, décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie, au titre de l'année 1976, en tant qu'elle procède de la réintégration dans les résultats de son exercice clos au cours de la même année, d'une somme de 562 780 F, ainsi que des pénalités correspondantes .N
1 Comp. en ce qui concerne l'inclusion des droits à congés payés acquis par les salariés dans le prix de revient des stocks : Plén., n° 75.318, 20 déc. 1972, p. 817.


Sens de l'arrêt : Annulation totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-02-01-04-05,RJ1 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - DETERMINATION DU BENEFICE NET - CHARGES SALARIALES -Rémunérations versées aux salariés en activité - Charges correspondant aux indemnités pour congés payés - Imputation à l'exercice au cours duquel elles sont exposées [1] - Charges supportées par une société absorbante, les droits à congé ayant été acquis au sein de l'entreprise absorbée.

19-04-02-01-04-05 Il résulte des dispositions de l'article 39-1 5° du code que les obligations découlant pour l'employeur de la législation relative aux congés payés peuvent être portées en charges par celui-ci, non au fur et à mesure de l'accomplissement des périodes de travail entrant en compte pour la détermination du droit au congé annuel, mais à compter seulement, dans le cas normal, du jour où le salarié est admis à jouir dudit congé annuel, et que, dans le cas où un accord intervient entre l'employeur et son personnel pour substituer à la jouissance du congé payé le versement de l'indemnité compensatrice, celle-ci ne peut légalement être portée en charges que de l'exercice au cours duquel elle devient liquide et exigible. La circonstance qu'à la suite d'une fusion ou d'un apport cette charge légale se trouve supportée par la société absorbante ou bénéficiaire de l'apport en vertu des dispositions de l'article L. 122-12 du code du travail n'est pas de nature, eu égard au caractère général des dispositions de l'article 39-1 5° du code, à modifier la règle d'imputation à l'exercice au cours duquel elles sont exposées des charges correspondant au montant des droits et indemnités dont s'agit. Société ayant reçu en apport un fonds de commerce individuel et absorbé par voie de fusion une S.A., les traités d'apport et de fusion stipulant une rétroactivité au 1er janvier 1976. Cette société était fondée, en application de l'article 39-1 5° précité, à porter en charges déductibles des résultats de l'exercice clos en 1976 les indemnités de congés payés versées au cours dudit exercice à raison de l'accomplissement, antérieurement au 31 décembre 1975, de périodes de travail par les salariés des entreprises apportées et absorbées.


Références :

CGI 39 1 1, 209 1, 39 1 5
Code du travail L122-12 al. 2
Instruction du 23 octobre 1976 Finances
Loi 70-601 du 09 juillet 1970 art. 25

1. Comp. en ce qui concerne l'inclusion des droits à congés payés acquis par les salariés dans le prix de revient des stocks : Plénière, 75318, 1972-12-20, p. 817


Publications
Proposition de citation: CE, 26 jui. 1985, n° 45149
Publié au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. de Bresson
Rapporteur ?: M. Ph. Martin
Rapporteur public ?: M. Bissara

Origine de la décision
Formation : 7/8/9 ssr
Date de la décision : 26/07/1985
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 45149
Numéro NOR : CETATEXT000007621033 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1985-07-26;45149 ?
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