Recours du ministre du budget, tendant :
1° à l'annulation du jugement du 7 décembre 1981, par lequel le tribunal administratif de Lille a accordé à la société Stenval la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée auquel elle a été assujettie pour la période du 1er janvier 1970 au 31 août 1974, par avis de mise en recouvrement, en date du 9 février 1976 ;
2° à la remise intégrale de l'imposition contestée à la charge de la société Stenval ;
Vu le code général des impôts ; le code des tribunaux administratifs ; l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ; la loi du 30 décembre 1977 ;
Considérant que le ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget demande l'annulation de l'article 2 du jugement, en date du 7 décembre 1981, par lequel le tribunal administratif de Lille a accueilli la demande de la société anonyme " Stenval " qui exploitait une fabrique de produits laitiers, tendant à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie, pour un montant de 205 174,33 F, au titre de la période du 1er janvier 1970 au 31 août 1974 ainsi que des indemnités de retard correspondantes ; qu'à l'appui du recours, le ministre soutient que la société n'était pas en droit, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée grevant les ventes des produits par elle rétrocédés, après transformation, aux agriculteurs, pour leur consommation familiale, la taxe que lui facturaient lesdits agriculteurs, sur leurs livraisons de lait, en vue de cette transformation et de cette rétrocession ;
Cons. qu'aux termes de l'article 298 ter du code général des impôts, dans sa rédaction en vigueur au cours de la période d'imposition : " En ce qui concerne les ventes à des agriculteurs pour les besoins de leur consommation familiale, de produits fabriqués par des entreprises de transformation à partir de produits agricoles fournis par ces agriculteurs la taxe sur la valeur ajoutée n'est due que sur la différence entre la valeur des produits fabriqués et celle des produits correspondants fournis par les agriculteurs auxquels la vente est consentie " ; et qu'aux termes de l'article 298 quater du même code : " Les exploitants agricoles qui ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée au titre, soit de l'article 257-4°, 1er alinéa, soit des articles 257-4° bis et 4° ter, soit de l'article 260-1-3°, bénéficient ..., sur option de leur part, d'un remboursement forfaitaire " ;
Cons., d'une part, qu'il résulte de l'ensemble des dispositions précitées du code que celles de l'article 298 ter avaient, au cours de la période d'imposition, pour corollaire nécessaire que les opérations portant sur la fourniture par les agriculteurs de produits en vue de leur rétrocession, après transformation, devaient toutes être regardées comme placées hors du champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'à l'égard des opérations portant sur les produits dont s'agit, lesdits agriculteurs n'étaient, dès lors, pas en droit, quel que soit leur régime d'assujettissement à la taxe, de faire figurer celle-ci sur les factures adressées par eux aux entreprises assurant cette transformation ;
Cons., d'autre part, qu'aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération " ; que, selon l'article 223 de l'annexe II audit code, pris sur le fondement de l'article 273 du même code, la taxe dont les entreprises peuvent opérer la déduction est celle qui figure sur les factures d'achats délivrées par leurs fournisseurs " dans la mesure où ces derniers étaient légalement autorisés à la faire figurer sur lesdites factures " ; qu'il résulte de ces dispositions que la société Stenval qui, eu égard à l'activité qu'elle exerçait et à l'objet des rétrocessions, ne pouvait ignorer le sens et la portée des dispositions précitées de l'article 298 ter du code, n'était en droit d'opérer aucune déduction de taxe sur la valeur ajoutée à raison des livraisons du lait destiné à sa transformation et à sa rétrocession aux producteurs en vue de leur consommation familiale, alors même que la taxe aurait indûment figuré sur les factures établies par ceux-ci à raison desdites livraisons ;
Cons. qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a accordé à la société Stenval, à concurrence de la somme de 205 174,33 F, décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 1970 au 31 août 1974, ainsi que des indemnités de retard y afféren- tes ;
annulation de l'article 2 du jugement ; remise à la charge de la société des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie, assortis des indemnités de retard correspondantes, à concurrence des sommes de 205 174,33 F de droits en principal et de 49 347,94 F d'indemnités de retard.