Requête de M. X... tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° réforme le jugement du 3 décembre 1980 du tribunal administratif de Rennes condamnant l'Etat à lui verser une indemnité de 79 450 F qu'il estime insuffisante en réparation du préjudice qu'il a subi du fait des opérations de remembrement qui ont été entreprises dans la commune de Sainte-Sève ;
2° condamne l'Etat à lui verser la somme de 825 457 F ;
3° subsidiairement ordonne une expertise aux fins d'évaluer les préjudices subis par l'intéressé ;
Vu le code des tribunaux administratifs ; la loi du 28 pluviôse an VIII et l'article 10 de la loi du 8 août 1962 ; l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ; la loi du 30 décembre 1977 ;
Considérant que par décision en date du 2 juin 1978, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a jugé, à la demande de Mme Y... et de M. X..., qu'il appartenait à la commission départementale de remembrement du Finistère, si elle estimait impossible de procéder à une répartition des terres conforme aux dispositions de l'article 19 du code rural, de renoncer à toute opération de remembrement sur le territoire de la commune de Sainte-Sève ; que saisie à nouveau de la réclamation initiale de M. X..., la commission départementale a décidé, le 25 mai 1979, de maintenir les attributions antérieures de l'intéressé et de lui octroyer une indemnité de 15 890 F mise à la charge de l'Etat, maître d'ouvrage de la voie express Brest-Morlaix ; que M. X..., qui n'a pas déféré cette nouvelle décision de la commission départementale au tribunal administratif, a demandé à ce dernier que l'indemnité mise à la charge de l'Etat soit portée à 825 457 F en réparation d'une part des conséquences dommageables résultant pour lui des illégalités affectant les opérations de remembrement relatives à ses propriétés, d'autre part des préjudices subis du fait de l'existence de l'ouvrage routier ;
Sur l'exception d'irrecevabilité opposée par le ministre des transports à la demande de première instance : Cons. que le ministre des transports ne peut utilement se prévaloir de ce que le moyen tiré d'une prétendue violation de l'article 21 du code rural n'aurait pas été soumis à la commission départementale pour soutenir que la demande d'indemnité formée par M. X... en réparation du préjudice qu'il aurait subi à ce titre n'était pas recevable ;
Sur la responsabilité encourue par l'Etat en raison des violations du code rural par la commission départementale de remembrement du Finistère : Cons., d'une part, que le Conseil d'Etat ayant annulé la décision de la commission départementale de remembrement du Finistère en date du 31 juillet 1974, celle-ci ne pouvait se dispenser de l'obligation qui lui incombait d'exécuter la décision du Conseil d'Etat, au motif qu'il était " impossible techniquement de corriger l'éloignement des attributions du requérant sans placer d'autres propriétaires dans une situation identique à la présente " ; qu'en décidant de maintenir, en violation des dispositions de l'article 19 du code rural, les attributions antérieures de M. X..., plus éloignées du centre d'exploitation que les apports, et de lui octroyer une indemnité de 15 890 F, la commission départementale a méconnu l'autorité de la chose jugée qui s'attache aux décisions du Conseil d'Etat et commis une faute qui engage la responsabilité de l'Etat et dont M. X... est fondé à demander réparation ;
Cons., d'autre part, qu'il résulte de l'instruction que M. X... a reçu des attributions situées pour la plupart au sud de la voie express Brest-Morlaix alors que ses bâtiments d'exploitation sont situés au nord de celle-ci, et qu'il en est résulté un déséquilibre dans ses conditions d'exploitation ; que M. X... est, par suite, fondé à demander réparation de ce préjudice ;
Cons., en revanche, que M. X..., s'il se plaint de la perte de certaines parcelles situées le long de la voie communale n° 3 et de la mauvaise qualité de certaines des parcelles qui lui ont été attribuées, n'établit pas que la règle d'équivalence en valeur de productivité réelle entre ses apports et ses attributions, posée par l'article 21 du code rural, ait été méconnue ;
Cons. qu'il sera fait une exacte appréciation du préjudice direct et certain résultant pour M. X... de l'aggravation des conditions de son exploitation du fait de l'illégalité des opérations de remembrement le concernant, en portant de 79 450 F à 100 000 F la somme que l'Etat est condamné à lui payer ;
Sur la responsabilité encourue par l'Etat en raison des préjudices qu'aurait subis M. X... du fait de la création de la voie expresse Brest-Morlaix : Cons. que M. X... n'établit ni que les terrains et les bâtiments agricoles de son exploitation aient subi, du fait de la création de la voie expresse Brest-Morlaix, une perte de valeur vénale constitutive d'un préjudice anormal et spécial de nature à lui ouvrir droit à indemnité, ni que la construction des nouveaux bâtiments d'exploitation et de la nouvelle maison d'habitation qu'il a fait réaliser au sud de la voie soit la conséquence directe et nécessaire de la création de cette voie qu'il peut franchir par un passage supérieur ; que, dès lors, ses conclusions fondées sur l'existence de cet ouvrage public, doivent être rejetées ;
indemnité de 79 450 F portée à 100 000 F ; réformation du jugement en ce sens ; rejet du surplus des conclusions de la requête .N
1 Cf. Ministre de l'agriculture c/ Mme Y... et autre, 2 juin 1978, p. 229.