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03/03/1982 | FRANCE | N°19218

France | France, Conseil d'État, 4 / 1 ssr, 03 mars 1982, 19218


Requête du syndicat intercommunal Lyon Saint-Fons, Vénissieux et du comité de gestion de la piscine intercommunale de Lyon Saint-Fons, Vénissieux, tendant :
1° à l'annulation du jugement du 29 mai 1979 du tribunal administratif de Lyon rejetant leur demande tendant à la condamnation de M. X..., architecte, et de l'entreprise Queffelec à réparer les conséquences dommageables du sinistre survenu dans la couverture mobile du centre nautique régional ;
2° à la condamnation de M. X... et de la société Queffelec, à verser : la somme de 674 864 F au syndicat intercommunal de

Lyon Saint-Fons, Vénissieux, augmentée des intérêts au taux légal, à...

Requête du syndicat intercommunal Lyon Saint-Fons, Vénissieux et du comité de gestion de la piscine intercommunale de Lyon Saint-Fons, Vénissieux, tendant :
1° à l'annulation du jugement du 29 mai 1979 du tribunal administratif de Lyon rejetant leur demande tendant à la condamnation de M. X..., architecte, et de l'entreprise Queffelec à réparer les conséquences dommageables du sinistre survenu dans la couverture mobile du centre nautique régional ;
2° à la condamnation de M. X... et de la société Queffelec, à verser : la somme de 674 864 F au syndicat intercommunal de Lyon Saint-Fons, Vénissieux, augmentée des intérêts au taux légal, à compter de la requête introductive d'instance, et des intérêts des intérêts ; la somme de 409 124,22 F au comité de gestion de la piscine intercommunale de Lyon Saint-Fons, Vénissieux, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la requête introductive d'instance et des intérêts des intérêts ;
Vu le code civil ; le décret n° 41-29 du 24 septembre 1941 ; l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ; la loi du 30 décembre 1977 ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le 11 février 1974 la toile constituant la couverture amovible de la piscine édifiée par l'entreprise Queffelec, suivant un système conçu et breveté par M. X..., architecte, pour le compte du syndicat intercommunal de Lyon, Saint-Fons et Vénissieux, s'est déchirée sous l'effet d'un vent violent, ne présentant pas le caractère d'un événement de force majeure, et a endommagé dans sa chute certaines installations de la piscine ;
Sur les conclusions dirigées contre l'entreprise Queffelec : Cons. qu'il résulte des stipulations de la soumission du 16 mai 1969 souscrite par l'entreprise Queffelec, que la commune intention des parties contractantes a été de substituer à la garantie décennale une garantie contractuelle de deux ans seulement sur les prestations concernant les structures mobiles de couverture de la piscine, cette garantie s'appliquant à compter de la réception provisoire de cet ouvrage ;
Cons. cependant, compte tenu d'une part, de l'impossibilité constatée de procéder à une réception provisoire avant le 5 octobre 1970, date d'ouverture de l'installation au public, d'autre part, des nombreuses mises en demeure adressées à l'entreprise Queffelec postérieurement à cette date, et enfin, du caractère des interventions auxquelles elle a dû procéder, que la garantie n'a pu commencer à courir que le 3 octobre 1972 date de la réception définitive ; qu'au 11 février 1974, date du sinistre, le délai de garantie n'était pas expiré ; qu'ainsi c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a considéré que l'action en garantie n'était pas recevable à l'égard de l'entreprise Queffelec ;
Sur les conclusions dirigées contre M. X... : Cons. que le système de couverture mis en oeuvre constituait un élément de l'édifice dont les vices ou la ruine étaient de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination particulière ; qu'en application des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil les avaries subies par cette couverture étaient de nature à engager la responsabilité décennale des constructeurs ;
Cons. qu'aux termes de l'article 3 du décret n° 41-29 du 24 septembre 1941, en vigueur au moment de la signature du marché, " l'architecte dirige et surveille les travaux ; il s'assure que ceux-ci sont conduits conformément aux plans et devis descriptifs qu'il a adressés et aux moyens d'exécution qu'il a prescrit " ; et qu'aux termes du contrat d'architecte signé le 23 mai 1965, M. X... " en qualité de maître d'oeuvre, assure la direction et la responsabilité de la mise au point des études, plans et projets, l'organisation, la coordination et la surveillance des travaux relatifs à l'édification du centre de natation expérimental de Vénissieux " ;
Cons. qu'il résulte de l'instruction que, M. X... s'est limité aux études de principe et n'a exercé qu'un contrôle insuffisant sur les études d'exécution alors qu'il lui appartenait, tant en application des dispositions ci-dessus mentionnées qu'en raison du caractère expérimental d'une réalisation dont il était l'inventeur, d'exercer une surveillance particulièrement vigilante ; que les désordres constatés se rattachent aux défaillances ainsi manifestées par l'architecte dans l'accomplissement de sa mission ; que par suite c'est à tort que le tribunal administratif a jugé que la responsabilité de ce dernier ne pouvait pas être retenue ;
Sur la solidarité : Cons. que si l'entreprise Queffelec est condamnée au titre de sa responsabilité contractuelle, substituée par l'accord des parties à sa responsabilité décennale, les vices relevés à sa charge étaient, par leur nature, de ceux qui auraient engagé sa responsabilité décennale en l'absence de cette substitution ; qu'il y a bien lieu dans ces conditions de prononcer la responsabilité conjointe et solidaire de l'entreprise Queffelec et de M. X... ;
Sur les préjudices : Cons. que le syndicat intercommunal de Lyon, Saint-Fons, Vénissieux, réclame une indemnité de 491 763,14 F au titre des frais de remise en état de l'installation ; que cette évaluation n'est pas contestée quant à son montant ; que, cependant, compte tenu du paiement d'une somme de 136 775 F par la société d'assurance de l'entreprise Queffelec le syndicat avait ramené, en première instance, sa demande initiale à la somme de 354 988,14 F ; qu'il n'est ni recevable ni fondé à présenter en appel une demande plus élevée ; que, dans les circonstances de l'espèce il sera fait une exacte appréciation du préjudice subi par le syndicat intercommunal, au titre des frais de remise en état, en condamnant solidairement, M. X... et l'entreprise Queffelec à verser au syndicat intercommunal une indemnité de 354 988, 14 F ;
Cons. que le syndicat intercommunal réclame en outre une indemnité de 183 100,86 F représentant le déficit de l'établissement pendant la période où il a dû fermer ses portes ; qu'il produit un décompte qui n'est qu'un simple état de la trésorerie du comité de gestion à la fin de l'exercice 1975 et qui ne saurait établir un déficit d'exploitation subi en liaison avec le sinistre ; que la perte de recettes alléguée postérieurement à la fermeture de l'installation n'est d'ailleurs pas établie ; que cette demande doit donc être rejetée ;
Cons. que le comité de gestion de la piscine intercommunale de Lyon, Saint-Fons, Vénissieux, qui n'était pas partie aux contrats n'est pas recevable à présenter des conclusions fondées sur une responsabilité née des conditions d'exécution de ces contrats ;
Sur les intérêts et les intérêts des intérêts : Cons. que le syndicat intercommunal a droit aux intérêts de la somme de 354 988,14 F à compter du 29 janvier 1976, date de l'enregistrement de sa demande devant le tribunal administratif de Lyon ;
Cons. que la capitalisation des intérêts a été demandée le 20 novembre 1978 et le 14 décembre 1979 ; qu'à chacune de ces dates il était dû au moins une année d'intérêts ; que dès lors conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à ces demandes ;
Sur les dépens de première instance : Cons. que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre les frais exposés au titre des dépens de première instance à la charge de M. X... et de l'entreprise Queffelec ;
annulation du jugement ; M. X... et l'entreprise Queffelec condamnés solidairement à verser au syndicat intercommunal de Lyon, Saint-Fons, Vénissieux 354 988,14 F avec intérêts au taux légal à compter du 29 janvier 1976. Les intérêts échus les 20 novembre 1978 et 14 décembre 1979 seront capitalisés à ces dates pour produire eux-mêmes intérêts ; rejet du surplus des conclusions du syndicat intercommunal de Lyon, Saint-Fons, Vénissieux et des conclusions du comité de gestion de la piscine intercommunale de Lyon, Saint-Fons, Vénissieux, dépens de première instance à la charge de M. X... et l'entreprise Queffelec .


Synthèse
Formation : 4 / 1 ssr
Numéro d'arrêt : 19218
Date de la décision : 03/03/1982
Sens de l'arrêt : Annulation totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - ARCHITECTES ET ENTREPRENEURS - RESPONSABILITE CONTRACTUELLE - Substitution de la responsabilité contractuelle à la responsabilité décennale - Interprétation de la commune intention des parties - Point de départ du délai de garantie.

39-06-02 Si la commune intention des parties au contrat a été de substituer, en ce qui concerne les structures mobiles de couvertue de la piscine, objet du contrat, à la garantie décennale une garantie contractuelle de deux ans et cette garantie devant s'appliquer à compter de la réception provisoire de l'ouvrage, la garantie relative à ces structures mobiles n'a pu toutefois compte tenu notamment du fait que la réception provisoire n'a pu être prononcée, commencer à courir qu'à compter de la réception définitive.

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - ARCHITECTES ET ENTREPRENEURS - RESPONSABILITE DECENNALE - DESORDRES DE NATURE A ENGAGER LA RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS - DESORDRES AYANT CE CARACTERE - Surveillance insuffisante par l'architecte des études d'exécution ayant eu pour conséquence le déchirement du toit d'une piscine.

39-06-03-03-02 L'architecte s'étant limité aux études de principe et n'ayant exercé qu'un contrôle insuffisant sur les études d'exécution alors qu'il lui appartenait d'exercer une surveillance particulièrement vigilante en raison notamment du caractère expérimental d'une réalisation dont il était l'inventeur, les désordres qui ont affecté la couvertue mobile de la piscine de V. et qui se rattachent aux défaillances manifestées par l'architecte dans l'accomplissement de sa mission étaient de nature à engager la responsabilité décennale de ce dernier.

- RJ1 MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - ARCHITECTES ET ENTREPRENEURS - REPARATION - RESPONSABILITE SOLIDAIRE - Condamnation solidaire de l'entrepreneur et de l'architecte déclarés responsables - l'un sur le fondement contractuel - l'autre au titre de la garantie décennale [RJ1].

39-06-04-01 Le juge administratif peut prononcer la condamnation solidaire, envers le maître de l'ouvrage, d'un architecte déclaré responsable sur le terrain de la garantie décennale et d'un entrepreneur déclaré responsable sur le terrain de la responsabilité contractuelle, substituée à la responsabilité décennale par l'accord des parties, à la condition que les vices relevés à la charge de ce dernier fussent, par leur nature, de ceux qui auraient engagé sa responsabilité décennale en l'absence de cette substitution.


Références :

Code civil 1154
Code civil 1792
Code civil 2270
Décret 41-29 du 24 septembre 1941 art. 3

1. RAPPR. Ville de Joinville, 1975-11-26, T. p. 1141


Publications
Proposition de citation : CE, 03 mar. 1982, n° 19218
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Gazier
Rapporteur ?: M. Gardent
Rapporteur public ?: M. Pauti

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1982:19218.19820303
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