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09/11/2017 | CJUE | N°C-205/16

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, SolarWorld AG contre Conseil de l'Union européenne., 09/11/2017, C-205/16


ARRÊT DE LA COUR (neuvième chambre)

9 novembre 2017 ( *1 )

« Pourvoi – Subventions – Règlement d’exécution (UE) no 1239/2013 – Article 2 – Importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et leurs composants essentiels (cellules) originaires ou en provenance de Chine – Droit compensateur définitif – Exonération des importations faisant l’objet d’un engagement accepté – Caractère détachable »

Dans l’affaire C‑205/16 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Co

ur de justice de l’Union européenne, introduit le 11 avril 2016,

SolarWorld AG, établie à Bonn (Allemagne), représentée ...

ARRÊT DE LA COUR (neuvième chambre)

9 novembre 2017 ( *1 )

« Pourvoi – Subventions – Règlement d’exécution (UE) no 1239/2013 – Article 2 – Importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et leurs composants essentiels (cellules) originaires ou en provenance de Chine – Droit compensateur définitif – Exonération des importations faisant l’objet d’un engagement accepté – Caractère détachable »

Dans l’affaire C‑205/16 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 11 avril 2016,

SolarWorld AG, établie à Bonn (Allemagne), représentée par Me L. Ruessmann, avocat, et M. J. Beck, solicitor,

partie requérante,

les autres parties à la procédure étant :

Brandoni solare SpA, établie à Castelfidardo (Italie),

Solaria Energia y Medio Ambiente SA, établie à Madrid (Espagne), représentées par Me L. Ruessmann, avocat, et M. J. Beck, solicitor,

parties demanderesses en première instance,

Conseil de l’Union européenne, représenté par Mme H. Marcos Fraile, en qualité d’agent, assistée par Mme N. Tuominen, Avocată,

partie défenderesse en première instance,

Commission européenne, représentée par Mme A. Demeneix ainsi que par MM. J.-F. Brakeland et T. Maxian Rusche, en qualité d’agents,

China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products (CCCME), établie à Beijing (Chine), représentée par Mes J.-F. Bellis et A. Scalini, avocats, ainsi que par Me F. Di Gianni, avvocato,

parties intervenantes en première instance,

LA COUR (neuvième chambre),

composée de M. C. Vajda, président de chambre, MM. E. Juhász et C. Lycourgos (rapporteur), juges,

avocat général : M. E. Tanchev,

greffier : Mme L. Hewlett, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 9 mars 2017,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 1er juin 2017,

rend le présent

Arrêt

1 Par son pourvoi, SolarWorld AG demande l’annulation de l’ordonnance du Tribunal de l’Union européenne du 1er février 2016, SolarWorld e.a./Conseil (T‑142/14, non publiée, ci-après l’« ordonnance attaquée », EU:T:2016:68), dans la mesure où par celle-ci ce dernier a rejeté comme étant irrecevable le recours de SolarWorld, de Brandoni solare SpA et de Solaria Energia y Medio Ambiente SA tendant à l’annulation de l’article 2 du règlement d’exécution (UE) no 1239/2013 du Conseil, du 2 décembre 2013,
instituant un droit compensateur définitif sur les importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et leurs composants essentiels (cellules) originaires ou en provenance de la République populaire de Chine (JO 2013, L 325, p. 66, ci-après le « règlement litigieux »).

Le cadre juridique

Le règlement de base

2 L’article 13 du règlement (CE) no 597/2009 du Conseil, du 11 juin 2009, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet de subventions de la part de pays non membres de la Communauté européenne (JO 2009, L 188, p. 93, ci-après le « règlement de base »), intitulé « Engagements », dispose :

« 1.   À condition qu’un examen préliminaire positif ait établi l’existence d’une subvention et d’un préjudice, la Commission peut accepter des offres d’engagement volontaires et satisfaisantes en vertu desquelles :

a) le pays d’origine et/ou d’exportation accepte d’éliminer la subvention, de la limiter ou de prendre d’autres mesures relatives à ses effets ; ou

b) l’exportateur s’engage à réviser ses prix ou à ne plus exporter vers la zone en question des produits bénéficiant de la subvention passible de mesures compensatoires, en sorte que la Commission, après consultations spécifiques du comité consultatif, soit convaincue que l’effet préjudiciable de la subvention est éliminé.

Dans ce cas, et aussi longtemps que ces engagements restent en vigueur, les droits provisoires institués par la Commission conformément à l’article 12, paragraphe 3, et les droits définitifs institués par le Conseil conformément à l’article 15, paragraphe 1, ne s’appliquent pas aux importations du produit concerné fabriqué par les sociétés visées dans la décision de la Commission portant acceptation des engagements et ses modifications ultérieures.

Les augmentations de prix opérées en vertu de ces engagements ne doivent pas excéder ce qui est nécessaire pour compenser le montant de la subvention passible de mesures compensatoires, et elles doivent être moindres que le montant de la subvention passible de mesures compensatoires si elles suffisent à éliminer le préjudice causé à l’industrie communautaire.

[...]

9.   En cas de violation ou de retrait d’un engagement par une partie à celui-ci ou de retrait de l’acceptation de l’engagement par la Commission, l’acceptation de l’engagement est, après consultations, retirée par une décision ou un règlement de la Commission, selon le cas, et le droit provisoire institué par la Commission conformément à l’article 12 ou le droit définitif institué par le Conseil conformément à l’article 15, paragraphe 1, s’applique, à condition que l’exportateur concerné, ou le
pays d’origine et/ou d’exportation, sauf dans le cas du retrait de l’engagement par l’exportateur ou le pays en question, ait eu la possibilité de présenter ses commentaires.

[...] »

Le règlement litigieux

3 Aux termes du considérant 753 du règlement litigieux, « [d]es parties intéressées ont signalé que l’élasticité-prix de la demande pouvait être très importante [...] S’il est exact qu’une augmentation importante des prix peut entraîner une baisse considérable de la demande [...] il est très improbable que les mesures entraînent des augmentations de prix importantes, et cela pour les raisons énoncées ci-après. [...] [L]’engagement qui a été accepté par la Commission aura une incidence économique en
ce sens que les producteurs-exportateurs chinois fourniront le produit concerné à un prix minimal à l’importation de moins de 60 c/W, ce qui est nettement inférieur au prix observé durant la période d’enquête, et dans des quantités correspondant grosso modo à leur part de marché actuelle. À ce niveau de prix, il est très improbable que la demande connaisse une baisse spectaculaire, car ce niveau de prix garantit une demande suffisante aux niveaux actuels de l’aide octroyée au titre des régimes de
soutien et aux niveaux actuels de la parité réseau. En outre, le prix de l’électricité pour les consommateurs finaux devrait augmenter, alors que le prix du produit concerné devrait baisser. L’engagement prévoit une formule d’indexation qui garantit que les futures diminutions de prix du produit seront prises en compte dans le calcul du prix minimal à l’importation ».

4 Selon l’article 1er, paragraphe 1, du règlement litigieux, il est institué un droit compensateur définitif sur les importations de modules ou de panneaux photovoltaïques en silicium cristallin et de cellules du type utilisé dans les modules ou les panneaux photovoltaïques en silicium cristallin, originaires ou en provenance de Chine et relevant de certains codes de la nomenclature combinée figurant à l’annexe I du règlement (CEE) no 2658/87 du Conseil, du 23 juillet 1987, relatif à la nomenclature
tarifaire et statistique et au tarif douanier commun (JO 1987, L 256, p. 1), dans sa version applicable lors de l’adoption du règlement litigieux (ci-après la « NC »). Le paragraphe 2 de cet article établit le taux du droit compensateur définitif applicable au prix net franco frontière de l’Union européenne, avant dédouanement, pour les produits décrits au paragraphe 1 dudit article et fabriqués par les sociétés que ce paragraphe 2 énumère.

5 Aux termes de l’article 2, paragraphe 1, du règlement litigieux, qui s’applique à certains produits dont les références sont spécifiées au regard de la NC et qui sont facturés par des sociétés dont la Commission a accepté des engagements et dont les noms figurent à l’annexe de la décision d’exécution 2013/707/UE de la Commission, du 4 décembre 2013, confirmant l’acceptation d’un engagement offert dans le cadre des procédures antidumping et antisubventions concernant les importations de modules
photovoltaïques en silicium cristallin et leurs composants essentiels (cellules) originaires ou en provenance de la République populaire de Chine pour la période d’application des mesures définitives (JO 2013, L 325, p. 214), les importations déclarées pour la mise en libre pratique sont exonérées du droit compensateur institué par l’article 1er du règlement litigieux si certaines conditions sont respectées.

6 L’article 2, paragraphe 2, du règlement litigieux énonce qu’une dette douanière naît au moment de l’acceptation de la déclaration de mise en libre pratique dès lors qu’il est établi qu’une ou plusieurs des conditions énoncées à l’article 2, paragraphe 1, de ce règlement n’ont pas été remplies ou lorsque la Commission retire son acceptation de l’engagement.

Les antécédents du litige

7 SolarWorld est un producteur européen de modules photovoltaïques en silicium cristallin et de leurs composants essentiels.

8 À la suite d’une plainte déposée par EU ProSun, une association de producteurs européens de modules photovoltaïques en silicium cristallin et de leurs composants essentiels, la Commission a publié, le 6 septembre 2012, un avis d’ouverture d’une procédure antidumping concernant les importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et leurs composants essentiels (cellules et wafers) originaires de la République populaire de Chine (JO 2012, C 269, p. 5).

9 Le 8 novembre 2012, la Commission a publié un avis d’ouverture d’une procédure antisubventions concernant les importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et leurs composants essentiels (cellules et wafers) originaires de la République populaire de Chine (JO 2012, C 340, p. 13).

10 Le 4 juin 2013, la Commission a adopté le règlement (UE) no 513/2013, instituant un droit antidumping provisoire sur les importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et leurs composants essentiels (cellules et wafers) originaires ou en provenance de la République populaire de Chine et modifiant le règlement (UE) no 182/2013 soumettant à enregistrement ces importations originaires ou en provenance de la République populaire de Chine (JO 2013, L 152, p. 5).

11 Par lettre adressée à la Commission le 27 juillet 2013, la China Chamber of Commerce for Import and Export of Machinery and Electronic Products (CCCME) [chambre de commerce chinoise pour l’importation et l’exportation de machines et de produits électroniques (CCCME), Chine] a soumis, dans le cadre de l’enquête antidumping, une offre d’engagement conjoint de plusieurs producteurs-exportateurs chinois. En substance, elle proposait, au nom de ceux-ci et en son nom propre, l’application de prix
minimaux à l’importation pour les modules photovoltaïques et pour chacun de leurs éléments essentiels (cellules et wafers) jusqu’à un certain niveau annuel d’importation (ci-après les « PMI »).

12 Le 2 août 2013, la Commission a adopté la décision 2013/423/UE, portant acceptation d’un engagement offert dans le cadre de la procédure antidumping concernant les importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et leurs composants essentiels (cellules et wafers) originaires ou en provenance de la République populaire de Chine (JO 2013, L 209, p. 26), par un groupe de producteurs-exportateurs chinois ayant coopéré, en concertation avec la CCCME, et qui sont énumérés en annexe à
ladite décision.

13 Le règlement (UE) no 748/2013 de la Commission, du 2 août 2013, portant modification du règlement no 513/2013 (JO 2013, L 209, p. 1), a été adopté afin de tenir compte de la décision 2013/423. Parmi d’autres modifications, il a introduit un article 6 dans le règlement no 513/2013, qui prévoit, pour autant que certaines conditions soient remplies, que les importations de certains produits déclarées pour la mise en libre pratique et facturées par des sociétés dont les engagements ont été acceptés
par la Commission et qui sont énumérées à l’annexe de la décision 2013/423 sont exonérées du droit antidumping provisoire institué à l’article 1er du règlement no 513/2013.

14 Par lettre du 25 septembre 2013, d’abord, la CCCME, en son nom propre ainsi qu’en tant que représentant des producteurs-exportateurs dont l’offre d’engagement initial avait été acceptée, a demandé à la Commission d’accepter les termes de cet engagement afin d’éliminer également les effets préjudiciables des importations faisant l’objet de subventions.

15 Le 4 décembre 2013, la Commission a adopté la décision d’exécution 2013/707.

16 Le 2 décembre 2013, le Conseil a adopté le règlement litigieux.

La procédure devant le Tribunal et l’ordonnance attaquée

17 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 28 février 2014, les requérantes en première instance ont introduit un recours tendant à l’annulation de l’article 2 du règlement litigieux.

18 À l’appui de leur recours, elles ont invoqué trois moyens. Les premier et deuxième moyens étaient tirés de ce que l’article 2 du règlement litigieux résulte d’une erreur manifeste d’appréciation et viole l’article 13 du règlement de base dans la mesure où cet article 2 exonère des mesures antisubventions les producteurs chinois pour lesquels la Commission a accepté un engagement conjoint illégal, en violation des droits de la défense des requérantes en première instance, de leur droit à un procès
équitable et du principe de bonne administration, ainsi que de l’article 13, paragraphe 4, et de l’article 29, paragraphe 2, du règlement de base. Le troisième moyen était tiré de ce que ledit article 2 viole l’article 101, paragraphe 1, TFUE dans la mesure où il accorde à certains producteurs chinois une exonération des mesures antisubventions sur la base d’une offre d’engagement, acceptée et confirmée par le règlement litigieux, qui constitue une entente horizontale sur les prix.

19 Par l’ordonnance attaquée, le Tribunal a rejeté comme étant irrecevable le recours des requérantes en première instance au motif que l’article 2 du règlement litigieux, seule disposition attaquée, n’était pas dissociable des autres dispositions de ce règlement.

Les conclusions des parties

20 Par son pourvoi, SolarWorld demande à la Cour :

– de déclarer que le pourvoi est recevable et fondé ;

– d’annuler l’ordonnance attaquée ;

– de statuer sur le fond et d’annuler l’article 2 du règlement litigieux, ou de renvoyer l’affaire devant le Tribunal pour que ce dernier se prononce sur le fond du recours en annulation, et

– de condamner le Conseil aux dépens.

21 Le Conseil demande à la Cour :

– de rejeter le pourvoi et

– de condamner la requérante aux dépens afférents au pourvoi et à la procédure devant le Tribunal.

22 La Commission demande à la Cour :

– de rejeter le pourvoi comme étant non fondé en droit et

– de condamner la requérante aux dépens.

Sur le pourvoi

23 À l’appui de son pourvoi, SolarWorld soulève deux moyens. Le premier est tiré d’une erreur qu’aurait commise le Tribunal en constatant que l’article 2 du règlement litigieux n’était pas dissociable du reste de ce règlement. Le second moyen est tiré d’une violation des articles 20 et 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »).

Sur le premier moyen, tiré du caractère détachable de l’article 2 du règlement litigieux

Sur la recevabilité

24 Le Conseil soulève l’irrecevabilité du premier moyen du fait que, d’une part, SolarWorld se borne à répéter le grief relatif au caractère détachable de l’article 2 du règlement litigieux qu’elle a formulé devant le Tribunal et que, d’autre part, l’examen concernant le caractère détachable de cette disposition relève d’une appréciation factuelle.

25 Il convient, en premier lieu, de relever que, dès lors qu’un requérant conteste l’interprétation ou l’application du droit de l’Union faite par le Tribunal, les points de droit examinés en première instance peuvent être à nouveau discutés au cours d’un pourvoi. En effet, si un requérant ne pouvait fonder de la sorte son pourvoi sur des moyens et des arguments déjà utilisés devant le Tribunal, la procédure de pourvoi serait privée d’une partie de son sens (arrêt du 19 janvier 2017,
Commission/Total et Elf Aquitaine, C‑351/15 P, EU:C:2017:27, point 31 ainsi que jurisprudence citée).

26 Or, en l’espèce, par son premier moyen, SolarWorld ne tend pas à obtenir un simple réexamen de la requête présentée devant le Tribunal, mais vise, précisément, à remettre en cause le raisonnement juridique ayant conduit le Tribunal à considérer que l’article 2 du règlement litigieux n’était pas détachable du reste des dispositions de ce règlement ainsi que la conséquence que le Tribunal a tirée de cette considération, à savoir que le recours de SolarWorld n’était pas recevable. À cet effet,
SolarWorld a indiqué à suffisance de droit les passages de l’ordonnance attaquée qu’elle considère entachés d’erreur de droit ainsi que les arguments juridiques invoqués au soutien de sa demande, permettant, ainsi, à la Cour d’effectuer son contrôle.

27 En second lieu, il convient de souligner qu’une éventuelle erreur commise par le Tribunal dans l’appréciation du caractère détachable d’une disposition d’un acte du droit de l’Union constitue une erreur de droit soumise au contrôle de la Cour (pour un tel contrôle, voir, notamment, arrêt du 29 mars 2012, Commission/Estonie, C‑505/09 P, EU:C:2012:179, points 110 à 122).

28 Il s’ensuit que le premier moyen est recevable.

Sur le fond

– Argumentation des parties

29 SolarWorld considère que l’article 2 du règlement litigieux a un caractère détachable par rapport aux autres dispositions de ce règlement et, en particulier, à l’article 1er, paragraphe 2, de celui-ci et que, par conséquent, son éventuelle annulation n’entraînerait pas de modification de la portée dudit règlement. À cet égard, le raisonnement du Tribunal figurant aux points 55 et 59 de l’ordonnance attaquée serait fondé sur une mauvaise compréhension des notions de « mesures compensatoires » et
de « droits compensateurs ».

30 SolarWorld relève que les mesures compensatoires peuvent prendre différentes formes (droits ad valorem, montants fixes en euro ou PMI). En ce qui concerne plus particulièrement les PMI, l’article 13 du règlement de base permettrait au Conseil et à la Commission d’accepter, de la part de producteurs-exportateurs individuels, des engagements de PMI si les prix proposés éliminent les effets préjudiciables de la subvention. Ces producteurs seraient ensuite exonérés du droit ad valorem du fait qu’ils
seraient soumis à une autre forme de mesures, à savoir les PMI dans le cadre de leur engagement. Ainsi, l’objectif des mesures compensatoires, quelle que soit leur forme, se caractériserait par leur aptitude à éliminer le préjudice causé aux producteurs de l’Union du même produit et jouerait à cet égard un rôle de correction.

31 Par conséquent, selon SolarWorld, le fait de modifier la forme des mesures compensatoires ne modifie pas la portée du règlement qui les impose, puisque ces mesures englobent l’ensemble des importations en provenance de producteurs-exportateurs dont il a été constaté qu’ils bénéficiaient des subventions préjudiciables.

32 En outre, SolarWorld affirme que, en application de l’article 13, paragraphe 9, du règlement de base, selon lequel, en cas de violation ou de retrait de l’acceptation d’un engagement de PMI, ce sont des droits ad valorem qui s’appliqueraient, la Commission jouit d’une flexibilité afin de modifier la forme des mesures compensatoires, sans qu’il soit question de modifier la portée de ces mesures. En l’espèce, l’article 2, paragraphe 2, sous b), du règlement litigieux se référerait spécifiquement
audit article 13, paragraphe 9, et, depuis l’adoption du règlement litigieux, la Commission aurait retiré l’acceptation de l’engagement de PMI pour plusieurs producteurs-exportateurs chinois, en leur imposant des droits ad valorem. Ainsi, il n’y aurait jamais eu de moment, depuis l’entrée en vigueur du règlement litigieux, où ces producteurs-exportateurs n’auraient pas été soumis à des mesures compensatoires.

33 Dans ces conditions, si le Tribunal avait accueilli le recours en première instance et avait annulé l’article 2 du règlement litigieux au motif que le PMI n’élimine pas le préjudice causé à l’industrie de l’Union, rien n’aurait empêché le Conseil et la Commission de fixer un nouveau PMI à un niveau adéquat pour éliminer ce préjudice, conformément à l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base. À cet égard, SolarWorld indique qu’une telle déclaration de nullité n’aurait pas nécessairement
entraîné de modification de la portée des mesures, ce qui est au cœur même du raisonnement du Tribunal figurant au point 55 de l’ordonnance attaquée. La seule conséquence juridique de cette déclaration aurait été que le Conseil et la Commission auraient dû soit accepter de nouveaux engagements contenant de nouveaux PMI éliminant les effets préjudiciables de la subvention, soit décider d’appliquer des droits ad valorem à l’ensemble des producteurs-exportateurs chinois.

34 Par ailleurs, SolarWorld fait valoir que la jurisprudence évoquée par le Tribunal, au point 57 de l’ordonnance attaquée, ne saurait étayer la conclusion selon laquelle l’article 2 du règlement litigieux n’a pas de caractère détachable.

35 Enfin, s’agissant de la dernière partie du point 55 de l’ordonnance attaquée, selon laquelle « les importations provenant des exportateurs chinois qui n’ont pas souscrit l’engagement accepté par la Commission [correspondent] à 30 % des importations totales du produit concerné », SolarWorld rappelle que l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base exige que les PMI soient fixés à un niveau adéquat pour éliminer le préjudice, quel que soit le pourcentage d’importations soumises aux mesures
compensatoires sous la forme d’un PMI. De même, selon SolarWorld, le grand nombre de producteurs-exportateurs chinois soumis au PMI ne modifie pas le fait que le règlement litigieux impose des mesures compensatoires et que la forme de ces mesures est une question qui ne concerne ni leur portée ni leur objet.

36 Le Conseil, soutenu par la Commission, fait valoir que le premier moyen de SolarWorld doit être rejeté comme étant non fondé. Ces institutions estiment que l’annulation partielle du règlement litigieux est exclue étant donné qu’elle aurait pour effet de substituer à ce règlement un acte ayant un contenu distinct, qui ne correspond pas aux intentions de l’auteur dudit règlement et qui, par conséquent, affecterait la substance de celui-ci.

– Appréciation de la Cour

37 Par son premier moyen, SolarWorld conteste, en substance, l’appréciation du Tribunal, contenue aux points 55 et 59 de l’ordonnance attaquée, par laquelle celui-ci a considéré que l’annulation de l’article 2 du règlement litigieux affecterait la substance de ce règlement et que, par conséquent, cette disposition n’est pas détachable du reste des dispositions dudit règlement.

38 Il ressort d’une jurisprudence constante de la Cour que l’annulation partielle d’un acte de l’Union n’est possible que dans la mesure où les éléments dont l’annulation est demandée sont détachables du reste de l’acte. À cet égard, la Cour a itérativement jugé qu’il n’est pas satisfait à cette exigence lorsque l’annulation partielle d’un acte aurait pour effet de modifier la substance de celui-ci (arrêt du 12 novembre 2015, Royaume-Uni/Parlement et Conseil, C‑121/14, EU:C:2015:749, point 20 ainsi
que jurisprudence citée).

39 Aussi, la vérification du caractère détachable d’éléments d’un acte de l’Union suppose l’examen de la portée de ceux-ci, afin d’évaluer si une annulation de ces éléments modifierait l’esprit et la substance de cet acte (arrêt du 29 mars 2012, Commission/Estonie, C‑505/09 P, EU:C:2012:179, point 112, ainsi que du 12 novembre 2015, Royaume-Uni/Parlement et Conseil, C‑121/14, EU:C:2015:749, point 21).

40 En l’espèce, selon l’article 1er du règlement litigieux, il est institué un droit compensateur définitif sur les importations de modules ou panneaux photovoltaïques en silicium cristallin et de cellules du type utilisé dans les modules ou panneaux photovoltaïques en silicium cristallin relevant de certains codes de la NC, originaires ou en provenance de Chine, le taux de ce droit compensateur variant selon les sociétés qui fabriquent ces produits.

41 Aux termes de l’article 2 du règlement litigieux, qui s’applique à certains produits dont les références sont spécifiées au regard de la NC et qui sont facturés par des sociétés dont la Commission a accepté des engagements, les importations déclarées pour la mise en libre pratique sont exonérées du droit compensateur institué à l’article 1er dudit règlement si certaines conditions sont respectées, cette exonération cessant dès lors qu’il est établi qu’une ou plusieurs de ces conditions n’ont pas
été remplies ou lorsque la Commission retire son acceptation de l’engagement. Ainsi qu’il a été rappelé au point 11 du présent arrêt, le PMI pour les panneaux et les modules photovoltaïques concernés et pour chacun de leurs éléments essentiels (cellules et wafers) ne s’applique que jusqu’à un certain niveau annuel d’importation.

42 Il résulte ainsi des dispositions contenues aux articles 1er et 2 du règlement litigieux que ce dernier article établit, au moyen de l’engagement relatif à un PMI, une exemption du paiement des droits compensateurs institués en vertu dudit article 1er, dans les limites d’un certain volume annuel d’importations.

43 C’est dans ce contexte normatif que le Tribunal a jugé, au point 55 de l’ordonnance attaquée, que l’article 2 du règlement litigieux « accorde, dans une certaine limite quantitative, une exonération de droits compensateurs à des opérateurs économiques nommément désignés, sous réserve que les conditions qu’[il] prévoit soient respectées. L’annulation de [cette disposition] aurait pour conséquence, en éliminant l’exonération de droits applicable dans cette limite quantitative, de conférer une
portée plus large aux droits compensateurs que celle ressortant de l’application du règlement litigieux tel qu’il a été adopté par le Conseil, puisque, dans cette hypothèse, lesdits droits frapperaient toutes les importations du produit concerné en provenance de Chine, alors que, en application de l’ensemble dudit règlement, ces droits ne frappent que les importations provenant des exportateurs chinois qui n’ont pas souscrit l’engagement accepté par la Commission au moyen de la décision
d’exécution 2013/707, ces importations correspondant, selon les parties, à 30 % des importations totales du produit concerné. Un tel résultat constituerait une modification de la substance de l’acte dans lequel s’insère la disposition dont l’annulation est demandée, ici le règlement [litigieux] ».

44 Au point 59 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal conclut que, eu égard à la modification de la substance du règlement litigieux qu’entraînerait l’annulation de l’article 2 de ce règlement, qui supprimerait l’exonération de droits compensateurs dont bénéficient les importations des producteurs-exportateurs chinois ayant souscrit l’engagement accepté par la Commission, une telle disposition n’est pas dissociable du reste dudit règlement.

45 Il convient de relever que, contrairement à ce qu’allègue SolarWorld dans le cadre du premier moyen du pourvoi, cette conclusion du Tribunal, au point 59 de l’ordonnance attaquée, n’est pas entachée d’une erreur de droit.

46 Premièrement, il ressort des dispositions des articles 1er et 2 du règlement litigieux que, ainsi qu’il a été confirmé par l’ensemble des parties à la présente procédure, le législateur de l’Union, lors de l’adoption de ce règlement, a mis en place des mesures de défense commerciale constituant un ensemble ou un « paquet ». En effet, ledit règlement impose deux mesures distinctes et complémentaires, qui visent à atteindre un résultat commun, à savoir l’élimination de l’effet préjudiciable sur
l’industrie de l’Union de la subvention chinoise relative aux produits concernés tout en préservant l’intérêt de cette industrie.

47 Il convient, à cet égard, de se référer au considérant 753 du règlement litigieux, qui, dans le cadre de l’analyse de l’impact de l’imposition des mesures de défense commerciale sur l’intérêt de l’industrie de l’Union, vise les effets que, selon le Conseil, aura l’engagement relatif au PMI sur la demande et sur l’offre des produits concernés. Deux constats ressortent de l’examen de ce considérant. D’une part, un tel engagement aura une incidence économique positive sur le marché européen desdits
produits, en ce sens que le PMI, en prévoyant un prix inférieur à celui observé lors de la période d’enquête, permettra le maintien dans l’Union d’une demande suffisante des produits concernés. Cette mesure apparaît ainsi comme devant avoir un effet important et distinct de celui de l’imposition d’un droit ad valorem.

48 D’autre part, l’engagement relatif au PMI apparaît comme étant une mesure dont le Conseil a tenu compte dans le cadre de l’examen de l’incidence de l’ensemble des mesures de défense commerciale sur l’objectif du règlement litigieux, consistant à éliminer l’effet préjudiciable sur l’industrie de l’Union de la subvention chinoise relative aux produits concernés tout en préservant l’intérêt de cette industrie.

49 Il s’ensuit que le législateur de l’Union a considéré l’engagement relatif au PMI, au même titre que l’imposition d’un droit ad valorem, comme un moyen essentiel de parvenir à l’objectif poursuivi par ce règlement.

50 Dans ces conditions, l’allégation de SolarWorld selon laquelle l’annulation de l’article 2 du règlement litigieux, alors même qu’elle entraînerait, pour les sociétés ayant souscrit un engagement relatif au PMI, l’élimination du bénéfice de cet engagement et l’imposition d’un droit ad valorem, n’affecterait pas la portée du règlement litigieux, dans la mesure où l’imposition d’un droit ad valorem permet d’atteindre à elle seule le même objectif que celui visé par cet engagement, ne saurait être
accueillie.

51 Deuxièmement, il convient de relever que les mesures de défense commerciale, prévues par le règlement litigieux, comportent des différences objectives au regard de leur nature. Comme il a été, à juste titre, indiqué par la Commission dans son mémoire en intervention, lors de l’imposition du droit ad valorem, au sens de l’article 1er, paragraphe 1, du règlement litigieux, les producteurs-exportateurs chinois sont libres de fixer leur prix de vente à l’Union, un droit étant par la suite imposé sur
ce prix une fois que le produit concerné est importé dans l’Union. Les recettes provenant de ce droit sont versées au budget de l’Union. En revanche, lorsqu’un PMI est appliqué, ces producteurs-exportateurs ne peuvent plus fixer librement leur prix, celui-ci devant être augmenté jusqu’au niveau de ce PMI pour les importations déclarées pour la mise en libre pratique du produit concerné. Quant aux revenus supplémentaires provenant de cette hausse des prix, ils reviennent aux
producteurs-exportateurs en question.

52 Dès lors, le règlement litigieux est fondé sur la possibilité d’appliquer alternativement ces deux mesures de nature distincte ce qui permet aux producteurs-exportateurs chinois de se prévaloir de l’engagement de PMI accepté par la Commission, au sens de l’article 2 du règlement litigieux, et ainsi d’éviter qu’un droit compensateur ad valorem, tel que prévu à l’article 1er dudit règlement, ne soit imposé sur leurs produits. Or, l’annulation de cet article 2 éliminerait une telle possibilité et
ferait disparaître l’alternative que le législateur de l’Union a voulu offrir aux producteurs-exportateurs chinois lors de l’adoption du règlement litigieux. Compte tenu des différences quant aux conséquences économiques liées à ces deux types de mesures de défense commerciale, une telle annulation affecterait ainsi la substance même du règlement litigieux.

53 Il s’ensuit que l’allégation de SolarWorld, selon laquelle, dans l’hypothèse d’une éventuelle annulation de l’article 2 de ce règlement, les producteurs-exportateurs chinois auraient, à tout moment, été soumis à une mesure compensatoire, n’altère en rien la conclusion que les producteurs-exportateurs chinois sont privés du choix que le législateur de l’Union leur a donné lors de l’adoption dudit règlement.

54 Troisièmement, ainsi qu’il résulte du point 55 de l’ordonnance attaquée, 70 % des importations des produits concernés provenant de Chine font l’objet de l’application de l’article 2 du règlement litigieux.

55 Ainsi, il apparaît que le législateur de l’Union a mis en œuvre un ensemble de mesures dans le cadre desquelles, certes, l’imposition de droits ad valorem apparaît formellement comme étant la règle et l’application d’un engagement relatif au PMI l’exception à cette règle, mais, en fait, l’application de l’exception concernait la grande majorité des cas dès l’adoption du règlement litigieux. Cet engagement apparaît donc comme ayant vocation à s’appliquer de manière principale dans le cadre des
importations en provenance de Chine concernées par le règlement litigieux. Dans de telles circonstances, l’annulation dudit engagement affecterait nécessairement la substance de ce règlement.

56 S’agissant, enfin, de l’allégation de SolarWorld selon laquelle l’annulation, par le Tribunal, de l’article 2 du règlement litigieux n’aurait pas empêché le législateur de l’Union de fixer un nouveau PMI à un niveau adéquat pour éliminer le préjudice causé à l’industrie de l’Union, conformément à l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base, il y a lieu de constater que l’analyse relative à l’affectation de la substance d’un acte de droit de l’Union dépend uniquement des conséquences qui
découlent automatiquement d’une éventuelle annulation de la disposition concernée de cet acte. Ainsi, les différentes mesures que l’auteur dudit acte est susceptible d’entreprendre à la suite d’une telle annulation ne sauraient affecter une telle analyse.

57 Il résulte des considérations qui précèdent que le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant que l’article 2 du règlement litigieux n’était pas détachable du reste des dispositions de ce règlement.

58 Par conséquent, il convient de rejeter le premier moyen de SolarWorld.

Sur le second moyen, tiré d’une violation des articles 20 et 47 de la Charte

Argumentation des parties

59 SolarWorld reproche au Tribunal d’avoir violé son droit à un recours effectif découlant de l’article 47 de la Charte ainsi que son droit à l’égalité devant la loi, au sens de l’article 20 de celle-ci.

60 En effet, si l’ordonnance attaquée n’était pas considérée comme étant invalide pour les motifs expliqués dans le cadre du premier moyen du pourvoi, cela aurait pour conséquence inacceptable que la requérante, en tant que plaignante de l’Union dans une affaire de défense commerciale, serait de jure privée d’un recours effectif et qu’elle recevrait un traitement désavantageux par rapport aux producteurs-exportateurs chinois qui demandent l’annulation de l’ensemble du règlement litigieux devant les
juridictions de l’Union.

61 L’objectif même du règlement de base étant de protéger les industries de l’Union contre un préjudice causé par une subvention, SolarWorld considère que, lorsque les institutions de l’Union constatent l’existence d’une subvention préjudiciable, mais qu’elles n’imposent pas de mesures compensatoires, sous quelque forme que ce soit, à un niveau adéquat pour éliminer le préjudice subi par les producteurs de l’Union, les droits de l’industrie de l’Union sont violés. Or, SolarWorld estime que, si
l’ordonnance attaquée n’était pas considérée comme étant invalide, l’industrie photovoltaïque dans la présente affaire ne disposerait d’aucun recours lorsque le Conseil et la Commission imposent illégalement des mesures compensatoires à concurrence d’un montant qui n’est pas apte à éliminer le préjudice subi par les producteurs de l’Union.

62 Par ailleurs, le fait que des producteurs-exportateurs chinois, qui ont causé le préjudice à l’industrie de l’Union, aient la possibilité d’introduire un recours contre un règlement adoptant des mesures de défense commerciale, alors qu’un producteur européen n’a pas cette possibilité, constituerait une violation du principe d’égalité devant la loi tel qu’établi à l’article 20 de la Charte. En effet, un producteur européen, tel que la requérante dans la présente affaire, aurait, en principe,
intérêt à faire annuler non pas l’ensemble d’un règlement imposant des mesures de défense commerciale, mais uniquement les parties illégales de ce dernier.

63 Le Conseil considère que le second moyen, en ce qu’il soulève, pour la première fois, dans le cadre du pourvoi, la violation de l’article 20 de la Charte, doit être considéré comme irrecevable. Le Conseil estime, en tout état de cause, ainsi que l’indique également la Commission, que ce second moyen est non fondé dans son ensemble.

Appréciation de la Cour

64 Il convient, tout d’abord, de rappeler que, dans le cadre d’un pourvoi, la compétence de la Cour est, en principe, limitée à l’appréciation de la solution légale qui a été donnée aux moyens débattus devant les juges du fond (arrêt du 17 septembre 2015, Total/Commission, C‑597/13 P, EU:C:2015:613, point 22 et jurisprudence citée).

65 Or, en l’espèce, la violation de l’article 20 de la Charte est invoquée pour la première fois devant la Cour, alors même que SolarWorld a eu l’occasion de faire valoir la violation de cet article dans le cadre des deux motifs d’irrecevabilité du recours présentés par le Conseil devant le Tribunal. Le second moyen de SolarWorld est donc irrecevable en tant qu’il vise une violation de l’article 20 de la Charte.

66 S’agissant de l’argument tiré d’une violation de l’article 47 de la Charte, SolarWorld affirme que si elle n’était pas en mesure d’attaquer partiellement le règlement litigieux, elle ne disposerait d’aucun recours lorsque les institutions de l’Union imposent illégalement des mesures compensatoires à concurrence d’un montant qui n’est pas apte à éliminer le préjudice subi par les producteurs de l’Union.

67 Il y a lieu de rappeler, à cet égard, en premier lieu, que cet article n’a pas pour objet de modifier le système de contrôle juridictionnel prévu par les traités, et notamment les règles relatives à la recevabilité des recours formés directement devant la juridiction de l’Union (arrêts du 3 octobre 2013, Inuit Tapiriit Kanatami e.a./Parlement et Conseil, C‑583/11 P, EU:C:2013:625, point 97, ainsi que du 24 novembre 2016, Ackermann Saatzucht e.a./Parlement et Conseil, C‑408/15 P et C‑409/15 P, non
publié, EU:C:2016:893, point 49).

68 En deuxième lieu, la protection conférée par l’article 47 de la Charte n’exige pas qu’un justiciable puisse, de manière inconditionnelle, intenter un recours en annulation, directement devant la juridiction de l’Union, contre un tel acte législatif de l’Union (arrêt du 3 octobre 2013, Inuit Tapiriit Kanatami e.a./Parlement et Conseil, C‑583/11 P, EU:C:2013:625, point 105).

69 En troisième lieu, il est de jurisprudence constante que le contrôle juridictionnel du respect de l’ordre juridique de l’Union est assuré, ainsi qu’il ressort de l’article 19, paragraphe 1, TUE, par la Cour et les juridictions des États membres. À cette fin, le traité FUE a, par ses articles 263 et 277 TFUE, d’une part, et par son article 267 TFUE, d’autre part, établi un système complet de voies de recours et de procédures destiné à assurer le contrôle de la légalité des actes de l’Union, en le
confiant au juge de l’Union (arrêts du 3 octobre 2013, Inuit Tapiriit Kanatami e.a./Parlement et Conseil, C‑583/11 P, EU:C:2013:625, points 90 et 92, ainsi que du 19 décembre 2013, Telefónica/Commission, C‑274/12 P, EU:C:2013:852, point 57).

70 Dans ces conditions, le fait que SolarWorld ne saurait intenter un recours uniquement contre une partie non dissociable du règlement litigieux n’est pas de nature à violer ses droits qui découlent de l’article 47 de la Charte dans la mesure où cette société pouvait attaquer le règlement litigieux dans son intégralité. Elle pouvait, en effet, sous réserve de remplir les conditions pour la qualité à agir prévues à l’article 263, paragraphe 4, TFUE attaquer le règlement litigieux directement devant
le Tribunal tout en demandant de suspendre les effets de cette annulation jusqu’à l’adoption par les institutions de l’Union des mesures nécessaires à l’exécution de l’arrêt d’annulation, ou contester la validité du règlement litigieux devant les juridictions nationales et amener celles-ci à interroger la Cour par la voie de questions préjudicielles.

71 Il résulte des considérations qui précèdent que l’ordonnance attaquée, dans la mesure où le Tribunal y a jugé que, l’article 2 du règlement litigieux n’ayant pas un caractère détachable du reste de ce règlement, le recours de SolarWorld était irrecevable, ne viole pas l’article 47 de la Charte.

72 Partant, il convient de rejeter le second moyen de SolarWorld comme étant, en partie, irrecevable et, en partie, non fondé.

73 Il s’ensuit que le pourvoi doit être rejeté dans son ensemble.

Sur les dépens

74 En vertu de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens.

75 Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du même règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

76 Le Conseil ayant conclu à la condamnation de la requérante et cette dernière ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de condamner la requérante aux dépens exposés par cette institution.

77 L’article 140, paragraphe 1, du règlement de procédure, également applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de ce règlement, dispose que les États membres et les institutions qui sont intervenus au litige supportent leurs propres dépens.

78 En l’espèce, la Commission, qui avait la qualité de partie intervenante en première instance, supportera ses propres dépens.

  Par ces motifs, la Cour (neuvième chambre) déclare et arrête :

  1) Le pourvoi est rejeté.

  2) SolarWorld AG est condamnée aux dépens exposés par le Conseil de l’Union européenne.

  3) La Commission européenne supporte ses propres dépens.

  Signatures

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( *1 ) Langue de procédure : l’anglais.


Synthèse
Formation : Neuvième chambre
Numéro d'arrêt : C-205/16
Date de la décision : 09/11/2017
Type d'affaire : Pourvoi - non fondé, Pourvoi - irrecevable
Type de recours : Recours en annulation

Analyses

Pourvoi – Subventions – Règlement d’exécution (UE) no 1239/2013 – Article 2 – Importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et leurs composants essentiels (cellules) originaires ou en provenance de Chine – Droit compensateur définitif – Exonération des importations faisant l’objet d’un engagement accepté – Caractère détachable.

Politique commerciale

Dumping

Relations extérieures


Parties
Demandeurs : SolarWorld AG
Défendeurs : Conseil de l'Union européenne.

Composition du Tribunal
Avocat général : Tanchev
Rapporteur ?: Lycourgos

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2017:840

Source

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