N° P.22.1355.F
A. G.,
inculpé, détenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseils Maîtres Cédric Vergauwen, Olivia Venet et Ludovic Badet, avocats au barreau de Bruxelles.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 14 octobre 2022 par la cour d’appel de Bruxelles, chambre des mises en accusation.
Le demandeur invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Ignacio de la Serna a fait rapport.
L’avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.
II. LES FAITS
Le demandeur a été placé sous mandat d’arrêt le 27 octobre 2021 pour des faits de participation à une organisation criminelle et d’infraction à la loi sur les produits stupéfiants dans le cadre d’une association.
Le 3 décembre 2021, les juges d’appel ont statué, prima facie, sur la légalité des indices sérieux de culpabilité visés au mandat d’arrêt, tout en ordonnant, mais à une date ultérieure, un contrôle de la régularité de la procédure conformément à l’article 235bis du Code d’instruction criminelle.
Par un arrêt du 21 juin 2022, les juges d’appel ont procédé à ce contrôle de la régularité de la procédure. Ils ont prononcé la nullité de certaines parties de procès-verbaux et ordonné le retrait de celles-ci. Pour le surplus, les juges d’appel ont réservé à statuer en invitant le procureur fédéral à fixer la cause sur pied des articles 235bis, 235quater ou 235ter du Code d’instruction criminelle.
Le 14 octobre 2022, l’arrêt attaqué, dans le cadre de la procédure de contrôle périodique de la détention préventive, confirme l’ordonnance de la chambre du conseil qui maintient la détention préventive pour une durée de deux mois.
III. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur le premier moyen :
Le moyen est pris de la violation des articles 5.1, 5.4, 6 et 13 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
Le demandeur reproche à l’arrêt de refuser sa libération alors que, placé en détention préventive le 27 octobre 2021 et contestant la régularité des indices de culpabilité depuis le 17 novembre 2021, il n’a toujours pas été statué sur cette défense, en violation du droit garanti par l’article 5.4 de la Convention. Le demandeur fait valoir qu’il n’a, ainsi, pas encore été statué sur la légalité des interceptions de communications visées au mandat d’arrêt.
En tant qu’il invoque la violation de l’article 6 de la Convention, alors que les juridictions d’instruction chargées du contrôle de la détention préventive ne statuent pas sur une accusation en matière pénale, le moyen manque en droit.
Le contrôle de la légalité du mandat d’arrêt est effectué par les juridictions d’instruction qui, conformément à l’article 21, § 4, de la loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive, statuent dans les cinq jours de la mise à exécution du mandat d’arrêt ou sur l’appel de l’ordonnance rendue à cette occasion. En cas de maintien de la détention préventive, la régularité du mandat d’arrêt ne peut ensuite plus être contestée, quel que soit le grief de nullité invoqué.
Par ailleurs, tenue d’examiner l’irrégularité ainsi soulevée, la chambre des mises en accusation ne devait se livrer, comme l’énonce l’arrêt attaqué, qu’à un examen prima facie de cette irrégularité, dès lors qu’en matière de détention préventive, la loi du 20 juillet 1990 comporte des règles spécifiques du contrôle de la régularité de la détention, qui seules sont applicables.
Selon l’arrêt, la cour d’appel, saisie de la contestation susvisée, a statué le 3 décembre 2021 et, à l’issue du contrôle de la régularité des indices de culpabilité, a estimé, aux termes de motifs que l’arrêt rappelle aux pages 2 et 3, que, prima facie, ce moyen, qui invoquait la violation de l’article 90quater du Code d’instruction criminelle, n’était pas fondé.
Partant, les juges d’appel ont légalement justifié leur décision qu’il avait été statué à bref délai sur la légalité de la décision ayant ordonné la détention préventive du demandeur et que le contrôle de la régularité de l’instruction et des méthodes particulières de recherche est étranger à celui de la légalité du mandat d’arrêt.
À cet égard, le moyen ne peut être accueilli.
En tant qu’il soutient que les juges d’appel devaient décider si le délai écoulé depuis la demande de procéder au contrôle de la régularité de l’instruction et des méthodes particulières de recherche, conformément aux articles 235bis à 235quater du Code d’instruction criminelle, avait violé l’article 5.4 de la Convention, parce que cet examen n’avait pas encore eu lieu, alors que ce double contrôle est étranger à celui de la légalité de la détention préventive, le moyen manque en droit.
En tant qu’il critique la décision des juges d’appel que le délai entre, d’une part, les arrêts ordonnant le contrôle de la légalité de la procédure et des méthodes particulières de recherche et, d’autre part, la date du 8 novembre 2022, à laquelle ce contrôle aura lieu, demeure raisonnable, le moyen est dirigé contre un motif surabondant.
Partant, dans cette mesure, dépourvu d’intérêt, le moyen est irrecevable.
Enfin, la violation alléguée de l’article 13 de la Convention est entièrement déduite de celle, vainement invoquée, de l’article 5.4 de la même Convention.
À cet égard également, le moyen est irrecevable.
Sur le second moyen :
Le moyen est pris de la violation de l’article 19 du Code judiciaire. Il reproche aux juges d’appel d’avoir commis un excès de pouvoir en décidant que le seul contrôle demeurant pendant, et qui est fixé au 8 novembre 2022, consiste dans l’examen de la régularité des méthodes particulières de recherche, alors que l’arrêt du 21 juin 2022 de la même juridiction a également décidé qu’il y avait lieu de procéder au contrôle de la légalité de l’instruction.
Mais, aux termes de l’énonciation que le moyen critique, les juges d’appel n’ont pas statué sur une demande ou une défense qui avait déjà été tranchée le 21 juin 2022.
Partant, procédant d’une lecture erronée de l’arrêt, le moyen manque en fait.
Le contrôle d’office
Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux frais.
Lesdits frais taxés à la somme de quatre-vingts euros nonante et un centimes dus.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Eric de Formanoir, conseiller faisant fonction de président, Tamara Konsek, Frédéric Lugentz, François Stévenart Meeûs et Ignacio de la Serna, conseillers, et prononcé en audience publique du vingt-six octobre deux mille vingt-deux par Eric de Formanoir, conseiller faisant fonction de président, en présence de Michel Nolet de Brauwere, avocat général, avec l’assistance de Tatiana Fenaux, greffier.