N° P.22.0688.F
LE PROCUREUR DU ROI DE LIÈGE, DIVISION VERVIERS,
demandeur en cassation,
contre
T. G., L., R.,
prévenu,
défendeur en cassation.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un jugement rendu le 31 mars 2022 par le tribunal correctionnel de Liège, division Verviers, statuant en degré d’appel.
Le demandeur fait valoir un moyen dans sa déclaration de pourvoi et dans un mémoire parvenu au greffe de la Cour le 23 mai 2022, annexé au présent arrêt en copie certifiée conforme.
Le conseiller Frédéric Lugentz a fait rapport.
L’avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur la recevabilité du moyen invoqué dans la déclaration de pourvoi :
En vertu de l'article 429 du Code d’instruction criminelle, les moyens de cassation doivent être indiqués dans un mémoire remis au greffe de la Cour. La dispense prévue en faveur du ministère public par le premier alinéa de cet article ne concerne que la signature par un avocat et non les autres formes prescrites pour le dépôt du mémoire.
La Cour ne peut dès lors avoir égard à l'écrit du demandeur, figurant dans l'acte même de pourvoi.
Sur l’ensemble du moyen invoqué dans le mémoire :
Le moyen est pris de la violation des articles 149 de la Constitution, 216bis du Code d’instruction criminelle et 68 de la loi relative à la police de la circulation routière.
Il reproche aux juges d’appel d’avoir déclaré l’action publique éteinte en raison de la prescription, parce que le cours de celle-ci n’avait été suspendu, en raison de deux propositions de transaction, que durant le délai séparant ces propositions de la date à laquelle le montant indiqué aurait au plus tard dû être payé. Selon le demandeur, dès lors que, nonobstant l’indication d’une telle échéance, la transaction peut être payée jusqu’à la veille de la signification de la citation à comparaître devant le juge du fond et entraîner ainsi l’extinction de l’action publique, la prescription demeure suspendue jusqu’à la date de cette signification.
L’obligation faite au juge de motiver sa décision est une règle de forme, étrangère à la valeur de la réponse.
En tant que, sous le couvert de la violation de l’article 149 de la Constitution, il critique en réalité la légalité des motifs du jugement, le moyen manque en droit.
La suspension de la prescription de l'action publique suppose qu'il existe un obstacle à l'introduction ou à l'exercice de cette action. Lorsque la cause de la suspension de la prescription de l'action publique disparaît, le délai de prescription reprend son cours.
L’article 216bis, § 1er, du Code d’instruction criminelle prévoit notamment que le procureur du Roi qui propose au prévenu une transaction, fixe les modalités et le délai de paiement. Ce délai est de quinze jours au moins et de trois mois au plus. Le procureur du Roi peut le prolonger si des circonstances particulières le justifient, ou l'écourter si le suspect y consent. La prescription de l'action publique est suspendue dès la proposition du procureur du Roi et cette suspension court soit jusqu'à la décision de refus de l’homologation de l'accord, soit jusqu'à la décision du procureur du Roi de ne pas appliquer cette disposition, soit jusqu'au constat de la non mise en œuvre ou de la mise en œuvre tardive de la transaction.
Par ailleurs, ainsi que le prévoit l’alinéa 9 de cette disposition et contrairement à ce que soutient le moyen, seuls les paiements effectués dans le délai indiqué éteignent l'action publique.
Il suit de l’article 216bis, § 1er, précité, que lorsque le délai indiqué par le procureur du Roi est dépassé, l’obstacle à l'introduction ou à l'exercice de l'action publique qui résulte de la proposition de transaction cesse d’exister. Le ministère public retrouve alors l’ensemble de ses prérogatives en vue de l’exercice des poursuites.
Partant, lorsque le procureur du Roi a proposé une transaction pénale, le non-paiement de la somme d'argent à l'échéance qu’il a fixée, et qui n’a pas été prolongée, entraîne le constat de la « non mise en œuvre » de la transaction et la fin de la suspension de la prescription de l’action publique.
À cet égard, le moyen manque également en droit.
Le jugement attaqué constate d’abord que le 28 juin 2018, le demandeur a adressé au défendeur deux propositions de transaction, se rapportant respectivement à deux infractions qui auraient été commises le 12 octobre 2017 et le 19 novembre 2017, et l’invitant à verser une somme d’argent au plus tard le 18 juillet 2018. Après avoir relevé que la prescription de l’action publique a ainsi été suspendue durant vingt jours et que l’abstention du défendeur de donner suite à ces propositions emportait le constat de « la non mise en œuvre de la transaction », les juges d’appel ont énoncé que le dernier acte interruptif de la prescription accompli dans le délai primaire ainsi prolongé, l’avait été le 25 juin 2019. Ils ont ensuite appliqué une autre cause de suspension de la prescription de l’action publique durant cent vingt-deux jours, avant de constater que cette prescription était définitivement acquise depuis le 25 octobre 2021.
Ainsi, les juges d’appel ont légalement justifié leur décision qu’au moment où ils ont statué, l’action publique était éteinte.
Dans cette mesure, le moyen ne peut être accueilli.
Le contrôle d’office
Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi ;
Laisse les frais à charge de l’Etat.
Lesdits frais taxés à la somme de soixante et un euros cinquante centimes dus.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le chevalier Jean de Codt, président, Françoise Roggen, Tamara Konsek, Frédéric Lugentz et Ignacio de la Serna, conseillers, et prononcé en audience publique du vingt-neuf juin deux mille vingt-deux par le chevalier Jean de Codt, président, en présence de Michel Nolet de Brauwere, avocat général, avec l’assistance de Fabienne Gobert, greffier.