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30/06/2021 | BELGIQUE | N°P.21.0303.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 30 juin 2021, P.21.0303.F


N° P.21.0303.F
I. D. B.
prévenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseils Maîtres Régis Brocca et Ricardo Bruno, avocats au barreau de Charleroi,
II. B. Sh.
prévenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Steve Lambert, avocat au barreau de Bruxelles, dont le cabinet est établi à Ixelles, rue Souveraine, 95, où il est fait élection de domicile,
III. P.A.
prévenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Audrey Lamy, avocat au barreau de Liège.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Les pourvois sont dirigés contre un ar

rêt rendu le 3 février 2021 par la cour d'appel de Bruxelles, chambre correctionnelle.
Les deux premiers...

N° P.21.0303.F
I. D. B.
prévenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseils Maîtres Régis Brocca et Ricardo Bruno, avocats au barreau de Charleroi,
II. B. Sh.
prévenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Steve Lambert, avocat au barreau de Bruxelles, dont le cabinet est établi à Ixelles, rue Souveraine, 95, où il est fait élection de domicile,
III. P.A.
prévenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Audrey Lamy, avocat au barreau de Liège.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Les pourvois sont dirigés contre un arrêt rendu le 3 février 2021 par la cour d'appel de Bruxelles, chambre correctionnelle.
Les deux premiers demandeurs invoquent deux moyens et le troisième en présente quatre, chacun dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Françoise Roggen a fait rapport.
L'avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.

II. LA DÉCISION DE LA COUR
A. Sur le pourvoi de B.D. :
1. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision qui, dans la cause I, acquitte le demandeur de la prévention B de faux en écritures et qui, dans la cause II, déclare les poursuites irrecevables avant de le renvoyer de celles-ci sans frais :
Ces décisions n'infligeant aucun grief au demandeur, le pourvoi est irrecevable à défaut d'intérêt.
2. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision de condamnation rendue sur l'action publique dans la cause I :
Sur le premier moyen :
Pris notamment de la violation de l'article 6.1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, du principe général du droit relatif au respect des droits de la défense, et de l'article 149 de la Constitution, le moyen est essentiellement tiré d'un défaut de réponse aux conclusions du demandeur.
Le demandeur fait en substance grief à l'arrêt de rejeter sa défense invoquant une méconnaissance du droit à un procès équitable et des droits de la défense en raison de l'absence de toute expertise comptable contradictoire de la société affectée par les irrégularités fondant les préventions.
Dans ses conclusions d'appel, le demandeur a justifié cette nécessité de disposer d'une telle expertise judiciaire aux motifs que cette mesure aurait permis de constater qu'il avait contribué au redressement de l'entreprise, que les gestionnaires précédant son entrée en fonction avaient manqué de diligence, que la comptabilité figurant au dossier n'était pas fiable à défaut de clôture des comptes annuels, et, enfin, que la justification économique des opérations bancaires qui lui sont opposées a fait l'objet d'une spéculation policière détachée de toute réalité économique et comptable.
L'arrêt énonce qu'une expertise financière contradictoire n'est jamais obligatoire et qu'elle peut s'avérer utile notamment en présence de montages financiers complexes. Il relève ensuite qu'en l'espèce, les flux financiers sont constatés par des mouvements bancaires et que la question du caractère licite ou non des transactions qu'ils recouvrent est à apprécier par la cour à l'aune des autres éléments recueillis au cours de l'enquête. Il en conclut qu'il n'apparaît donc pas que cette analyse requiert une compétence particulière spécifique.
En tant qu'il critique cette appréciation en fait ou exige pour son examen une vérification d'éléments de fait, le moyen est irrecevable.
La cour d'appel a ajouté que l'absence d'une telle expertise pose davantage la question du fondement des préventions que celle de la recevabilité des poursuites et que, partant, l'absence d'expertise contradictoire ne permettait pas de conclure à une violation des droits de la défense et du droit à un procès équitable.
Les juges d'appel ont ainsi donné les raisons pour lesquelles, compte tenu des éléments portés à leur connaissance et permettant, selon eux, de statuer en l'état, ils ont décidé de dire les poursuites recevables et de réformer sur ce point le jugement entrepris.
Par ces considérations qui ne sont pas empreintes du caractère stéréotypé que le moyen leur prête, les juges d'appel ont régulièrement motivé et légalement justifié leur décision que ni les droits de la défense ni le droit à un procès équitable garanti par l'article 6 de la Convention n'avaient été violés.
A cet égard, le moyen ne peut être accueilli.
Sur le second moyen :
Le moyen est pris notamment de la violation des articles 149 de la Constitution et 492bis du Code pénal.
Devant la cour d'appel, le demandeur a contesté l'élément moral des préventions d'abus de biens sociaux qui lui étaient imputés.
Concernant la prévention E.2.a, la cour d'appel a d'abord constaté que le demandeur avait procuration sur le compte de la société Majestic Hotels ; elle a ensuite refusé tout crédit à la justification donnée au versement réalisé par le demandeur en faveur d'un coprévenu, le demandeur B., à savoir le paiement du prix de la convention de cession d'actions intervenue entre eux, au motif qu'il résultait des écoutes téléphoniques qu'ils avaient « accordé leurs violons » et que le prix à payer par le demandeur ne pouvait pas l'être par la société sauf à faire l'objet d'une inscription en compte courant, ce qui n'avait pas été fait.
L'arrêt ajoute que la mention « prêt B. » ne fait absolument pas référence à une telle convention.
Concernant les deux versements visés sous la prévention E.2.b, en paiement des honoraires d'un avocat dus par le demandeur Sh. B. et non par la société elle-même, la cour d'appel a refusé tout crédit à la justification ainsi donnée à ces paiements pour déclarer la prévention établie.
Concernant les versements réalisés au profit du coprévenu A. B. visés à la prévention E.3 , la cour d'appel a constaté que le destinataire des fonds n'avait aucun lien avec la société Majestic Hotels, avant de considérer qu'il s'agissait ici également de prélèvements sans lien avec le fonctionnement de la société et qui préjudiciaient de manière significative ses intérêts patrimoniaux en raison de sa situation financière décrite ci-avant.
Concernant les retraits en espèces réalisés par le demandeur à son profit, qui sont visés à la prévention E.4, la cour d'appel a mis en évidence l'absence de justificatif de ces dépenses et leur caractère purement privé, avant de la dire établie.
L'arrêt indique enfin que le demandeur savait, puisqu'il invoque la situation financière obérée de la société Majestic Hotels, que par ces versements et ces retraits, il portait un préjudice significatif aux intérêts patrimoniaux de la société et des créanciers de celle-ci.
Concernant la stratégie de groupe avancée par le demandeur pour justifier l'absence de toute intention frauduleuse dans son chef, la cour d'appel a répondu à cette défense que l'argumentaire développé illustrait au contraire une confusion de patrimoine entretenue par le demandeur.
Les juges d'appel ont ainsi donné les raisons pour lesquelles ils ont considéré que le demandeur était animé de l'intention frauduleuse visée à l'article 492bis du Code pénal.
La décision de la cour d'appel de dire les préventions d'abus de biens sociaux établies dans le chef du demandeur est, partant, régulièrement motivée et légalement justifiée.
Le juge n'ayant pas à donner les motifs de ses motifs, le moyen qui reproche à l'arrêt une motivation insuffisante du rejet de la bonne foi du demandeur et de sa seule volonté de sauver la société Majestic Hotels de la faillite, allant jusqu'à agir au détriment de ses autres sociétés, ne peut, dans cette mesure, être accueilli.
Le contrôle d'office
Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
B. Sur le pourvoi de Sh. B. :
1. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision qui, dans la cause II, déclare les poursuites irrecevables avant de le renvoyer de celles-ci sans frais :
Cette décision n'infligeant aucun grief au demandeur, le pourvoi est irrecevable à défaut d'intérêt.
2. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision rendue sur l'action publique dans la cause I :
Sur le premier moyen :
Quant aux deux branches réunies :
Pris notamment de la violation de l'article 6.1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, du principe général du droit relatif au respect des droits de la défense et de l'article 149 de la Constitution, le moyen est essentiellement tiré d'un défaut de réponse à la note d'audience du demandeur.
Le demandeur soutient qu'en considérant que les mesures d'instruction complémentaires qu'il avait sollicitées dans sa note d'audience n'étaient pas nécessaires, les juges d'appel ont, au terme d'une motivation insuffisante, voire inexistante, violé l'article 6.1 de la Convention.
Le droit à un procès équitable s'apprécie par rapport à l'ensemble de la procédure, en recherchant si les droits de la défense ont été respectés, en examinant si la personne poursuivie a eu la possibilité de contester l'authenticité des preuves et de s'opposer à leur utilisation, en vérifiant si les circonstances dans lesquelles les éléments à charge ont été obtenus jettent le doute sur leur crédibilité ou leur exactitude, et en évaluant l'influence de l'élément de preuve obtenu irrégulièrement sur l'issue de l'action publique.
Concernant l'opportunité d'une expertise financière contradictoire, l'arrêt énonce qu'une telle mesure n'est jamais obligatoire et qu'elle peut s'avérer utile notamment en présence de montages financiers complexes. Il relève ensuite qu'en l'espèce, les flux financiers sont constatés par des mouvements bancaires et que la question du caractère licite ou non des transactions qu'ils recouvrent est à apprécier par la cour à l'aune des autres éléments recueillis au cours de l'enquête. Il en conclut qu'il n'apparaît pas que cette analyse requiert une compétence particulière spécifique.
En tant qu'il critique cette appréciation en fait ou exige pour son examen une vérification d'éléments de fait, le moyen est irrecevable.
La cour d'appel a ajouté que l'absence d'une telle expertise pose davantage la question du fondement des préventions que celle de la recevabilité des poursuites et que, partant, l'absence d'expertise contradictoire ne permettait pas de conclure à une violation des droits de la défense et du droit à un procès équitable.
Concernant le refus de joindre aux pièces de la procédure une information classée sans suite à charge de feu C. Van W., la cour d'appel a considéré qu'une violation des droits de la défense ou des règles relatives à un procès équitable ne pouvait se déduire de la seule allégation qu'un autre dossier contiendrait des éléments utiles à la défense d'un prévenu.
L'arrêt énonce ensuite qu'il était loisible au demandeur de solliciter, en temps utile, l'accès à ce dossier, un autre prévenu ayant agi avec succès en ce sens.
Les juges d'appel ont ainsi répondu à la défense du demandeur. Appréciant si les devoirs sollicités étaient nécessaires à la manifestation de la vérité, ils ont énoncé qu'au regard des éléments dont ils disposaient et qui ont été résumés ci-dessus, le dossier ne nécessitait pas de vérifications complémentaires.
Par ces considérations qui ne violent pas l'article 6 de la Convention, l'arrêt répond à la note d'audience du demandeur et motive régulièrement sa décision.
Le moyen ne peut, à cet égard, être accueilli.
Le demandeur reproche encore à la cour d'appel d'avoir rejeté sa demande de jonction du dossier précité sans examen préalable de quelques pièces de celui-ci, produites dans les conclusions du demandeur B. D..
Mais le juge ne doit pas répondre à des pièces déposées si leur contenu et une demande en ce sens ne sont pas repris dans des conclusions.
Il ne ressort pas de la note d'audience d'appel du demandeur que celui-ci se serait fondé sur les pièces produites par le prévenu B. D., pour convaincre la cour d'appel de la nécessité d'obtenir la copie intégrale de la notice dont la jonction était sollicitée.
Dans cette mesure, le moyen ne peut être accueilli.
Sur le second moyen :
Quant à la première branche :
Le moyen est pris de la violation des articles 505, alinéa 1er, 4°, et 42, 1°, du Code pénal.
Le demandeur fait grief à l'arrêt de se limiter à constater l'origine illégale des fonds visés à la prévention de blanchiment qualifiée sur pied de l'article 505, alinéa 1er, 4°, du Code pénal, mise à sa charge, sans préciser que ceux-ci ne proviennent pas d'une fraude fiscale simple.
En vertu de l'article 505, alinéa 3, du Code pénal, sauf à l'égard de l'auteur, du coauteur ou du complice des infractions dont proviennent les choses visées à l'article 42, 3°, les infractions visées à l'alinéa 1er, 2° et 4°, ont trait exclusivement, en matière fiscale, à des faits commis dans le cadre de la fraude fiscale grave, organisée ou non.
Il ne ressort ni des conclusions d'appel du demandeur, ni d'aucune pièce à laquelle la Cour peut avoir égard, que l'infraction primaire de la prévention de blanchiment imputée au demandeur aurait eu trait à des faits commis dans le cadre d'une fraude fiscale simple.
Soulevé pour la première fois devant la Cour, le moyen est nouveau et, partant, irrecevable.
Quant à la seconde branche :
Le moyen est notamment pris de la violation de l'article 505, alinéas 5 et 6, du Code pénal.
Condamné par la cour d'appel du chef de la prévention de blanchiment, visée par l'article 505, alinéa 1er, 4°, du Code pénal, le demandeur reproche à l'arrêt de lui infliger la peine accessoire obligatoire de confiscation de l'objet du blanchiment en procédant à son évaluation par équivalent, alors que cet objet a été, ainsi que l'arrêt le constate aux feuillets 49 et 50, retrouvé en perquisition chez le demandeur A. P. et porté au compte de l'Organe central pour la saisie et la confiscation.
En application des dispositions précitées, il n'y a pas lieu de procéder à la confiscation par équivalent de l'objet du blanchiment lorsque sa confiscation directe est, comme en l'espèce, possible.
En condamnant le demandeur à la peine accessoire de confiscation par équivalent de 70% de 99.100 euros, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision.
Le moyen est fondé.
Le contrôle d'office
Sauf en ce qui concerne l'illégalité à censurer ci-après, les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
C. Sur le pourvoi d'A. P. :
1. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision qui, dans la cause II, déclare les poursuites irrecevables et le renvoie de celles-ci sans frais :
Cette décision n'infligeant aucun grief au demandeur, le pourvoi est irrecevable à défaut d'intérêt.
2. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision rendue sur l'action publique dans la cause I :
Sur le premier moyen :
Le moyen critique l'arrêt en tant qu'il déclare l'action publique recevable alors que le prévenu s'est trouvé dans une situation de net désavantage par rapport à la partie poursuivante. Le grief est déduit des circonstances suivantes :
- le ministère public n'a pas versé au dossier une information susceptible de contenir des éléments à décharge, s'agissant de détournements commis par un tiers au préjudice de la société victime d'abus de biens sociaux ;
- le ministère public a refusé de joindre aux débats la copie d'une instruction réalisée à Gand et concernant les flux financiers de certaines des sociétés poursuivies ;
- aucune expertise judiciaire n'a jamais été réalisée ;
- le tribunal correctionnel de Liège, division Huy, s'est dessaisi de faits connexes à ceux de la présente cause et le ministère public, nonobstant cette connexité, est resté en défaut d'assurer la jonction des deux procédures.
En tant qu'il est dirigé contre le ministère public, qu'il critique l'appréciation souveraine des juges du fond quant à l'existence de la connexité alléguée, qu'il dénonce à la Cour l'absence au dossier d'une cause dont la jonction n'a pas été demandée aux juges d'appel, ou qu'il omet de préciser en quoi la lacune invoquée compromet les droits de la défense, le moyen est irrecevable.
L'arrêt rejette l'exception d'irrecevabilité de l'action publique soulevée par la défense, et il s'en explique par les considérations suivantes :
- l'information en cause de C. Van W. a été classée sans suite. C'est au ministère public de décider si un autre dossier doit être joint, sans préjudice des conséquences à en tirer par le juge du fond. Il était loisible au prévenu de solliciter l'accès au dossier prétendument manquant. L'un des prévenus a d'ailleurs obtenu cet accès.
- Les éléments du dossier instruit à Gand sont en lien avec les faits de la cause II mais pas avec ceux de la cause I. L'irrecevabilité résultant du non-accès des prévenus à cette instruction ne peut donc pas s'étendre à l'ensemble des deux causes.
- Les éléments recueillis au cours de l'enquête suffisent pour objectiver le caractère licite ou illicite des mouvements bancaires litigieux et des transactions qu'ils recouvrent.
Les juges d'appel ont, ainsi, légalement justifié leur décision.
A cet égard, le moyen ne peut être accueilli.
Sur le deuxième moyen :
Le moyen est pris de la violation de l'article 149 de la Constitution.
Quant à la première branche :
Le demandeur soutient être dans l'impossibilité de comprendre les raisons qui ont déterminé la cour d'appel à le condamner du chef des préventions de faux, usage de faux et escroquerie.
Il fait grief à la cour d'appel de ne pas indiquer sur quel élément du dossier elle s'appuie pour considérer qu'elle ne peut suivre la thèse développée par les prévenus dès lors qu'en dépit de son état financier, les parts sociales de la société Leading conservaient « une valeur indéniable ».
Revenant à exiger que le juge donne les motifs de ses motifs, alors qu'il n'y est pas tenu, le moyen manque en droit.
Quant à la seconde branche :
Il n'est pas contradictoire d'affirmer que des parts sociales ont une valeur indéniable tout en considérant qu'aucune évaluation objective n'en précise la valeur exacte.
Le moyen manque en fait.
Sur le troisième moyen :
Pris de la violation de l'article 149 de la Constitution, le moyen reproche à l'arrêt de ne pas motiver la condamnation du demandeur du chef d'accès illégaux à un système informatique, préventions au sujet desquelles il s'est, dans ses conclusions d'appel, référé à justice.
En constatant que sa culpabilité ressort des éléments recueillis au cours de l'enquête, que le demandeur reconnaît avoir consulté les banques de données policières, et qu'il conteste en vain avoir remis au deuxième demandeur un extrait de la banque nationale de données relatif à un véhicule retrouvé en perquisition au domicile de ce dernier, les juges d'appel ont régulièrement motivé leur décision.
Procédant d'une lecture incomplète de l'arrêt, le moyen manque en fait.

Sur le quatrième moyen :
Le moyen est pris de la violation des articles 149 de la Constitution et 6.2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que de la méconnaissance du principe général du droit relatif à la présomption d'innocence.
Le demandeur reproche en substance à l'arrêt de renverser la charge de la preuve pour dire établie la prévention de violation du secret professionnel.
Il lui fait grief de déduire sa culpabilité du seul lien de proximité qu'il a entretenu avec le deuxième demandeur, le premier apparaissant, selon l'arrêt, comme l'homme de confiance du second.
Outre ce lien de proximité, l'arrêt énonce qu'en sa qualité de policier, le demandeur savait pertinemment qu'en transmettant, dans les circonstances de l'espèce, un extrait d'une banque de données policières relatif à un véhicule, il se rendait coupable de violation du secret professionnel.
Par ces considérations, la cour d'appel n'a méconnu ni la présomption d'innocence ni les règles relatives à la charge de la preuve, l'arrêt se bornant à décider que la contestation élevée par le demandeur ne porte pas atteinte à la suffisance des preuves recueillies par ailleurs contre lui.
Le moyen ne peut être accueilli.
Sur le moyen pris, d'office, de la violation de l'article 505, alinéas 5 et 6, du Code pénal :
Lorsqu'il n'a pas disparu, l'objet du blanchiment ne peut pas être confisqué par équivalent.
L'arrêt constate que la somme d'argent de 99.100 euros faisant l'objet de la prévention de blanchiment a été saisie et déposée sur le compte bancaire de l'Organe central pour la saisie et la confiscation.
En condamnant le demandeur à la peine accessoire de confiscation par équivalent de trente pour cent de ladite somme, alors qu'elle était passible d'une confiscation directe, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision.
Le contrôle d'office
Sauf l'illégalité à censurer ci-après, les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Casse l'arrêt attaqué en tant qu'il condamne Sh. B. et A. P. du chef de la prévention F de la cause I à la confiscation spéciale par équivalent de, respectivement, 69.370 euros et 29.730 euros ;
Rejette les pourvois pour le surplus ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêt partiellement cassé ;
Condamne B. D. aux frais de son pourvoi ;
Condamne Sh. B. et A.P., chacun, aux quatre cinquièmes des frais de son pourvoi et réserve le surplus desdits frais pour qu'il y soit statué par la juridiction de renvoi ;
Renvoie la cause, ainsi limitée, à la cour d'appel de Mons, chambre correctionnelle.
Lesdits frais taxés en totalité à la somme de six cent soixante-quatre euros quarante-six centimes dont I) sur le pourvoi de B. D. : cent dix-neuf euros septante-quatre centimes dus ; II) sur le pourvoi de B. Sh. : deux cent septante-deux euros trente-six centimes dus et III) sur le pourvoi d'A. P. : deux cent septante-deux euros trente-six centimes dus.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le chevalier Jean de Codt, président, Françoise Roggen, Eric de Formanoir, Frédéric Lugentz et François Stévenart Meeûs, conseillers, et prononcé en audience publique du trente juin deux mille vingt et un par le chevalier Jean de Codt, président, en présence de Michel Nolet de Brauwere, avocat général, avec l'assistance de Fabienne Gobert, greffier.


Synthèse
Formation : Chambre 2f - deuxième chambre
Numéro d'arrêt : P.21.0303.F
Date de la décision : 30/06/2021
Type d'affaire : Droit pénal - Autres

Analyses

Lorsqu’il ne ressort ni des conclusions d’appel du prévenu, ni d’aucune pièce à laquelle la Cour peut avoir égard, que l’infraction primaire de la prévention de blanchiment imputée au prévenu aurait eu trait à des faits commis dans le cadre d’une fraude fiscale simple, le juge qui constate l’origine illégale des fonds visés à la prévention de blanchiment qualifiée sur pied de l’article 505, alinéa 1er, 4°, du Code pénal, mise à sa charge, n’est pas tenu de préciser que ceux-ci ne proviennent pas de tels faits (1). (1) La Cour considère qu’« il n’est pas nécessaire que le juge identifie l’infraction à l’aide de laquelle [les] avantages patrimoniaux [blanchis] ont été obtenus pourvu que, sur la base des éléments de la cause, il puisse exclure toute provenance ou origine légale » (A. DE NAUW, et F. KUTY, Manuel de droit pénal spécial, Wolters Kluwer, 2018, n° 1290, et réf. en notes 6090 et 6091).

RECEL - MOTIFS DES JUGEMENTS ET ARRETS - PAS DE CONCLUSIONS - Matière répressive (y compris les boissons spiritueuses et les douanes et accises) [notice1]

Il n’y a pas lieu de procéder à la confiscation par équivalent de l’objet du blanchiment lorsque sa confiscation directe est possible (1). (1) « La confiscation spéciale en matière de blanchiment est, en règle, prononcée en nature pourvu que les avantage patrimoniaux qui font l’objet d’un opération de blanchiment, les biens et valeurs qui leur ont été substitués et les revenus de ces avantages investis se trouvent encore dans le patrimoine du condamné au moment de la condamnation » (A. DE NAUW, et F. KUTY, o.c., n° 1312; voir D. VANDERMEERSCH et F. LUGENTZ, « Saisie et confiscation en matière pénale », R.P.D.B., Bruylant, 2015, n° 69). « En vertu de l'article 505, alinéa 3, du Code pénal, en cas de blanchiment d'avantages patrimoniaux, la confiscation obligatoire doit porter sur les avantages patrimoniaux blanchis comme tels et non pas sur un montant équivalent. Lorsque les avantages patrimoniaux blanchis sont des sommes d'argent et que des montants y correspondant se retrouvent dans le patrimoine de l'auteur de l'opération de blanchiment, le juge peut considérer que ces montants sont les sommes d'argent blanchies qui se trouvent toujours dans le patrimoine de l'auteur et constituent donc l'objet de l'infraction » (Cass. 6 juin 2006, RG P.06.0274.N, Pas. 2006, n° 311; voir D. VANDERMEERSCH, « Controverse à propos de la confiscation de l'objet du blanchiment », note sous Cass. 14 janvier 2004, J.T., 2004, p. 502). En d’autres termes, la confiscation par équivalent est soumise au principe de subsidiarité: elle ne peut être prononcée que lorsque l’objet du blanchiment ne se trouve plus dans le patrimoine du condamné ou a disparu (M.-L. CESONI et VANDERMEERSCH, « Le recel et le blanchiment », in Les infractions - Vol. 1 : les infractions contre les biens, 2ème éd., Larcier, 2016, p. 595 ; v. R. VERSTRAETEN et D. DEWANDELEER, « Repressieve en preventieve witwaswetgeving na de wetten van 27 april 2007 en 10 mei 2007, N.C., 2008, § 51 i.f., p. 24). La Cour a en outre pris d’office ce moyen en cause du troisième demandeur, dans le chef duquel les juges d’appel avaient confisqué, également par équivalent, le solde de 30% des 99.100 euros trouvés en perquisition chez lui et versés sur le compte de l’O.C.S.C.

RECEL


Références :

[notice1]

Code pénal - 08-06-1867 - Art. 505, al. 3 - 01 / No pub 1867060850


Composition du Tribunal
Président : DE CODT JEAN
Greffier : GOBERT FABIENNE
Ministère public : NOLET DE BRAUWERE MICHEL
Assesseurs : ROGGEN FRANCOISE, DE FORMANOIR DE LA CAZERIE ERIC, LUGENTZ FREDERIC, STEVENART MEEUS FRANCOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2021-06-30;p.21.0303.f ?

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