La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/03/2021 | BELGIQUE | N°P.21.0227.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 03 mars 2021, P.21.0227.F


N° P.21.0227.F
B. F
étranger, privé de liberté,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Patrick Huget, avocat au barreau de Bruxelles.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 3 février 2021 par la cour d'appel de Bruxelles, chambre des mises en accusation.
Le demandeur invoque un moyen dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le président de section Benoît Dejemeppe a fait rapport.
L'avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur la

recevabilité du mémoire et quant aux demandes de questions préjudicielles :
Formé le 9 février 202...

N° P.21.0227.F
B. F
étranger, privé de liberté,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Patrick Huget, avocat au barreau de Bruxelles.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 3 février 2021 par la cour d'appel de Bruxelles, chambre des mises en accusation.
Le demandeur invoque un moyen dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le président de section Benoît Dejemeppe a fait rapport.
L'avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur la recevabilité du mémoire et quant aux demandes de questions préjudicielles :
Formé le 9 février 2021, le pourvoi est dirigé contre l'arrêt statuant sur la légalité du titre de rétention délivré le 8 janvier 2021 par l'autorité administrative et expirant deux mois plus tard.
L'article 429, alinéa 1er, du Code d'instruction criminelle subordonne la recevabilité du mémoire à la condition qu'il soit remis au greffe de la Cour quinze jours francs au plus tard avant l'audience. Cette formalité est prescrite à peine d'irrecevabilité.
En application de cette règle, le dernier jour utile pour déposer le mémoire était le lundi 15 février 2021.
Le demandeur soutient que le mémoire déposé le lundi 22 février 2021 est recevable dès lors qu'il était impossible, selon lui, de respecter le délai légal pour la remise de ce mémoire, ayant été averti de la date de l'audience seulement le 17 février 2021.
Le pourvoi dirigé contre un arrêt statuant sur pied des articles 72 et suivants de la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers est examiné par la Cour sous le bénéfice de l'urgence. Dans ce cas, le délai de quinze jours prévu par l'article 432 du Code d'instruction criminelle pour l'avertissement de la fixation de la cause n'est pas d'application.
Au moment où il forme son pourvoi, le demandeur sait que, selon une pratique constante, la Cour en fixera l'examen au plus tard à l'audience précédant l'échéance du titre.
Le conseil du demandeur n'avait, partant, pas à attendre la réception de l'information du greffe pour savoir que la cause serait fixée avec célérité.
Il s'ensuit que l'impossibilité alléguée de déposer le mémoire au greffe avant le 17 février 2021 ne saurait justifier le dépôt de celui-ci le 22 février 2021.
Le mémoire est irrecevable.
Le demandeur invite la Cour à poser à la Cour de justice de l'Union européenne deux questions préjudicielles.
Par la première, il demande en substance de vérifier si les articles 47 de la Charte des droits fondamentaux et 13.1 de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du conseil du 16 décembre 2008 (directive « retour »), qui prévoient le droit à un recours effectif, doivent être interprétés en ce sens qu'ils autorisent un Etat membre à maintenir une réglementation ne prévoyant pas, dans les cas d'urgence, de délai pour l'avertissement, adressé à l'avocat du demandeur en cassation, de la fixation de la cause à l'audience de la Cour.
Lorsque la Cour statue sous le bénéfice de l'urgence, aucune disposition ne précise le délai dans lequel l'avocat du demandeur en cassation doit être averti de la fixation de la cause à l'audience.
Le juge n'est pas tenu de poser à la Cour de justice de l'Union européenne une question préjudicielle relative à une lacune dans la loi nationale lorsqu'il constate que, à supposer qu'elle soit à la source d'une violation du droit de l'Union européenne, il ne pourrait combler cette lacune sans l'intervention du législateur. Tel est le cas en l'espèce.
Relative au refus de poser la première question préjudicielle, la seconde question est étrangère au motif pour lequel la première est rejetée.
Il n'y a pas lieu d'interroger la Cour de justice à titre préjudiciel.
Le contrôle d'office
Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux frais.
Lesdits frais taxés à la somme de soixante-sept euros septante et un centimes dus.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le chevalier Jean de Codt, président, Benoît Dejemeppe, président de section, Eric de Formanoir, Frédéric Lugentz et François Stévenart Meeûs, conseillers, et prononcé en audience publique du trois mars deux mille vingt et un par le chevalier Jean de Codt, président, en présence de Michel Nolet de Brauwere, avocat général, avec l'assistance de Tatiana Fenaux, greffier.


Synthèse
Formation : Chambre 2f - deuxième chambre
Numéro d'arrêt : P.21.0227.F
Date de la décision : 03/03/2021
Type d'affaire : Autres - Droit administratif - Droit européen

Analyses

L'article 429, alinéa 1er, du Code d'instruction criminelle subordonne la recevabilité du mémoire à la condition qu'il soit remis au greffe de la Cour quinze jours francs au plus tard avant l'audience; cette formalité est prescrite à peine d'irrecevabilité; le pourvoi dirigé contre un arrêt statuant sur pied des articles 72 et suivants de la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers est examiné par la Cour sous le bénéfice de l'urgence; dans ce cas, le délai de quinze jours prévu par l'article 432 du Code d'instruction criminelle pour l'avertissement de la fixation de la cause n'est pas d'application; au moment où il forme son pourvoi, le demandeur sait que, selon une pratique constante, la Cour en fixera l'examen au plus tard à l'audience précédant l'échéance du titre de privation de liberté; le conseil du demandeur n'a, partant, pas à attendre la réception de l'information du greffe pour savoir que la cause sera fixée avec célérité (1). (1) Voir Cass. 13 mai 2020, RG P.20.0446.F, Pas. 2020, n° 292, et note signée M.N.B. Pour justifier la tardiveté du dépôt de son mémoire, le demandeur doit faire état d'éléments constituant une force majeure ayant perduré jusqu'à la date de ce dépôt tardif (voir Cass. 7 février 2018, RG P.18.0116.F, Pas. 2018, n° 83 et réf. en note ; Cass. 16 août 2017, RG P.17.0844.F, inédit). La circonstance invoquée par le demandeur ne répond pas à cette condition : sans invoquer la force majeure pour justifier la tardiveté du dépôt de son mémoire, il a soutenu que cette tardiveté ne peut être sanctionnée par l'irrecevabilité du mémoire au motif qu'il n'aurait été informé de la date de la présente audience que deux jours après le dépôt du mémoire. Selon lui, les droits de la défense impliquent que le demandeur en cassation puisse déposer son mémoire « dans un délai de 15 jours dès lors qu'il est informé officiellement de la date d'audience via la lettre de fixation que la défense reçoit du greffe de la Cour ». Or, une telle exigence ne ressort ni de l'article 432 C.I.cr., ni de l'art. 1106 C. jud., auquel il renvoie, ni d'aucune disposition. (M.N.B.)

POURVOI EN CASSATION - MATIERE REPRESSIVE - Formes - Forme et délai prévus pour le dépôt des mémoires et des pièces - Délai pour le dépôt du mémoire - Arrêt attaqué statuant sur pied des articles 72 et suivants de la loi du 15 décembre 1980 - Cause urgente - Conséquence - ETRANGERS - Arrêt statuant sur pied des articles 72 et suivants de la loi du 15 décembre 1980 - Pourvoi - Délai pour le dépôt du mémoire - Cause urgente - Conséquence [notice1]

Lorsque la Cour statue sous le bénéfice de l'urgence, aucune disposition ne précise le délai dans lequel l'avocat du demandeur en cassation doit être averti de la fixation de la cause à l'audience (1). (1) Voir Cass. 13 mai 2020, RG P.20.0446.F, Pas. 2020, n° 292, et note signée M.N.B. Pour justifier la tardiveté du dépôt de son mémoire, le demandeur doit faire état d'éléments constituant une force majeure ayant perduré jusqu'à la date de ce dépôt tardif (voir Cass. 7 février 2018, RG P.18.0116.F, Pas. 2018, n° 83 et réf. en note ; Cass. 16 août 2017, RG P.17.0844.F, inédit). La circonstance invoquée par le demandeur ne répond pas à cette condition : sans invoquer la force majeure pour justifier la tardiveté du dépôt de son mémoire, il a soutenu que cette tardiveté ne peut être sanctionnée par l'irrecevabilité du mémoire au motif qu'il n'aurait été informé de la date de la présente audience que deux jours après le dépôt du mémoire. Selon lui, les droits de la défense impliquent que le demandeur en cassation puisse déposer son mémoire « dans un délai de 15 jours dès lors qu'il est informé officiellement de la date d'audience via la lettre de fixation que la défense reçoit du greffe de la Cour ». Or, une telle exigence ne ressort ni de l'article 432 C.I.cr., ni de l'art. 1106 C. jud., auquel il renvoie, ni d'aucune disposition. (M.N.B.)

CASSATION - ARRETS. FORME - Procédure. Jonction - Procédure - Avis de fixation - Causes dans lesquelles la Cour statue sous le bénéfice de l'urgence - Délai dans lequel l'avocat du demandeur en cassation doit être averti de la fixation de la cause à l'audience - ETRANGERS - Arrêt statuant sur pied des articles 72 et suivants de la loi du 15 décembre 1980 - Pourvoi - Cause urgente - Délai dans lequel l'avocat du demandeur en cassation doit être averti de la fixation de la cause à l'audience [notice3]

Le juge n'est pas tenu de poser à la Cour de justice de l'Union européenne une question préjudicielle relative à une lacune dans la loi nationale lorsqu'il constate que, à supposer qu'elle soit à la source d'une violation du droit de l'Union européenne, il ne pourrait combler cette lacune sans l'intervention du législateur (1). (1) « C'est aux juridictions nationales saisies d'un litige qu'il appartient d'apprécier tant la nécessité d'une décision préjudicielle pour être en mesure de rendre leur jugement que la pertinence des questions qu'elles posent à la Cour [de justice des Communautés européennes] » (C. NAÔMÉ, Le renvoi préjudiciel en droit européen. Guide pratique, J.L.M.B., Opus 4, Larcier, 2007, p. 104). « L'article 267 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne n'impose pas à une juridiction nationale de poser une question préjudicielle à la Cour de justice de l'Union européenne lorsque l'interprétation de l'acte est claire, si la question n'est pas pertinente au regard de l'affaire dont elle est saisie, si la disposition communautaire en cause a déjà fait l'objet d'une interprétation de la part de la Cour de justice ou encore lorsque l'application correcte du droit de l'Union européenne s'impose avec une telle évidence qu'elle ne laisse place à aucun doute raisonnable » (Cass. 27 mai 2020, RG P.20.0516.F, Pas. 2020, n° 326 ; Cass. 11 mars 2015, RG P.14.1677.F, Pas. 2015, n° 183 avec concl. de M. VANDERMEERSCH, avocat général ; voir C.J.U.E. 6 octobre 1982, Cilfit e.a. c. Ministero della Sanità, C-283/81, spéc. §§ 7, 10, 11, 13, 14 et 16 ; C.J.U.E. 15 juin 2005, Intermodal Transports, C-495/03 ; C. NAÔMÉ, o.c., n° 146). Au cas où le juge constate qu'à supposer qu'une lacune dans la loi nationale soit à la source d'une violation du droit de l'Union européenne, il ne pourrait combler cette lacune sans l'intervention du législateur, la question relative à cette lacune n'est pas pertinente au regard de l'affaire dont il est saisi et il ne doit dès lors pas la poser. (M.N.B.)

QUESTION PREJUDICIELLE - Objet - Lacune dans la loi nationale qui ne peut être comblée sans l'intervention du législateur - Incidence sur l'obligation de poser la question à la Cour de justice de l'Union européenne - UNION EUROPEENNE - QUESTIONS PREJUDICIELLES [notice5]


Références :

[notice1]

Code d'instruction criminelle - 17-11-1808 - Art. 429, al. 1er, et 432 - 30 / No pub 1808111701 ;

Code Judiciaire - 10-10-1967 - Art. 1106 - 01 / No pub 1967101052

[notice3]

Code d'instruction criminelle - 17-11-1808 - Art. 432 - 30 / No pub 1808111701 ;

Code Judiciaire - 10-10-1967 - Art. 1106 - 01 / No pub 1967101052

[notice5]

Tr. du 7 février 1992 sur l'Union européenne - 07-02-1992 - Art. 267 - 32 / Lien DB Justel 19920207-32


Composition du Tribunal
Président : DE CODT JEAN
Greffier : FENAUX TATIANA
Ministère public : NOLET DE BRAUWERE MICHEL
Assesseurs : DEJEMEPPE BENOIT, KONSEK TAMARA, LUGENTZ FREDERIC, STEVENART MEEUS FRANCOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2021-03-03;p.21.0227.f ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award