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27/01/2021 | BELGIQUE | N°P.20.1348.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 27 janvier 2021, P.20.1348.F


N° P.20.1348.F
M. M., A.,
étranger, privé de liberté,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Thomas Crombez, avocat au barreau de Mons.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 24 décembre 2020 par la cour d'appel de Mons, chambre des mises en accusation.
Le demandeur invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller François Stévenart Meeûs a fait rapport.
L'avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.
II. LES FAITS
Le demandeur a Ã

©té interpellé le 17 novembre 2020 et le délégué du ministre chargé de l'asile et de la migration a ...

N° P.20.1348.F
M. M., A.,
étranger, privé de liberté,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Thomas Crombez, avocat au barreau de Mons.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 24 décembre 2020 par la cour d'appel de Mons, chambre des mises en accusation.
Le demandeur invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller François Stévenart Meeûs a fait rapport.
L'avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.
II. LES FAITS
Le demandeur a été interpellé le 17 novembre 2020 et le délégué du ministre chargé de l'asile et de la migration a ordonné le même jour son maintien dans un lieu déterminé afin d'identifier l'Etat membre responsable, en application de l'article 51/5/1, § 1er, alinéa 2, de la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers.
Le 20 novembre 2020, l'Office des étrangers a sollicité des autorités allemandes la reprise en charge du demandeur, sur pied de la règlementation européenne.
Le 24 novembre 2020, les autorités allemandes ont décliné ladite demande.
Le 27 novembre 2020, l'Office des étrangers a introduit une demande de délivrance d'un laissez-passer au consulat général d'Algérie.
Le demandeur a fait l'objet, le 30 novembre 2020, d'un ordre de quitter le territoire avec décision de remise immédiate à la frontière, ainsi que d'une mesure de privation de liberté aux fins de demande de reprise aux autorités algériennes, par application des articles 7, alinéas 1er, 1°, 2° et 3°, 3 et 74/14, § 3, 1° et 3°, de la loi du 15 décembre 1980.
Le 4 décembre 2020, le demandeur a introduit un recours contre cette mesure privative de liberté devant la chambre du conseil du tribunal correctionnel du Hainaut, division Charleroi.
Par une ordonnance du 11 décembre 2020, la chambre du conseil a déclaré non fondée la requête du demandeur.
L'arrêt attaqué statue sur l'appel du demandeur contre cette ordonnance et déclare le recours non fondé.
III. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur le premier moyen :
Quant aux deux branches réunies :
Le moyen reproche aux juges d'appel d'avoir confirmé la mesure privative de liberté sur la base d'un contrôle de légalité incomplet : la possibilité d'éloigner le demandeur dans un délai raisonnable n'a été appréciée qu'à la date de la décision administrative alors que le demandeur a déposé des conclusions soutenant également qu'à la date où la juridiction doit statuer, cette possibilité n'existe pas.
En vertu de l'article 15, §§ 1er et 5, de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, la rétention d'une personne à des fins d'éloignement ne peut être maintenue que pendant le temps où le dispositif d'éloignement est en cours et est exécuté avec toute la diligence requise ; il faut donc qu'au moment de l'examen de la légalité de la rétention par la juridiction nationale, la possibilité subsiste d'une réelle perspective que l'éloignement soit mené à bien.
Dans ses conclusions, qui se réfèrent notamment à la directive précitée, le demandeur a invoqué l'absence de perspective raisonnable d'éloignement en raison de la fermeture de l'espace aérien algérien depuis le 19 mars 2020 et la suspension des vols spéciaux au départ de la Belgique à destination de ce pays.
En réponse à ces conclusions, les juges d'appel ont considéré qu' « aucun élément du dossier administratif n'établit qu'à la date de la décision querellée, soit le 30 novembre 2020, l'espace aérien algérien était fermé ni qu'il était inenvisageable de réaliser [le] rapatriement [du demandeur] vers l'Algérie dans un délai raisonnable ».
Il ressort de cette énonciation que les juges d'appel ont apprécié les perspectives d'éloignement du demandeur telles qu'elles existaient à la date de la mesure privative de liberté. Mais il n'apparaît pas que la même vérification ait été opérée par la chambre des mises en accusation au moment où elle a statué, nonobstant la contestation élevée sur ce point.
Ainsi, les juges d'appel n'ont pas régulièrement motivé ni légalement justifié leur décision de maintenir la détention du demandeur.
Le moyen est fondé.
Il n'y a pas lieu d'examiner le second moyen, qui ne pourrait entraîner une cassation sans renvoi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Casse l'arrêt attaqué ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêt cassé ;
Réserve les frais pour qu'il soit statué sur ceux-ci par le juge de renvoi ;
Renvoie la cause à la cour d'appel de Mons, chambre des mises en accusation, autrement composée.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le chevalier Jean de Codt, président, Benoît Dejemeppe, président de section, Françoise Roggen, Eric de Formanoir et François Stévenart Meeûs, conseillers, et prononcé en audience publique du vingt-sept janvier deux mille vingt et un par le chevalier Jean de Codt, président, en présence de Michel Nolet de Brauwere, avocat général, avec l'assistance de Fabienne Gobert, greffier.


Synthèse
Formation : Chambre 2f - deuxième chambre
Numéro d'arrêt : P.20.1348.F
Date de la décision : 27/01/2021
Type d'affaire : Droit administratif - Droit pénal

Analyses

En vertu de l'article 15, §§ 1er et 5, de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, la rétention d'une personne à des fins d'éloignement ne peut être maintenue que pendant le temps où le dispositif d'éloignement est en cours et est exécuté avec toute la diligence requise; il faut donc qu'au moment de l'examen de la légalité de la rétention par la juridiction nationale, la possibilité subsiste d'une réelle perspective que l'éloignement soit mené à bien (1). (1) Cass. 10 juin 2020, RG P.20.0603.F, Pas. 2020, n° 387 ; voir C.J.U.E. (gr. ch.) 30 novembre 2009, Kadzoev, C-357/09, ECLI:EU:C:2009:741, §§65-67; C.J.U.E., 14 mai 2020, Országos e.a., C-924/19 et C-925/19, ECLI:EU:C:2020:367, § 27.

ETRANGERS - JURIDICTIONS D'INSTRUCTION [notice1]


Références :

[notice1]

Loi - 15-12-1980 - Art. 7, al. 5 - 30 / No pub 1980121550 ;

Directive CE - 16-12-2008 - Art. 15


Composition du Tribunal
Président : DE CODT JEAN
Greffier : GOBERT FABIENNE
Ministère public : NOLET DE BRAUWERE MICHEL
Assesseurs : DEJEMEPPE BENOIT, ROGGEN FRANCOISE, DE FORMANOIR DE LA CAZERIE ERIC, STEVENART MEEUS FRANCOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2021-01-27;p.20.1348.f ?

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