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13/01/2021 | BELGIQUE | N°P.20.1094.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 13 janvier 2021, P.20.1094.F


N° P.20.1094.F
V. D.B. W.,
partie civile,
demandeur en cassation,
représenté par Maître Ann Frédérique Belle, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 453/8, où il est fait élection de domicile,
contre
1. G.D.,
prévenu,
2. BELFIUS ASSURANCES, société anonyme, dont le siège est établi à Saint-Josse-ten-Noode, place Charles Rogier, 11,
partie intervenue volontairement,
représentée par Maître Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation,
défendeurs en cassation.
I. LA PROCÉDURE DEVANT

LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un jugement rendu le 7 septembre 2020 par le tribunal correctionnel...

N° P.20.1094.F
V. D.B. W.,
partie civile,
demandeur en cassation,
représenté par Maître Ann Frédérique Belle, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 453/8, où il est fait élection de domicile,
contre
1. G.D.,
prévenu,
2. BELFIUS ASSURANCES, société anonyme, dont le siège est établi à Saint-Josse-ten-Noode, place Charles Rogier, 11,
partie intervenue volontairement,
représentée par Maître Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation,
défendeurs en cassation.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un jugement rendu le 7 septembre 2020 par le tribunal correctionnel francophone de Bruxelles, statuant en degré d’appel.
Le demandeur invoque quatre moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le président chevalier Jean de Codt a fait rapport.
L’avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur les quatre moyens réunis :
Les moyens sont pris de la violation des articles 1315, 1382 et 1383 de l’ancien Code civil. Il est reproché au jugement d’imposer au créancier de l’indemnité une preuve qui ne lui incombe pas et de lui refuser illégalement la réparation intégrale de son préjudice. Le grief repose sur l’affirmation suivant laquelle, pour rejeter le calcul de capitalisation proposé par le demandeur aux fins d’indemniser le dommage permanent, le tribunal correctionnel a formulé des motifs revenant à exiger la preuve que ce dommage est et restera constant à dater de la consolidation et dans le futur.
Le juge du fond apprécie en fait l’existence d’un dommage causé par un acte illicite et le montant destiné à le réparer intégralement. Il peut recourir à une évaluation ex aequo et bono s’il indique la raison pour laquelle le mode de calcul proposé par la victime ne peut être admis et s’il constate en outre l’impossibilité de déterminer autrement le dommage tel qu’il l’a caractérisé.
En tant que méthode d’indemnisation d’un préjudice futur, la capitalisation se définit comme un calcul actuariel consistant à convertir en une somme l’ensemble des indemnités à échoir. Cette méthode suppose donc un minimum d’équivalence entre les échéances de la rente due et le préjudice annuel se manifestant jusqu’à la fin de la durée déterminée par le calcul.
Certes, le juge ne peut pas refuser la capitalisation au motif que le préjudice ne se manifestera pas de manière linéaire. Il ne peut pas la refuser au prix d’une contradiction qui consisterait à dire que l’incapacité permanente, en réalité, ne l’est pas. En revanche, il peut la refuser si, l’équivalence susdite étant impossible à établir, cette méthode conduirait à allouer à la victime une somme dépassant le préjudice à indemniser.
Le jugement constate que la consolidation des lésions, acquise le 1er août 2016, s’est réalisée avec six pourcents d’incapacité personnelle et trois pourcents d’incapacité économique et ménagère. Selon le tribunal, le premier taux tient compte des douleurs au niveau du pied gauche et d’une certaine souffrance rachidienne très partiellement imputable aux faits de la cause. Le second taux, d’après les juges d’appel, se base sur des séquelles essentiellement subjectives qui peuvent avoir un discret retentissement sur la capacité ménagère et économique.
S’agissant du préjudice ménager de trois pourcents, le jugement relève qu’il n’est pas établi qu’à chaque accomplissement d’une tâche ménagère, la victime soit gênée dans son activité.
S’agissant de l’incapacité économique, soit une atteinte de trois pourcents à la capacité de travail, le jugement relève qu’il n’y a ni perte d’emploi, ni diminution de revenus, ni lésion physique entraînant un amoindrissement anatomique, de sorte que le caractère purement subjectif du ressenti ne permet pas d’arrêter la base de calcul nécessaire.
S’agissant de l’incapacité personnelle, évaluée à six pourcents, le jugement relève qu’à défaut pour la victime de produire des éléments objectifs, précis et concordants, le tribunal ne dispose d’aucun autre élément que ceux, subjectifs, retenus par l’expert, lesquels ne présentent pas la récurrence suffisante pour justifier la capitalisation du dommage.
Ayant indiqué ainsi les circonstances, propres à la cause, qui justifient l’ampleur de la variation dans le temps de la base forfaitaire, les juges d’appel se sont bornés à expliquer pourquoi l’évaluation dudit dommage ne pouvait se faire qu’en équité, sans imposer au demandeur le fardeau d’une preuve qui ne lui incomberait pas.
Ils ont ainsi légalement justifié leur décision.
Le moyen ne peut être accueilli.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux frais.
Lesdits frais taxés en totalité à la somme de quatre-vingt-quatre euros cinquante centimes dont quarante-neuf euros cinquante centimes dus et trente-cinq euros payés par ce demandeur.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le chevalier Jean de Codt, président, Benoît Dejemeppe, président de section, Tamara Konsek, Frédéric Lugentz et François Stévenart Meeûs, conseillers, et prononcé en audience publique du treize janvier deux mille vingt et un par le chevalier Jean de Codt, président, en présence de Michel Nolet de Brauwere, avocat général, avec l’assistance de Fabienne Gobert, greffier.


Synthèse
Formation : Chambre 2f - deuxième chambre
Numéro d'arrêt : P.20.1094.F
Date de la décision : 13/01/2021
Type d'affaire : Droit civil

Analyses

Le juge du fond apprécie en fait l'existence d'un dommage causé par un acte illicite et le montant destiné à le réparer intégralement; il peut recourir à une évaluation ex aequo et bono s'il indique la raison pour laquelle le mode de calcul proposé par la victime ne peut être admis et s'il constate en outre l'impossibilité de déterminer autrement le dommage tel qu'il l'a caractérisé (1). (1) Cass. 19 février 2020, RG P.19.1090.F, Pas. 2020, n° 143, avec concl. « dit en substance » du MP ; voir Cass. 8 octobre 2020, RG C.20.0050.F, inédit ; Cass. 28 octobre 2019, RG C.19.0013.F, Pas. 2019, n° 547 , avec concl. de M. GÉNICOT, avocat général ; Cass. 25 avril 2019, RG C.18.0569.F, Pas. 2019, n° 247, avec concl. « dit en substance » de M. WERQUIN, avocat général ; Cass. 20 novembre 2012, RG P.12.0499.N, Pas. 2012, n° 624 ; Cass. 15 septembre 2010, RG P.10.0476.F, Pas. 2010, n° 522.

RESPONSABILITE HORS CONTRAT - DOMMAGE - Pouvoir d'appréciation. Evaluation. Date à considérer

En tant que méthode d'indemnisation d'un préjudice futur, la capitalisation se définit comme un calcul actuariel consistant à convertir en une somme l'ensemble des indemnités à échoir; cette méthode suppose donc un minimum d'équivalence entre les échéances de la rente due et le préjudice annuel se manifestant jusqu'à la fin de la durée déterminée par le calcul; certes, le juge ne peut pas refuser la capitalisation au motif que le préjudice ne se manifestera pas de manière linéaire (1) ; il ne peut pas la refuser au prix d'une contradiction qui consisterait à dire que l'incapacité permanente, en réalité, ne l'est pas; en revanche, il peut la refuser si, l'équivalence susdite étant impossible à établir, cette méthode conduirait à allouer à la victime une somme dépassant le préjudice à indemniser. (1) Voir Cass. 8 octobre 2020, RG C.20.0050.F, inédit ; Cass. 25 avril 2019, RG C.18.0569.F, Pas. 2019, n° 247, avec concl. « dit en substance » de M. WERQUIN, avocat général ; Cass. 27 mai 2016, RG C.15.0509.F, Pas. 2016, n°357, avec note signée Th. W. Le MP a conclu à la cassation au regard de cette jurisprudence de la 1ère chambre de la Cour (M.N.B.).

RESPONSABILITE HORS CONTRAT - DOMMAGE - Pouvoir d'appréciation. Evaluation. Date à considérer


Composition du Tribunal
Président : DE CODT JEAN
Greffier : GOBERT FABIENNE
Ministère public : NOLET DE BRAUWERE MICHEL
Assesseurs : DEJEMEPPE BENOIT, KONSEK TAMARA, LUGENTZ FREDERIC, STEVENART MEEUS FRANCOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2021-01-13;p.20.1094.f ?

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