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09/03/2020 | BELGIQUE | N°C.19.0178.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 09 mars 2020, C.19.0178.N


N° C.19.0178.N
MEDICETIE, sprl,
Me Beatrix Vanlerberghe, avocat à la Cour de cassation,
contre
L. D. et P. W., avocats, en leur qualité de curateurs à la faillite de la sprl Bouwonderneming Maes,
Me Martin Lebbe, avocat à la Cour de cassation.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 21 décembre 2018 par la cour d'appel de Gand.
Par ordonnance du 28 novembre 2019, le premier président a renvoyé la cause devant la troisième chambre.
Le président de section Eric Dirix a fait rapport.
L'avocat général He

nri Vanderlinden a conclu.
II. Les moyens de cassation
Dans la requête en cassation, jointe ...

N° C.19.0178.N
MEDICETIE, sprl,
Me Beatrix Vanlerberghe, avocat à la Cour de cassation,
contre
L. D. et P. W., avocats, en leur qualité de curateurs à la faillite de la sprl Bouwonderneming Maes,
Me Martin Lebbe, avocat à la Cour de cassation.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 21 décembre 2018 par la cour d'appel de Gand.
Par ordonnance du 28 novembre 2019, le premier président a renvoyé la cause devant la troisième chambre.
Le président de section Eric Dirix a fait rapport.
L'avocat général Henri Vanderlinden a conclu.
II. Les moyens de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, la demanderesse présente deux moyens.
III. La décision de la Cour
Sur le premier moyen :
Quant à la première branche :
Sur la recevabilité du moyen, en cette branche :
1. Les défendeurs opposent au moyen, en cette branche, une fin de non-recevoir déduite de ce qu'il est nouveau ou, à tout le moins, mélangé de fait et de droit, dès lors que la demanderesse n'a pas soutenu dans ses conclusions d'appel de synthèse qu'elle était encore propriétaire des appartements trois et quatre au moment où elle les a vendus à des tiers.
2. Il ressort des pièces auxquelles la Cour peut avoir égard que la demanderesse arguait dans ses conclusions d'appel de synthèse que :
- il est généralement admis que l'action relative à des vices de construction demeure, en principe, dans le patrimoine du cédant lorsqu'il a intenté cette action avant la cession du bien, sauf s'il a stipulé la cession de créance de manière expresse dans le contrat ;
- c'est le cas, en l'espèce, étant donné que l'acquéreur ne pouvait obtenir l'usage et la jouissance du bien qu'après la réception provisoire et qu'il est établi que la réception provisoire entre la demanderesse et la sprl Bouwonderneming Maes n'a pas eu lieu préalablement à cette procédure, de sorte que la réception entre la demanderesse et ses acquéreurs est également survenue à une date ultérieure ;
- par conséquent, l'action est toujours demeurée dans le patrimoine de la demanderesse, puisqu'elle l'avait déjà intentée.
3. Les juges d'appel ont considéré qu'une action fondée sur un droit lié à la qualité de propriétaire d'une chose ne demeure pas, en règle, dans le patrimoine du vendeur de celle-ci, l'eût-il intentée avant le transfert de propriété.
4. En conséquence, le moyen n'est ni nouveau, ni mélangé de fait et de droit.
La fin de non-recevoir ne peut être accueillie.
Sur le fondement du moyen, en cette branche :
5. L'article 1615 du Code civil dispose que l'obligation de délivrer la chose comprend ses accessoires et tout ce qui a été destiné à son usage perpétuel.
Sauf disposition contraire, la cession s'étend donc aussi aux droits cessibles qui sont si étroitement liés à la chose que l'intérêt qu'ils présentent dépend de la propriété de cette chose. Il s'ensuit que, sauf disposition contraire, seul le cessionnaire a la qualité et l'intérêt requis pour faire valoir ces droits en justice. C'est également le cas, en principe, lorsque la cession survient après l'intentement de l'action en justice.
Les droits que le cédant a encore intérêt à exercer ne sont pas supposés compris dans la cession.
Ainsi, lorsque le propriétaire forme une demande fondée sur un contrat synallagmatique portant sur une chose et que cette chose est ensuite cédée, le cédant conserve un intérêt à la demande si celle-ci constitue notamment une défense contre une demande reconventionnelle formée en vertu de ce contrat.
6. Il ressort des pièces auxquelles la Cour peut avoir égard que :
- en 2007, la demanderesse a, en tant que promoteur immobilier, conclu un contrat d'entreprise avec la sprl Bouwonderneming Maes concernant le gros-œuvre d'un immeuble à appartements ;
- un désaccord est apparu entre les parties au sujet de la qualité des travaux et des demandes en justice ont été formées de part et d'autre ;
- la sprl Bouwonderneming Maes prétend au paiement de factures non acquittées, alors que la demanderesse revendique le paiement de la pénalité de retard et l'indemnisation de frais de réparation ;
- l'instance a été introduite par procès-verbal de comparution personnelle du 12 mars 2009 ;
- la sprl Bouwonderneming Maes a été déclarée en faillite en 2012 et les défendeurs ont été désignés curateurs ;
- le premier juge a déclaré en grande partie fondées tant la demande de la demanderesse que la demande reconventionnelle des défendeurs ;
- la demanderesse a interjeté appel ;
- le juge d'appel a constaté que tous les appartements avaient entre-temps été vendus ;
- les défendeurs ont soulevé l'irrecevabilité de la demande de la demanderesse.
7. En considérant que, dès lors que les appartements ne sont plus la propriété de la demanderesse, la demande de la demanderesse a été transférée de plein droit aux acquéreurs de ces appartements, de sorte que la demande de la demanderesse est irrecevable, les juges d'appel n'ont pas légalement justifié leur décision.
Le moyen est fondé.
Par ces motifs,
La Cour
Casse l'arrêt attaqué ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêt cassé ;
Réserve les dépens pour qu'il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond ;
Renvoie la cause devant la cour d'appel d'Anvers.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, troisième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Eric Dirix, président, les conseillers Geert Jocqué, Antoine Lievens, Bart Wylleman et Koenraad Moens, et prononcé en audience publique du neuf mars deux mille vingt par le président de section Eric Dirix, en présence de l'avocat général Henri Vanderlinden, avec l'assistance du greffier Mike Van Beneden.


Synthèse
Formation : Chambre 3n - derde kamer
Numéro d'arrêt : C.19.0178.N
Date de la décision : 09/03/2020
Type d'affaire : Autres

Analyses

Sauf disposition contraire, la cession s’étend aussi aux droits cessibles qui sont si étroitement liés à la chose que l’intérêt qu’ils présentent dépend de la propriété de cette chose; il s’ensuit que, sauf disposition contraire, seul le cessionnaire a la qualité et l’intérêt requis pour faire valoir ces droits en justice; c’est également le cas, en principe, lorsque la cession survient après l’intentement de l’action en justice; les droits que le cédant a encore intérêt à exercer ne sont pas supposés compris dans la cession; lorsque le propriétaire forme une demande fondée sur un contrat synallagmatique portant sur une chose et que cette chose est ensuite cédée, le cédant conserve donc un intérêt à la demande si celle-ci constitue notamment une défense contre une demande reconventionnelle formée en vertu de ce contrat.

DEMANDE EN JUSTICE - Succession à titre particulier - Actions déjà exercées - Conséquence [notice1]


Références :

[notice1]

ancien Code Civil - 21-03-1804 - Art. 1615 - 30 / No pub 1804032150


Composition du Tribunal
Président : DIRIX ERIC
Greffier : VAN BENEDEN MIKE
Ministère public : VANDERLINDEN HENRI
Assesseurs : LIEVENS ANTOINE, WYLLEMAN BART, MOENS KOENRAAD, JOCQUE GEERT

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2020-03-09;c.19.0178.n ?

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