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27/05/2019 | BELGIQUE | N°S.18.0025.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 27 mai 2019, S.18.0025.N


N° S.18.0025.N
ENERSYS, sprl,
Me Willy van Eeckhoutte, avocat à la Cour de cassation,
contre
D.V.C.,
Me Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre un arrêt rendu le 24 novembre 2017 par la cour du travail de Bruxelles.
L'avocat général Henri Vanderlinden a déposé des conclusions le 26 avril 2019.
Le conseiller Antoine Lievens a fait rapport.
L'avocat général Henri Vanderlinden a conclu.
II. Les moyens de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrÃ

ªt en copie certifiée conforme, la demanderesse présente trois moyens.
III. La décision de la Cour...

N° S.18.0025.N
ENERSYS, sprl,
Me Willy van Eeckhoutte, avocat à la Cour de cassation,
contre
D.V.C.,
Me Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre un arrêt rendu le 24 novembre 2017 par la cour du travail de Bruxelles.
L'avocat général Henri Vanderlinden a déposé des conclusions le 26 avril 2019.
Le conseiller Antoine Lievens a fait rapport.
L'avocat général Henri Vanderlinden a conclu.
II. Les moyens de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, la demanderesse présente trois moyens.
III. La décision de la Cour
Sur le premier moyen :
Quant à la seconde branche :
1. En vertu de l'article 35, alinéa 3, de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, le congé pour motif grave ne peut plus être donné sans préavis ou avant l'expiration du terme, lorsque le fait qui l'aurait justifié est connu de la partie qui donne le congé depuis trois jours ouvrables au moins.
En vertu de l'article 35, dernier alinéa, de cette loi, la partie qui invoque le motif grave doit fournir la preuve qu'elle a respecté le délai prévu à l'alinéa 3.
2. Lorsque le fait qui justifierait la rupture du contrat de travail pour motif grave constitue un manquement continu, l'employeur détermine le moment à partir duquel ce manquement rend immédiatement et définitivement impossible toute collaboration professionnelle.
Dans un tel cas, afin d'apprécier le caractère tardif ou non du congé donné pour motif grave, le juge vérifie si le fait reproché a encore persisté jusqu'à trois jours ouvrables avant le congé.
Lorsque le juge considère que les manquements continus d'un travailleur, invoqués par l'employeur, constituent un motif grave, le licenciement sur-le-champ donné dans les trois jours ouvrables qui suivent la cessation des manquements pris en considération, est régulier, quand bien même l'employeur aurait déjà pu, à l'estime du juge, invoquer précédemment ces manquements comme motif grave.
3. Les juges d'appel ont considéré que :
- les faits reprochés à la défenderesse constituent un manquement continu, ce qui a pour conséquence que la ou les personnes compétentes pour licencier auraient pu avoir connaissance, pendant toute cette période des faits en question et des circonstances susceptibles de lui conférer le caractère de motif grave ;
- la notion de « personne compétente pour licencier » est une notion évolutive dans la vie d'une entreprise : il est certain que, dans le cadre des sociétés qui font partie d'un groupe international, les administrateurs ou les gérants d'entreprises sont régulièrement remplacés ;
- la demanderesse prétend que chacun des gérants était individuellement compétent pour procéder au licenciement d'un salarié ;
- il suffit que l'un des gérants ait eu connaissance des faits pour que le délai de trois jours prévu à l'article 35, alinéa 3, de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail puisse commencer à courir ;
- il n'est pas démontré par la demanderesse que, pendant la période concernée, les différentes personnes qui, dès la naissance du cartel, étaient seules compétentes pour procéder au licenciement, ignoraient l'existence ou la poursuite du cartel ;
- monsieur B., gérant à compter du 26 juin 2005, n'a peut-être pas été à la base de l'organisation et du maintien des ententes sur les prix, mais il en était à tout le moins au courant.
4. En considérant par ces motifs que la demanderesse « ne démontre pas, et à tout le moins pas de façon de adéquate, que les personnes qui étaient compétentes pour licencier au sein de [la demanderesse], ont respecté les délais de l'article 35, alinéa 3, de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail », les juges d'appel admettent que, en cas de manquement continu, le délai de trois jours commence à courir à partir du moment où l'une des personnes compétentes pour licencier a eu connaissance des faits, alors que le licenciement sur-le-champ, donné dans les trois jours ouvrables qui suivent la cessation des manquements continus pris en considération, est régulier, quand bien même l'employeur aurait déjà pu, à l'estime du juge, invoquer précédemment ces manquements à titre de motif grave.
Ainsi, les juges d'appel n'ont pas justifié légalement leur décision.
Le moyen, en cette branche, est fondé.
[...]
Par ces motifs,
La Cour
Casse l'arrêt attaqué, sauf en tant qu'il déclare recevable l'appel incident du défendeur.
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêt partiellement cassé.
Réserve les dépens pour qu'il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond ;
Renvoie la cause, ainsi limitée, devant la cour du travail d'Anvers.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, troisième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le premier président Beatrijs Deconinck, le président de section Eric Dirix, les conseillers Koen Mestdagh, Antoine Lievens et Koenraad Moens, et prononcé en audience publique du 27 mai 2019 par le premier président Beatrijs Deconinck, en présence de l'avocat général Henri Vanderlinden, avec l'assistance du greffier Mike Van Beneden.
Traduction établie sous le contrôle du conseiller Françoise Roggen et transcrite avec l'assistance du greffier Lutgarde Body.


Synthèse
Formation : Chambre 3n - derde kamer
Numéro d'arrêt : S.18.0025.N
Date de la décision : 27/05/2019
Type d'affaire : Droit du travail

Analyses

Lorsque le fait qui justifierait la rupture du contrat de travail pour motif grave constitue un manquement continu, l'employeur détermine le moment à partir duquel ce manquement rend immédiatement et définitivement impossible toute collaboration professionnelle (1). (1) Voir les concl. du MP publiées à leur date dans AC.

CONTRAT DE TRAVAIL - FIN - Motif grave - Manquement continu - Moment [notice1]

Dans un tel cas, afin d'apprécier le caractère tardif ou non du congé donné pour motif grave, le juge vérifie si le fait reproché a encore persisté jusqu'à trois jours ouvrables avant le congé; lorsque le juge considère que les manquements continus d'un travailleur invoqués par l'employeur constituent un motif grave, le licenciement sur-le-champ donné dans les trois jours ouvrables qui suivent la cessation des manquements pris en considération, est régulier, quand bien même l'employeur aurait déjà pu, à l'estime du juge, invoquer précédemment ces manquements à titre de motif grave (1). (1) Voir les concl. du MP publiées à leur date dans AC.

CONTRAT DE TRAVAIL - FIN - Motif grave - Manquement continu - Moment à partir duquel le congé est donné [notice2]


Références :

[notice1]

L. du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail - 03-07-1978 - Art. 35, al. 1er, 2, et 3 - 01 / No pub 1978070303

[notice2]

L. du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail - 03-07-1978 - Art. 35, al. 1er, 2, et 3 - 01 / No pub 1978070303


Composition du Tribunal
Président : DECONINCK BEATRIJS
Greffier : VAN BENEDEN MIKE
Ministère public : VANDERLINDEN HENRI
Assesseurs : DIRIX ERIC, LIEVENS ANTOINE, MOENS KOENRAAD, MESTDAGH KOEN

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2019-05-27;s.18.0025.n ?

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