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28/06/2019 | FRANCE | N°426703

France | France, Conseil d'État, 2ème - 7ème chambres réunies, 28 juin 2019, 426703


Vu la procédure suivante :

Par un arrêt n° 17NC03013 du 27 décembre 2018, enregistré le 28 décembre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la cour administrative d'appel de Nancy, avant de statuer sur la requête de M. B...A...et Mme C...A...tendant d'une part à l'annulation du jugement du 19 octobre 2017 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne rejetant leur demande d'annulation des arrêtés du 22 août 2016 par lesquels la préfète de la Haute-Marne a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire franÃ

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Vu la procédure suivante :

Par un arrêt n° 17NC03013 du 27 décembre 2018, enregistré le 28 décembre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la cour administrative d'appel de Nancy, avant de statuer sur la requête de M. B...A...et Mme C...A...tendant d'une part à l'annulation du jugement du 19 octobre 2017 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne rejetant leur demande d'annulation des arrêtés du 22 août 2016 par lesquels la préfète de la Haute-Marne a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils pourraient être éloignés, d'autre part à ce qu'il soit enjoint à la préfète de réexaminer leur situation dans un délai de deux mois, a décidé, en application des dispositions de l'article L. 113-1 du code de justice administrative, de transmettre le dossier de cette requête au Conseil d'Etat, en soumettant à son examen les questions suivantes :

1°) Dans l'hypothèse où un étranger à qui a été refusée la reconnaissance de la qualité de réfugié ou de la protection subsidiaire, a également présenté une demande tendant à la délivrance ou au renouvellement d'un titre de séjour, l'autorité administrative peut-elle également assortir le refus qu'elle est susceptible d'opposer à cette demande d'une obligation de quitter le territoire français fondée à la fois sur le 3° et sur le 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile '

2°) Dans l'affirmative, le recours dirigé contre une telle décision obéit-il au régime contentieux spécifique défini au I bis de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou relève-t-il du régime de droit commun prévu au I de l'article L. 512-1 du même code '

.................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 ;

- le code de justice administrative, notamment son article L. 113-1 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. François Weil, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Guillaume Odinet, rapporteur public,

REND L'AVIS SUIVANT :

1. En premier lieu, les dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile énumèrent les cas dans lesquels l'autorité administrative peut prononcer une obligation de quitter le territoire français à l'encontre d'un ressortissant étranger. Aux termes de ces dispositions, dans leur rédaction résultant de la loi du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France et antérieure aux modifications introduites au 6° de ce paragraphe par l'article 23 de la loi du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie, l'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant, au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1 du même code, en particulier lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : " (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ". Depuis l'entrée en vigueur de la loi du 10 septembre 2018, le 6° du I de l'article L. 511-1 de ce code dispose qu'une obligation de quitter le territoire français peut être édictée par l'autorité administrative dans le cas suivant : " Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 743-1 et L. 743-2, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité. Lorsque, dans l'hypothèse mentionnée à l'article L. 311-6, un refus de séjour a été opposé à l'étranger, la mesure peut être prise sur le seul fondement du présent 6° ".

2. Avant comme après leur modification par la loi du 10 septembre 2018, les dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne font pas obstacle, dans l'hypothèse où un étranger à qui a été refusée la reconnaissance de la qualité de réfugié ou la protection subsidiaire, a également présenté une demande tendant à la délivrance ou au renouvellement d'un titre de séjour, à ce que l'autorité administrative assortisse le refus qu'elle est susceptible d'opposer à cette demande d'une obligation de quitter le territoire français fondée à la fois sur le 3° et sur le 6° du I de cet article.

3. En second lieu, les dispositions du I et du I bis de l'article L. 512-1 du même code définissent deux régimes contentieux distincts applicables à la contestation par un étranger de l'obligation qui lui est faite de quitter le territoire français. Aux termes du I, dans sa rédaction issue de la loi du 7 mars 2016 : " L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sur le fondement des 3°, 5°, 7° ou 8° du I de l'article L. 511-1 ou sur le fondement de l'article L. 511-3-1 et qui dispose du délai de départ volontaire mentionné au premier alinéa du II de l'article L. 511-1 ou au sixième alinéa de l'article L. 511-3-1 peut, dans le délai de trente jours suivant sa notification, demander au tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français ou d'interdiction de circulation sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant ". Aux termes du I bis, dans sa rédaction issue de la loi du 7 mars 2016 : " L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sur le fondement des 1°, 2°, 4° ou 6° du I de l'article L. 511-1 et qui dispose du délai de départ volontaire mentionné au premier alinéa du II du même article L. 511-1 peut, dans un délai de quinze jours à compter de sa notification, demander au président du tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant (...) ". La loi du 10 septembre 2018 précitée a complété les dispositions du I bis pour prévoir que : " La même procédure s'applique lorsque l'étranger conteste une obligation de quitter le territoire fondée sur le 6° du I dudit article L. 511-1 et une décision relative au séjour intervenue concomitamment. Dans cette hypothèse, le président du tribunal administratif ou le juge qu'il désigne à cette fin statue par une seule décision sur les deux contestations ".

4. Il résulte de ces dispositions dans leur version antérieure et postérieure à la loi du 10 septembre 2018 que, lorsqu'une décision relative au séjour est intervenue concomitamment et a fait l'objet d'une contestation à l'occasion d'un recours dirigé contre une obligation de quitter le territoire français prise sur le fondement du 6° du I de l'article L. 511-1, cette contestation suit le régime contentieux applicable à l'obligation de quitter le territoire, alors même qu'elle a pu être prise également sur le fondement du 3° du I de cet article. Dès lors, les dispositions du I bis de l'article L. 512-1 ainsi, notamment, que celles de l'article R. 776-26 du code de justice administrative sont applicables à l'ensemble des conclusions présentées devant le juge administratif dans le cadre de ce litige, y compris celles tendant à l'annulation de la décision relative au séjour.

Le présent avis sera notifié à la cour administrative d'appel de Nancy, à M. B... A...et Mme C...A..., et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 2ème - 7ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 426703
Date de la décision : 28/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

ÉTRANGERS - SÉJOUR DES ÉTRANGERS - TEXTES APPLICABLES - TEXTES LÉGISLATIFS ET RÉGLEMENTAIRES - ETRANGER DÉBOUTÉ DU DROIT D'ASILE ET AYANT PRÉSENTÉ UNE DEMANDE DE TITRE DE SÉJOUR - 1) POSSIBILITÉ POUR L'AUTORITÉ ADMINISTRATIVE D'ASSORTIR LE REFUS DE TITRE D'UNE OQTF FONDÉE À LA FOIS SUR LE 3° (REFUS DE TITRE) ET SUR LE 6° (REFUS D'ASILE) DU I DE L'ARTICLE L - 511-1 DU CESEDA - EXISTENCE - 2) CONTESTATION DU REFUS DE TITRE PRIS CONCOMITAMMENT À L'OQTF - APPLICABILITÉ À L'ENSEMBLE DES CONCLUSIONS DU RÉGIME CONTENTIEUX DE L'OQTF DU 6° DU I DE L'ARTICLE L - 511-1 [RJ1].

335-01-01-01 1) En premier lieu, avant comme après leur modification par la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018, les dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ne font pas obstacle, dans l'hypothèse où un étranger à qui a été refusée la reconnaissance de la qualité de réfugié ou la protection subsidiaire, a également présenté une demande tendant à la délivrance ou au renouvellement d'un titre de séjour, à ce que l'autorité administrative assortisse le refus qu'elle est susceptible d'opposer à cette demande d'une obligation de quitter le territoire français fondée à la fois sur le 3° et sur le 6° du I de cet article.,,,2) En second lieu, il résulte du I et du I bis de l'article L. 512-1 du CESEDA dans leur version antérieure et postérieure à la loi du 10 septembre 2018 que, lorsqu'une décision relative au séjour est intervenue concomitamment et a fait l'objet d'une contestation à l'occasion d'un recours dirigé contre une obligation de quitter le territoire français prise sur le fondement du 6° du I de l'article L. 511-1, cette contestation suit le régime contentieux applicable à l'obligation de quitter le territoire, alors même qu'elle a pu être prise également sur le fondement du 3° du I de cet article. Dès lors, les dispositions du I bis de l'article L. 512-1 ainsi, notamment, que celles de l'article R. 776-26 du code de justice administrative (CJA), sont applicables à l'ensemble des conclusions présentées devant le juge administratif dans le cadre de ce litige, y compris celles tendant à l'annulation de la décision relative au séjour.

ÉTRANGERS - SÉJOUR DES ÉTRANGERS - REFUS DE SÉJOUR - QUESTIONS GÉNÉRALES - ETRANGER DÉBOUTÉ DU DROIT D'ASILE ET AYANT PRÉSENTÉ UNE DEMANDE DE TITRE DE SÉJOUR - 1) POSSIBILITÉ POUR L'AUTORITÉ ADMINISTRATIVE D'ASSORTIR LE REFUS DE TITRE D'UNE OQTF FONDÉE À LA FOIS SUR LE 3° (REFUS DE TITRE) ET SUR LE 6° (REFUS D'ASILE) DU I DE L'ARTICLE L - 511-1 DU CESEDA - EXISTENCE - 2) CONTESTATION DU REFUS DE TITRE PRIS CONCOMITAMMENT À L'OQTF - APPLICABILITÉ À L'ENSEMBLE DES CONCLUSIONS DU RÉGIME CONTENTIEUX DE L'OQTF DU 6° DU I DE L'ARTICLE L - 511-1 [RJ1].

335-01-03-01 1) En premier lieu, avant comme après leur modification par la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018, les dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ne font pas obstacle, dans l'hypothèse où un étranger à qui a été refusée la reconnaissance de la qualité de réfugié ou la protection subsidiaire, a également présenté une demande tendant à la délivrance ou au renouvellement d'un titre de séjour, à ce que l'autorité administrative assortisse le refus qu'elle est susceptible d'opposer à cette demande d'une obligation de quitter le territoire français fondée à la fois sur le 3° et sur le 6° du I de cet article.,,,2) En second lieu, il résulte du I et du I bis de l'article L. 512-1 du CESEDA dans leur version antérieure et postérieure à la loi du 10 septembre 2018 que, lorsqu'une décision relative au séjour est intervenue concomitamment et a fait l'objet d'une contestation à l'occasion d'un recours dirigé contre une obligation de quitter le territoire français prise sur le fondement du 6° du I de l'article L. 511-1, cette contestation suit le régime contentieux applicable à l'obligation de quitter le territoire, alors même qu'elle a pu être prise également sur le fondement du 3° du I de cet article. Dès lors, les dispositions du I bis de l'article L. 512-1 ainsi, notamment, que celles de l'article R. 776-26 du code de justice administrative (CJA), sont applicables à l'ensemble des conclusions présentées devant le juge administratif dans le cadre de ce litige, y compris celles tendant à l'annulation de la décision relative au séjour.

ÉTRANGERS - OBLIGATION DE QUITTER LE TERRITOIRE FRANÇAIS (OQTF) ET RECONDUITE À LA FRONTIÈRE - RÈGLES DE PROCÉDURE CONTENTIEUSE SPÉCIALES - CONTESTATION DU REFUS DE TITRE PRIS CONCOMITAMMENT À UNE OQTF FONDÉE SUR LE 6° DU I DE L'ARTICLE L - 511-1 DU CESEDA - APPLICABILITÉ À L'ENSEMBLE DES CONCLUSIONS DU RÉGIME CONTENTIEUX D'UNE TELLE OQTF - MÊME SI CELLE-CI A ÉTÉ PRISE ÉGALEMENT SUR LE FONDEMENT DU 3° DU I DU L - 511-1 [RJ1].

335-03-03 Il résulte du I et du I bis de l'article L. 512-1 du CESEDA dans leur version antérieure et postérieure à la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 que, lorsqu'une décision relative au séjour est intervenue concomitamment et a fait l'objet d'une contestation à l'occasion d'un recours dirigé contre une obligation de quitter le territoire français (OQTF) prise sur le fondement du 6° du I de l'article L. 511-1, cette contestation suit le régime contentieux applicable à l'OQTF, alors même qu'elle a pu être prise également sur le fondement du 3° du I de cet article. Dès lors, les dispositions du I bis de l'article L. 512-1 ainsi, notamment, que celles de l'article R. 776-26 du code de justice administrative (CJA), sont applicables à l'ensemble des conclusions présentées devant le juge administratif dans le cadre de ce litige, y compris celles tendant à l'annulation de la décision relative au séjour.


Références :

[RJ1]

Rappr., s'agissant d'un refus de titre de séjour pris concomitamment à une OQTF fondée sur le 1°, 2°, 4° ou 6° du I de l'art. L. 511-1 du CESEDA, CE, 19 juillet 2017, Mme,, n° 408902, p. 262.


Publications
Proposition de citation : CE, 28 jui. 2019, n° 426703
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. François Weil

Origine de la décision
Date de l'import : 04/08/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:426703.20190628
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