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19/07/2017 | FRANCE | N°399174

France | France, Conseil d'État, 1ère - 6ème chambres réunies, 19 juillet 2017, 399174


Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 27 avril et 20 octobre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Astrazeneca demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du collège des directeurs de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie du 23 février 2016 relative à la procédure d'accord préalable pour bénéficier de la prise en charge de la rosuvastatine ;

2°) subsidiairement, de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudic

ielle tendant à l'interprétation de l'article 6, combiné avec l'article 1er, de la dir...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 27 avril et 20 octobre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Astrazeneca demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du collège des directeurs de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie du 23 février 2016 relative à la procédure d'accord préalable pour bénéficier de la prise en charge de la rosuvastatine ;

2°) subsidiairement, de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle tendant à l'interprétation de l'article 6, combiné avec l'article 1er, de la directive 89/105/CEE du Conseil du 21 décembre 1988 ;

3°) de mettre à la charge de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la directive 89/105/CEE du Conseil du 21 décembre 1988 ;

- la directive (UE) 2015/1535 du Parlement européen et du Conseil du 9 septembre 2015 ;

- le code civil, notamment son article 1er ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 26 juin 2017, présentée pour la société Astrazeneca ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 27 juin 2017, présentée pour l'UNCAM ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Frédéric Puigserver, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Rémi Decout-Paolini, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 315-1 du code de la sécurité sociale : " I.- Le contrôle médical porte sur tous les éléments d'ordre médical qui commandent l'attribution et le service de l'ensemble des prestations de l'assurance maladie, maternité et invalidité ainsi que des prestations prises en charge en application des articles L. 251-2 et L. 254-1 du code de l'action sociale et des familles. (...) ". Aux termes de l'article L. 315-2 du même code : " Les avis rendus par le service du contrôle médical portant sur les éléments définis au I de l'article L 315-1 s'imposent à l'organisme de prise en charge. / Le bénéfice de certaines prestations mentionnées au I de l'article L. 315-1 peut être subordonné à l'accord préalable du service du contrôle médical. Cet accord préalable peut être exigé pour les prestations dont : / - la nécessité doit être appréciée au regard d'indications déterminées ou de conditions particulières d'ordre médical ; / - la justification, du fait de leur caractère innovant ou des risques encourus par le bénéficiaire, doit être préalablement vérifiée eu égard notamment à l'état du bénéficiaire et aux alternatives thérapeutiques possibles ; / - le caractère particulièrement coûteux doit faire l'objet d'un suivi particulier afin d'en évaluer l'impact sur les dépenses de l'assurance maladie ou de l'Etat en ce qui concerne les prestations servies en application des articles L. 251-2 et L. 254-1 du code de l'action sociale et des familles. / Il est précisé lors de la prise en charge des prestations mentionnées au I de l'article L. 315-1 que leur bénéfice est, le cas échéant, subordonné à l'accord préalable mentionné ci-dessus. / Les conditions d'application des alinéas précédents sont fixées par décision du collège des directeurs de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie. (...) ". Ces conditions d'application ont été fixées par une décision du collège des directeurs de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie du 24 juin 2014, qui a notamment précisé les critères de soumission à accord préalable et prévu que les décisions de mise en oeuvre de cette procédure relevaient de sa compétence.

2. Par une décision du 23 février 2016, dont la société Astrazeneca demande l'annulation, le collège des directeurs de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie a décidé de subordonner la prise en charge de tout nouveau traitement par rosuvastatine à l'accord préalable du service du contrôle médical. L'article 1er de cette décision définit, à son premier alinéa, la notion de nouveau traitement et dispose, à son second alinéa que : " Le médecin prescripteur établit la demande d'accord préalable en ligne sur son compte professionnel de santé sécurisé (...) ou complète le formulaire "Demande d'accord préalable Médicaments hypocholestérolémiants" qu'il adresse au service du contrôle médical placé près l'organisme d'assurance maladie de l'assuré ". Son article 2 prévoit que le service du contrôle médical examine la demande conformément à un logigramme d'aide à la décision joint en annexe. Selon son article 3, l'absence de réponse par l'organisme d'assurance maladie dans le délai de quinze jours vaut accord de prise en charge. Enfin, l'article 4 de la décision attaquée prévoit qu'elle est publiée au Journal officiel de la République française et qu'" elle entre en vigueur pour tous les traitements initiés à compter de sa publication ".

Sur la procédure préalable à l'adoption de la décision attaquée :

3. En premier lieu, il résulte des article 1er et 5 de la directive (UE) 2015/1535 du Parlement européen et du Conseil du 9 septembre 2015 prévoyant une procédure d'information dans le domaine des réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l'information que l'obligation de communication à la Commission européenne des projets de règles techniques qu'elle prévoit s'applique, d'une part, aux spécifications techniques et autres exigences imposées aux produits et, d'autre part, aux règles relatives aux services de la société de l'information, " c'est-à-dire tout service presté normalement contre rémunération, à distance, par voie électronique et à la demande individuelle d'un destinataire de services ". En outre, le f) du 1 de l'article 1er de la directive, qui définit la notion de " règles techniques de facto ", précise que " ne sont pas concernées les spécifications techniques ou autres exigences ou les règles relatives aux services liées aux régimes nationaux de sécurité sociale ".

4. La décision d'accord préalable du service du contrôle médical à laquelle l'article L. 315-2 du code de la sécurité sociale permet de subordonner notamment le remboursement de certains médicaments par l'assurance maladie ne peut être regardée, contrairement à ce que soutient la société requérante, comme un service de la société de l'information au sens de la directive 2015/1535 du 9 septembre 2015, quelles que soient les modalités techniques de présentation de la demande d'accord. L'exigence d'un tel accord ne peut pas plus être regardée, eu égard à son objet, comme une règle technique applicable aux médicaments au sens de cette directive, quelle que soit son incidence sur leur commercialisation. Il suit de là que la décision attaquée n'entre pas dans le champ de la directive et que, dès lors, la société requérante n'est pas fondée à soutenir qu'elle aurait dû faire l'objet, en vertu de ce texte, d'une information préalable de la Commission européenne.

5. En second lieu, aux termes de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " 1. Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions, organes et organismes de l'Union. / 2. Ce droit comporte notamment : / a) le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre (...) ". Il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que cet article s'adresse non aux Etats membres mais uniquement aux institutions, organes et organismes de l'Union. Ainsi, le moyen tiré de leur violation par la décision attaquée, prise par une autorité d'un Etat membre, est inopérant.

Sur l'exception d'illégalité de la décision de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie du 24 juin 2014 :

6. Aux termes de l'article 1er de la directive 89/105/CEE du Conseil du 21 décembre 1988 concernant la transparence des mesures régissant la fixation des prix des médicaments à usage humain et leur inclusion dans le champ d'application des systèmes nationaux d'assurance-maladie : " 1. Les États membres veillent à ce que toute mesure nationale, qu'elle soit de nature législative, réglementaire ou administrative, en vue de contrôler les prix des médicaments à usage humain ou de restreindre la gamme des médicaments couverts par leurs systèmes nationaux d'assurance-maladie, soit conforme aux exigences de la présente directive (...) ". Aux termes de son article 6 : " Les dispositions suivantes sont applicables lorsqu'un médicament n'est couvert par le système national d'assurance-maladie qu'après que les autorités compétentes ont décidé d'inclure le médicament en question dans une liste positive de médicaments couverts par le système national d'assurance-maladie. (...) 2) Toute décision de ne pas inscrire un médicament sur la liste des produits couverts par le système d'assurance-maladie comporte un exposé des motifs fondé sur des critères objectifs et vérifiables, y compris, si nécessaire, les avis ou recommandations des experts sur lesquels les décisions s'appuient. (...) 3) Les États membres publient dans une publication appropriée et communiquent à la Commission (...) les critères sur lesquels les autorités compétentes doivent se fonder pour décider d'inscrire ou non des médicaments sur les listes. (...) 5) Toute décision d'exclure un produit de la liste des produits couverts par le système national d'assurance-maladie comporte un exposé des motifs fondé sur des critères objectifs et vérifiables. (...) 6) Toute décision d'exclure une catégorie de médicaments de la liste des produits couverts par le système national d'assurance-maladie comporte un exposé des motifs fondé sur des critères objectifs et vérifiables (...) ".

7. Dans un arrêt C-271/14 et C-273/14 du 16 avril 2015, la Cour de justice de l'Union européenne a jugé que, pour garantir l'effet utile de la directive du Conseil du 21 décembre 1988, il était nécessaire " de permettre aux intéressés de s'assurer que l'inscription administrative de médicaments répond à des critères objectifs et qu'aucune discrimination n'est opérée entre les médicaments nationaux et ceux provenant d'autres États membres " et a dit pour droit que son article 6 doit être interprété en ce sens que l'obligation de motivation qu'il prévoit à ses points 3 et 5 est applicable à une décision qui, bien que n'ayant pas pour effet d'exclure un médicament de la prise en charge par l'assurance maladie, restreint toutefois les conditions de son remboursement. Il est clair qu'il en va de même, en application du point 6 de ce même article, de toute décision ayant pour effet de restreindre les conditions du remboursement d'une catégorie de produits.

8. D'une part, il appartenait au collège des directeurs de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie, compétent en vertu de l'article L. 315-2 du code de la sécurité sociale, cité au point 1, pour fixer les conditions dans lesquelles le bénéfice de certaines prestations peut être subordonné à l'accord préalable du service du contrôle médical, d'adopter les dispositions nécessaires pour se conformer aux objectifs de la directive du Conseil du 21 décembre 1988 et, à ce titre, d'imposer la motivation des décisions de soumission à accord préalable. Toutefois, en l'espèce, la décision attaquée satisfait directement à l'exigence de motivation résultant de l'article 6 de la directive du Conseil du 21 décembre 1988, alors même que la décision du 24 juin 2014 relative à la procédure d'accord préalable prévue à l'article L. 315-2 du code de la sécurité sociale ne prévoit pas une telle obligation. Par suite, l'illégalité, sur ce point, de la décision du 24 juin 2014 est restée sans incidence sur la légalité de la décision attaquée.

9. D'autre part, il résulte également de l'article 6 de la directive du Conseil du 21 décembre 1988 que l'exigence d'un accord préalable du service du contrôle médical pour bénéficier d'une prestation de l'assurance maladie, maternité et invalidité doit être fondée sur des critères ayant fait l'objet d'une publication et d'une communication à la Commission. Toutefois, ces critères ont été fixés par l'article L. 315-2 du code de la sécurité sociale et par la décision du 24 juin 2014 et aucune disposition n'imposant leur communication préalablement à l'adoption de l'acte qui les définit, la société requérante ne peut utilement soutenir que le défaut de communication, à le supposer avéré, serait de nature à entacher d'illégalité la décision du 24 juin 2014.

10. Il suit de là que les moyens tirés, par la voie de l'exception, de l'illégalité de la décision du 24 juin 2014 doivent être écartés.

Sur le principe et les modalités de la soumission à accord préalable :

11. En premier lieu, il résulte des dispositions de l'article L. 315-2 du code de la sécurité sociale que l'accord préalable du service du contrôle médical peut notamment être exigé pour les prestations dont " le caractère particulièrement coûteux doit faire l'objet d'un suivi particulier afin d'en évaluer l'impact sur les dépenses de l'assurance maladie ". A cet égard, la décision du collège des directeurs de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie du 24 juin 2014 précise que : " le caractère particulièrement coûteux de la prestation s'apprécie soit pour des prestations qui sont intrinsèquement coûteuses, soit pour des prestations dont l'utilisation massive ou non conforme aux recommandations engendre un coût global important pour l'assurance maladie ".

12. En l'espèce, la décision attaquée est fondée sur " le caractère particulièrement coûteux de la prise en charge de la rosuvastatine par l'assurance maladie ainsi que le non-respect des recommandations de la Haute Autorité de santé ".

13. D'une part, il ressort des pièces du dossier que la spécialité Crestor, spécialité contenant de la rosuvastatine, a représenté, au cours de l'année 2013, une dépense de remboursement de 342,8 millions d'euros pour l'assurance maladie, au troisième rang des médicaments de ville pour le montant de remboursement. En outre, le coût journalier d'un traitement par Crestor est supérieur au double de celui de la plupart des autres statines, classe d'hypolipémiants dont relève la rosuvastatine, pour une efficacité et une tolérance équivalentes. Dans ces conditions, le caractère particulièrement coûteux du traitement par Crestor, au sens de l'article L. 315-2 du code de la sécurité sociale, doit être regardé comme établi.

14. D'autre part, ni les dispositions de l'article L. 315-2 du code de la sécurité sociale ni d'ailleurs celles de la décision du 24 juin 2014 ne faisaient obstacle à ce que le collège des directeurs de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie fonde sa décision sur la méconnaissance des recommandations de la Haute Autorité de santé figurant dans la fiche de bon usage du médicament de février 2012, mentionnée dans les visas de cette décision, intitulée " Prévention cardio-vasculaire : le choix de la statine la mieux adaptée dépend de son efficacité et de son efficience ", alors même que cette fiche ne relève pas de la catégorie des recommandations de bonnes pratiques prévues par le 2° de l'article L. 161-37 du code de la sécurité sociale, mais seulement des " fiches sur le bon usage de certains médicaments permettant notamment de définir leur place dans la stratégie thérapeutique ", prévues par le 1° bis ajouté au même article, postérieurement à l'élaboration de la fiche considérée, par la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé.

15. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que les motifs de la décision attaquée seraient entachés d'erreur de droit au regard des dispositions de l'article L. 315-2 du code de la sécurité sociale ou reposeraient sur des faits matériellement inexacts.

16. En deuxième lieu, la décision attaquée prévoit que le service du contrôle médical statue conformément à un logigramme d'aide à la décision qui est, aux termes même de son article 2, " fondé " sur la fiche de bon usage du médicament de la Haute Autorité de santé de février 2012. D'une part, contrairement à ce que soutient la société requérante, le collège des directeurs de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie pouvait légalement s'inspirer d'une telle fiche. D'autre part, le logigramme annexé à la décision attaquée étant seulement " fondé " sur cette fiche, le moyen d'erreur de fait, tiré de ce qu'il ne serait pas en tout point conforme à celle-ci, ne peut qu'être écarté.

17. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 162-2 du code de la sécurité sociale : " Dans l'intérêt des assurés sociaux et de la santé publique, le respect de la liberté d'exercice et de l'indépendance professionnelle et morale des médecins est assuré conformément aux principes déontologiques fondamentaux que sont le libre choix du médecin par le malade, la liberté de prescription du médecin (...) ". Aux termes de l'article L. 162-2-1 du même code : " Les médecins sont tenus, dans tous leurs actes et prescriptions, d'observer, dans le cadre de la législation et de la réglementation en vigueur, la plus stricte économie compatible avec la qualité, la sécurité et l'efficacité des soins ". La possibilité de subordonner à l'accord préalable du service du contrôle médical la prise en charge de certaines prestations dont le caractère particulièrement coûteux doit faire l'objet d'un suivi particulier afin d'en évaluer l'impact sur les dépenses de l'assurance maladie résulte de l'article L. 315-2 du code de la sécurité sociale. Enfin, aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 5125-23 du code de la santé publique : " Si la prescription libellée en dénomination commune peut être respectée par la délivrance d'une spécialité figurant dans un groupe générique (...), le pharmacien délivre une spécialité appartenant à ce groupe (...) ".

18. D'une part, la décision attaquée met en oeuvre la procédure d'accord préalable pour les traitements par rosuvastatine conformément aux dispositions de l'article L. 315-2 du code de la sécurité sociale. D'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier que les critères dont elle prévoit l'application par le service du contrôle médical ne seraient pas adaptés à l'objectif de plus stricte économie compatible avec la qualité, la sécurité et l'efficacité des soins. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir qu'elle porterait une atteinte illégale à la liberté de prescription, en méconnaissance des dispositions législatives applicables. Par ailleurs, la circonstance que les praticiens pourraient prescrire d'autres statines qui, à la différence de la rosuvastatine, figurent dans un groupe générique, n'est pas de nature, par elle-même, à caractériser un détournement de procédure.

Sur la date d'entrée en vigueur de la décision attaquée :

19. D'une part, aux termes de l'article 1er du code civil : " Les lois et, lorsqu'ils sont publiés au Journal officiel de la République française, les actes administratifs entrent en vigueur à la date qu'ils fixent ou, à défaut, le lendemain de leur publication. Toutefois, l'entrée en vigueur de celles de leurs dispositions dont l'exécution nécessite des mesures d'application est reportée à la date d'entrée en vigueur de ces mesures. / En cas d'urgence, entrent en vigueur dès leur publication les lois dont le décret de promulgation le prescrit et les actes administratifs pour lesquels le Gouvernement l'ordonne par une disposition spéciale. / Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux actes individuels ". Aux termes de l'article L. 221-2 du code des relations entre le public et l'administration, entré en vigueur le 1er janvier 2016 : " L'entrée en vigueur d'un acte réglementaire est subordonnée à l'accomplissement de formalités adéquates de publicité, notamment par la voie, selon les cas, d'une publication ou d'un affichage, sauf dispositions législatives ou réglementaires contraires ou instituant d'autres formalités préalables. / Un acte réglementaire entre en vigueur le lendemain du jour de l'accomplissement des formalités prévues au premier alinéa, sauf à ce qu'il en soit disposé autrement par la loi, par l'acte réglementaire lui-même ou par un autre règlement. Toutefois, l'entrée en vigueur de celles de ses dispositions dont l'exécution nécessite des mesures d'application est reportée à la date d'entrée en vigueur de ces mesures ". Aux termes de l'article L. 221-3 du même code : " Lorsque les actes mentionnés à l'article L. 221-2 sont publiés au Journal officiel de la République française, ils entrent en vigueur, dans les conditions prévues à l'article 1er du code civil, à la date qu'ils fixent ou, à défaut, le lendemain de leur publication. Il en va différemment, ainsi que le prévoit ce même article, en cas d'urgence ou lorsque des mesures d'application sont nécessaires à l'exécution du texte ".

20. D'autre part, aux termes de l'article L. 221-9 du code des relations entre le public et l'administration : " Sont publiés au Journal officiel de la République française les lois, les ordonnances accompagnées d'un rapport de présentation, les décrets et, lorsqu'une loi ou un décret le prévoit, les autres actes administratifs ".

21. Il résulte des dispositions citées au point 19 qu'un acte réglementaire publié au Journal officiel de la République française, qu'il relève ou non des actes devant obligatoirement y être publiés en vertu de l'article L. 221-9 du code des relations entre le public et l'administration, entre en vigueur dans les conditions prévues par l'article 1er du code civil.

22. Il ressort des pièces du dossier que la décision attaquée a été publiée au Journal officiel de la République française du 10 mars 2016. En l'absence de disposition spéciale prise par le Gouvernement sur le fondement du deuxième alinéa de l'article 1er du code civil, justifiée par l'urgence, cette décision ne pouvait légalement prévoir, au second alinéa de son article 4, qu'elle s'appliquerait à tous les traitements par rosuvastatine instaurés à compter de sa publication et non du lendemain de cette publication. Elle doit, dès lors, être annulée dans cette mesure.

23. Il résulte de tout ce qui précède que la société Astrazeneca est seulement fondée à demander l'annulation de la décision attaquée en tant que, par le second alinéa de son article 4, elle fixe sa date d'entrée en vigueur le jour de sa publication au Journal officiel de la République française.

Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige :

24. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie, qui ne peut être regardée comme la partie perdante. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Astrazeneca la somme que cette Union demande au même titre.

D E C I D E :

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Article 1er : Le second alinéa de l'article 4 de la décision du collège des directeurs de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie du 23 février 2016 relative à la procédure d'accord préalable pour bénéficier de la prise en charge de la rosuvastatine est annulé.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la société Astrazeneca est rejeté.

Article 3 : Les conclusions de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société Astrazeneca et à l'Union nationale des caisses d'assurance maladie.

Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales et de la santé.


Synthèse
Formation : 1ère - 6ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 399174
Date de la décision : 19/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - PROMULGATION - PUBLICATION - NOTIFICATION - PUBLICATION - EFFETS DE LA PUBLICATION - EFFET DE LA PUBLICATION D'UN ACTE RÉGLEMENTAIRE AU JORF - ENTRÉE EN VIGUEUR DANS LES CONDITIONS PRÉVUES PAR L'ART - 1ER DU CODE CIVIL - EXISTENCE - QUE CETTE PUBLICATION SOIT OU NON OBLIGATOIRE.

01-07-02-03 Un acte réglementaire publié au Journal officiel de la République française (JORF), qu'il relève ou non des actes devant obligatoirement y être publiés en vertu de l'article L. 221-9 du code des relations entre le public et l'administration, entre en vigueur dans les conditions prévues par l'article 1er du code civil.

ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - APPLICATION DANS LE TEMPS - ENTRÉE EN VIGUEUR - ENTRÉE EN VIGUEUR D'UN ACTE RÉGLEMENTAIRE PUBLIÉ AU JORF - APPLICATION DE L'ART - 1ER DU CODE CIVIL - EXISTENCE - QUE CETTE PUBLICATION SOIT OU NON OBLIGATOIRE.

01-08-01 Un acte réglementaire publié au Journal officiel de la République française (JORF), qu'il relève ou non des actes devant obligatoirement y être publiés en vertu de l'article L. 221-9 du code des relations entre le public et l'administration, entre en vigueur dans les conditions prévues par l'article 1er du code civil.


Publications
Proposition de citation : CE, 19 jui. 2017, n° 399174
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Frédéric Puigserver
Rapporteur public ?: M. Rémi Decout-Paolini
Avocat(s) : SCP FOUSSARD, FROGER

Origine de la décision
Date de l'import : 12/09/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:399174.20170719
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