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08/11/2017 | FRANCE | N°390059

France | France, Conseil d'État, 4ème - 5ème chambres réunies, 08 novembre 2017, 390059


Vu la procédure suivante :

La CFE-CGC fédération de l'assurance a demandé à la cour administrative d'appel de Paris d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social du 24 décembre 2013 fixant la liste des organisations syndicales reconnues représentatives dans les branches des sociétés d'assurances. Par un arrêt n° 14PA00961 du 9 mars 2015, la cour administrative d'appel de Paris a annulé l'article 2 de cet arrêté et rejeté le surplus des conclusions de la requête.

Par un pourvoi

sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique enregistrés les...

Vu la procédure suivante :

La CFE-CGC fédération de l'assurance a demandé à la cour administrative d'appel de Paris d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social du 24 décembre 2013 fixant la liste des organisations syndicales reconnues représentatives dans les branches des sociétés d'assurances. Par un arrêt n° 14PA00961 du 9 mars 2015, la cour administrative d'appel de Paris a annulé l'article 2 de cet arrêté et rejeté le surplus des conclusions de la requête.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique enregistrés les 11 mai et 11 août 2015 et le 28 avril 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la fédération CFDT banques et assurances demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt en tant qu'il annule l'article 2 de l'arrêté du 24 décembre 2013 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'intégralité de la requête de la CFE-CGC fédération de l'assurance ;

3°) de mettre à la charge de la CFE-CGC fédération de l'assurance la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code du travail ;

- la convention collective nationale des sociétés d'assurance du 27 mai 1992 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bruno Bachini, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Frédéric Dieu, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, Coudray, avocat de la fédération CFDT banques et assurances et à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de la CFE-CGC fédération de l'assurance ;

1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 2122-11 du code du travail : " Après avis du Haut Conseil du dialogue social, le ministre chargé du travail arrête la liste des organisations syndicales reconnues représentatives par branche professionnelle (...) " ; qu'en application de ces dispositions, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a pris, le 24 décembre 2013, un arrêté " fixant la liste des organisations syndicales reconnues représentatives dans les branches des sociétés d'assurance " ; que l'article 1er de cet arrêté mentionne la CFE-CGC au nombre de ces organisations syndicales reconnues représentatives ; que son article 2 détermine, pour la négociation des accords collectifs prévue au titre de l'article L. 2232-6 du même code, les audiences respectives de ces organisations syndicales ; qu'à ce titre, il fixe l'audience de la CFE-CGC à 14,24 % ; que par l'arrêt attaqué du 9 mars 2015, la cour administrative d'appel de Paris, saisie par la CFE-CGC fédération de l'assurance d'une requête en annulation pour excès de pouvoir de cet arrêté, a rejeté cette requête en tant qu'elle demandait l'annulation de son article 1er, faute d'intérêt pour agir de l'organisation syndicale requérante, mais a annulé son article 2 ; que la fédération CFDT banque et assurances se pourvoit en cassation contre cet arrêt en tant qu'il annule l'article 2 de l'arrêté du 24 décembre 2013 ;

2. Considérant, en premier lieu, que l'article L. 2122-5 du code du travail relatif à la détermination de la représentativité des organisations syndicales au niveau de la branche dispose que " Dans les branches professionnelles, sont représentatives les organisations syndicales qui (...) 3° Ont recueilli au moins 8% des suffrages exprimés résultant de l'addition, au niveau de la branche, d'une part, des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires aux comités d'entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants, et, d'autre part, des suffrages exprimés au scrutin concernant les entreprises de moins de onze salariés dans les conditions prévues aux articles L. 2122-10-1 et suivants (...) " ; que, pour la détermination de cette représentativité s'agissant des organisations syndicales catégorielles, l'article L. 2122-7 du même code prévoit que " Sont représentatives au niveau de la branche à l'égard des personnels relevant des collèges électoraux dans lesquels leurs règles statutaires leur donnent vocation à présenter des candidats les organisations syndicales catégorielles qui sont affiliées à une confédération syndicale catégorielle interprofessionnelle nationale et qui remplissent les conditions de l'article L. 2122-5 dans ces collèges " ; que ces dernières dispositions, qui conduisent à ne prendre en considération que les seuls suffrages recueillis dans les collèges électoraux dans lesquels un syndicat a statutairement vocation à présenter des candidats, sont applicables, pour la branche des sociétés d'assurance, à la CFE-CGC fédération de l'assurance pour la détermination de son caractère d'organisation syndicale représentative ; que cette détermination a fait l'objet de l'article 1er de l'arrêté du 24 décembre 2013, qui n'est plus en litige ;

3. Considérant, en second lieu, que, s'agissant en revanche de la mesure, au sein d'une même branche professionnelle, des audiences respectives des organisations syndicales représentatives, l'article L. 2232-6 du code du travail dispose, s'agissant des accords intercatégoriels, que " La validité d'une convention de branche ou d'un accord professionnel est subordonnée à sa signature par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli, aux élections prises en compte pour la mesure de l'audience prévue au 3° de l'article L. 2122-5 ou, le cas échéant aux élections visées à l'article L. 2122-6, au moins 30 % des suffrages exprimés en faveur d'organisations reconnues représentatives à ce niveau, quel que soit le nombre de votants (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que, lorsque le ministre chargé du travail fixe, en application des dispositions de l'article L. 2122-11 du même code, les audiences respectives des différentes organisations syndicales reconnues représentatives dans une même branche professionnelle en vue d'établir la validité de futurs accords de branche intercatégoriels, il lui appartient de rapporter le nombre des suffrages exprimés en faveur de chacune des organisations reconnues représentatives au nombre total des suffrages exprimés en faveur de l'ensemble des organisations reconnues représentatives dans cette branche ; que tel est l'objet, pour la branche des sociétés d'assurance, de l'article 2 de l'arrêté du 24 décembre 2013 ;

4. Considérant que, pour annuler, par l'arrêt attaqué, l'article 2 de l'arrêté du 24 décembre 2013, la cour administrative d'appel a jugé que, pour fixer l'audience relative de la CFE-CGC dans la branche des sociétés d'assurance, le ministre chargé du travail aurait dû tenir compte, s'agissant du " premier collège ", prévu par l'article 19 de la convention collective nationale du 27 mai 1992, rassemblant des ouvriers et employés ainsi que des techniciens et agents de maîtrise, non pas seulement des résultats obtenus par cette organisation aux élections pour lesquelles les procès-verbaux mentionnaient que ce collège comportait des salariés qu'elle avait vocation à représenter, mais de ses résultats à la totalité des élections dans ce collège ; qu'en statuant ainsi, la cour administrative d'appel de Paris, dont l'arrêt est suffisamment motivé sur ce point, n'a ni dénaturé les faits, ni excédé les termes du litige dont elle était saisie, ni entaché sa décision d'erreur de droit ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la fédération CFDT banques et assurances n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ;

6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la fédération CFDT banques et assurances la somme de 3 000 euros à verser à la CFE-CGC fédération de l'assurance au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que ces dispositions font, en revanche, obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la CFE-CGC fédération de l'assurance qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi la fédération CFDT banques et assurances est rejeté.

Article 2 : La fédération CFDT banques et assurances versera à la CFE-CGC fédération de l'assurance une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la fédération CFDT banques et assurances, à la CFE-CGC fédération de l'assurance et à la ministre du travail.

Copie en sera adressée à la Confédération générale du travail, à la Confédération générale du travail-Force ouvrière, à l'Union nationale des syndicats autonomes et à la Confédération française des travailleurs chrétiens.


Synthèse
Formation : 4ème - 5ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 390059
Date de la décision : 08/11/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-05-01 TRAVAIL ET EMPLOI. SYNDICATS. REPRÉSENTATIVITÉ. - 1) DÉTERMINATION DU CARACTÈRE D'ORGANISATION SYNDICALE REPRÉSENTATIVE AU NIVEAU D'UNE BRANCHE PROFESSIONNELLE (ART. L. 2122-7 DU CODE DU TRAVAIL) - APPLICABILITÉ À UNE ORGANISATION SYNDICALE CATÉGORIELLE - EXISTENCE - CONSÉQUENCE - PRISE EN COMPTE DES SEULS SUFFRAGES RECUEILLIS DANS LES COLLÈGES ÉLECTORAUX DANS LESQUELS CETTE ORGANISATION SYNDICALE A STATUTAIREMENT VOCATION À PRÉSENTER DES CANDIDATS - 2) A) MESURE DES AUDIENCES RESPECTIVES DES ORGANISATIONS SYNDICALES RECONNUES REPRÉSENTATIVES AU SEIN D'UNE MÊME BRANCHE PROFESSIONNELLE (ART. L. 2232-6 DU CODE DU TRAVAIL) - PRISE EN COMPTE DU NOMBRE DE SUFFRAGES EXPRIMÉS EN FAVEUR DE CHACUNE DES ORGANISATIONS RAPPORTÉ AU NOMBRE TOTAL DES SUFFRAGES EXPRIMÉS EN FAVEUR DE L'ENSEMBLE DES ORGANISATIONS RECONNUES REPRÉSENTATIVES DANS CETTE BRANCHE - B) CAS DE LA MESURE DE L'AUDIENCE D'UNE ORGANISATION SYNDICALE CATÉGORIELLE RECONNUE REPRÉSENTATIVE [RJ1] - PRISE EN COMPTE DES RÉSULTATS DE CETTE ORGANISATION À LA TOTALITÉ DES ÉLECTIONS DANS LES COLLÈGES ÉLECTORAUX, QUELLES QUE SOIENT LES CATÉGORIES PROFESSIONNELLES COMPOSANT CES COLLÈGES.

66-05-01 1) L'article L. 2122-7 du code du travail, qui conduit à ne prendre en considération que les seuls suffrages recueillis dans les collèges électoraux dans lesquels un syndicat a statutairement vocation à présenter des candidats, est applicable à une organisation syndicale catégorielle pour la détermination de son caractère d'organisation syndicale représentative.,,,2) a) S'agissant en revanche de la mesure, au sein d'une même branche professionnelle, des audiences respectives des organisations syndicales représentatives, il résulte de l'article L. 2232-6 du code du travail que lorsque le ministre chargé du travail fixe, en application des dispositions de l'article L. 2122-11 du même code, les audiences respectives des différentes organisations syndicales reconnues représentatives dans une même branche professionnelle en vue d'établir la validité de futurs accords de branche intercatégoriels, il lui appartient de rapporter le nombre des suffrages exprimés en faveur de chacune des organisations reconnues représentatives au nombre total des suffrages exprimés en faveur de l'ensemble des organisations reconnues représentatives dans cette branche.,,b) Une cour administrative d'appel ne commet pas d'erreur de droit en jugeant que, pour fixer l'audience relative d'une organisation syndicale catégorielle dans une branche professionnelle, le ministre chargé du travail aurait dû tenir compte, s'agissant du premier collège rassemblant des ouvriers et employés ainsi que des techniciens et agents de maîtrise, non pas seulement des résultats obtenus par cette organisation aux élections pour lesquelles les procès-verbaux mentionnaient que ce collège comportait des salariés qu'elle avait vocation à représenter, mais de ses résultats à la totalité des élections dans ce collège.


Références :

[RJ1]

Rappr., Cass., soc., 4 juillet 2012, n°11-60.239, Bull. civ. V, 2012, n°213.


Publications
Proposition de citation : CE, 08 nov. 2017, n° 390059
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Bruno Bachini
Avocat(s) : SCP MASSE-DESSEN, THOUVENIN, COUDRAY ; SCP LYON-CAEN, THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 21/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:390059.20171108
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